Décidément, ça bande dur au Musée d’Orsay. Après Masculin/Masculin l’année dernière, au tour de Sade de défrayer la chronique à l’occasion du bicentenaire de sa mort, dans une exposition aux intentions sulfureuses et osées : « Sade : Attaquer le soleil ». Quoi de plus excitant qu’une bonne partouze en guise de teaser quand le divin marquis se met à dévergonder la culture ? Bien tenté, ce coup de buzz en viendrait presque à desservir le propos, noyé dans la densité de 400 œuvres comme un puceau dans la cohue d’une orgie.
Fallait le faire. Si la nudité n’est pas une première à Orsay, l’approche promotionnelle n’en reste pas moins déroutante de la part d’un musée. Surtout lorsque l’hommage attendu se sert davantage de l’aura de Sade comme prétexte à rassembler plusieurs œuvres sous une étiquette aguicheuse. Clandestin, débridé et longtemps lu sous le manteau, la fascination que suscite ce personnage est restée intacte au travers du temps. Rien d’étonnant donc à vouloir exploiter le juteux filon. De Goya à Picasso et en passant par Rodin, l’événement invite à explorer l’influence que l’écrivain a exercé sur les arts, illustrant le désir, son animalité et ses divers excès de cruauté. Citations des écrits à l’appui. Car « de même que Sade n’a pas inventé le sadisme, le XIXe siècle n’a pas découvert la violence amoureuse, mais va en faire l’une de ses préoccupations majeures » assure Annie Le Brun, la commissaire de l’exposition.
Malgré un parcours labyrinthique et légèrement « fourre-tout », Orsay recrée en finesse l’atmosphère occulte d’un authentique cabinet de perversités. Lumière tamisée, silence cachotier et subversif, c’est à peine si les visiteurs osent chuchoter. Spectateurs de leurs propres travers : humains, trop humains, inhumains. Si personne n’en ressort vraiment indemne, l’expérience vaut largement le coup de faire la queue.