Après vous avoir proposé très récemment deux chroniques de deux documentaires français actuellement en salles au cinéma, un sur l'agro alimentaire, et un autre sur notre système d'assurance chômage, j'ai continué sur ma lancée en regardant quatre autres documentaires français (j'en ai vu aussi deux autres de nationalités différentes mais je reviendrais dessus prochainement), soit qui sont également sortis en salles, soit qui sont passés directement à la TV, mais qui sortent actuellement en DVD.
Quatre documentaires qui ont, comme les deux précédents, une mission pédagogique évidente, tout én évitant la plupart du temps le côté rébarbatif et didactique du documentaire, dans des domaines aussi variés et aussi délicats que la la sécurité routière, l'incertitude professionnelle de la jeunesse, ou l'industrie française.
Petite revue de détails en 4 courtes chroniques qui abordent les thèmes suivants que sont... :
1. ..la sécurité routière avec Tout est permis!!
Coline Serreau, réalisatrice qui a connu un énorme succès avec certaines de ces comédies de fiction, comme évidemment ses deux cartons "Trois Hommes et un couffin" et "La crise", a toujours choisi pour trame des sujets socialement engagés, et continue de le faire avec ses documentaires, comme avec son dernier en date, ce "Tout est permis", sorti en salles en mars dernier et que j'ai pu voir grâce à CinéTrafic et son opération "un dvd contre une chronique".
A priori, pour moi qui n'ai pas le permis et qui a tendance à fuir à toutes jambes dès qu'on lui parle de bagnole, passer une heure et demie à l'intérieur d'un stages de récupérations de points, où Coline Serreau a posé sa caméra pendant de longues semaines, avait de quoi rebuter quelque peu.
Et pourtant "Tout est permis" s'avère bien plus qu'un reportage d'auto moto (que je n'ai jamais vu mais dont je devine un peu le contenu), mais un documentaire d’une humanité saisissante, dans laquelle les stagiaires se révèlent souvent pathétiques, irritants, plein de mauvaise foi mais aussi parfois drôles, même si c'est parfois à leur insu. Tous ces conducteurs, jeunes ou vieux, riches ou pauvres, bien plus d'hommes que de femmes, ont pour seul point ( c'est le cas de le dire) commun une relation plus que délicate avec la conduite, en ayant tous cette fallacieuse impression qu'au volant tout serait permis..Ces individus partagent aussi une même rancœur à l'égard d'une réglementation dont ils estiment qu'elle bride un peu trop abusivement leur liberté individuelle. Car ce qui frappe dans le film de Serreau, c'est de constater que ces stages regroupe une bonne partie de français désobéissants et égoistes, ilustrant à merveille le caractère de plus en plus individualiste de notre société. Coline Serreau pose un regard plein de justesse sur cette France automobiliste, qui peut véritablement amener à faire prendre conscience, à ceux qui l'ignorent encore, des dangers qu’entraîne le manque de prudence dans la conduite automobile.Si le fond prime beaucoup sur la forme (on n'est malheureusement pas chez Depardon, à qui on pourrait penser parfois), le film de Coline Serreau a le grand mérite dans son documentaire de s'attaquer aux idées reçues et arguments fallacieux véhiculés par les lobby automobilistes ou de l'alcool.Et si l'on regrette le tournant un peu trop moralisateur dans sa dernière partie qui pourra irriter même ceux qui n'ont pas le permis, ce Tout est permis reste un documentaire parfaitement aux... points!!Bande-annonce : Tout est Permis - Teaser (1) VF
2 ...les mutations de l'industrie française avec Made in France de Benjamin Carle
Pendant une année entière, le jeune journaliste s'est imposé trois règles: consommer uniquement des biens produits en France; éliminer tout contact avec des produits étrangers; réaliser cette expérience avec un salaire net de 1 800 euros par mois. Une démonstration par l'absurde assez directement inspirée de la démarche d'un Morgan Spurlock qui s'était .exclusivement nourri au McDo de « Super Size Me », le film américain qui dénonçait la malbouffe et l'industrie des fast-foods. Ici, Benjamin Carle s'expose moins au niveau de sa santé, mais ne va pas toujours dans le confort, loin de là.
On s'aperçoit ainsi qu'en achetant un vêtement "made in France", on est satisfait de contribuer à l'emploi d'ouvriers qui travaillent dans des conditions respectables. Et du coup, les seuls vêtements fabriqués en France sont ceux qui sont conformes à l'image que l'on a de la France, avec les fameuses marinières chères à Montebourg, vu que tout le reste, des T-shirts aux pantalons, sont conçus à l'étranger.
Heureusement le journaliste va également à travers ce documentaire au dela des clichés en nous montrant des entreprises qui fabriquent des produits hauts de gamme, témoin par exemple cette ntreprise stéphanoise, Focal, qui fabrique des enceintes très haut de gamme à Saint Etienne et ne joue pas du tout sur ce côté folklorique.
Si la présence d'Arnaud Montebourg (à l'époque ministre de l'industrie), au début et à la fin du documentaire m'a semblé un peu superflue, on appréciera l'idée de départ parfaitement exploitée, et le ton dynamique et optimiste de ce beau projet.
DVD " Made in France – L’année où j’ai vécu 100% français" - Arnaud Montebourg
3....la jeunesse (des)enchantée avec Chante ton bac d'abord de David André:
Ce documentaire, je ne l'ai pas vu en DVD ni dans les salles ( il sorti le 22 octobre dernier dans quelques salles françaises), mais sur France 2, le dimanche soir précédant sa sortie salles, ce qui est assez rare pour être souligné.
Sur un sujet, celui des difficiles choix de l’orientation des jeunes de 18 ans, souvent rebattu et pas forcément folichon sur le papier ( surtout à Boulogne sur Mer, où le taux de chômage est très fort), le réalisateur David André a décidé de suivre six lycéens qui passaient le bac et qui n'hésitent pas à lui confier rêves, espoirs, doutes,et souvent, et c'est la grande particulaité de ce documentaire, en chansons qu'ils interprétent et dont ils ont écrit les paroles.
On obtient ainsi au final un film-documentaire captivant, touchant et drôle, qui aborde de joli façon cette période si charnière que consitue dans l'apprentissage d'un individu la dernière année, avec une pointe de fantaisie et cette touche de légèreté qui donne un nouveau relief fantastique au film..
Ce documentaire fait le pari d'émerveiller le réel avec des chansons et musiques originales, qui alternent avec la chronique douce, grave et pleine d'humour de cette fameuse année du bac. David André pose un regard à la fois réaliste, poétique et jamais misérabiliste sur le présent et le devenir de ce petit groupe de bacheliers qui apparaissent ainsi tous sincères et pertinents.
Et L'idée de faire chanter à chaque jeune ses sentiments, ses doutes et ses rêves fonctionne pas mal, malgré l'inégalité de ses séquences (certaines sont plus réussies que d'autres).
Un film profondement humain et sincère dans sa démarche, qui pose de bonnes questions et a le mérite de redonner la parole (et même en l'occurence le chant) aux ado ces êtres humains que l’on n’écoute que trop peu ou trop mal...
CHANTE TON BAC D'ABORD - Bande-annonce VF
4.... le combat de travailleurs licenciés avec La Saga des Conti de Jérome Palteau
Et pour finir cette revue de documentaires français récents, en voila un sorti en 2013 au cinéma et à coté duquel j'étais passé. Et pour tout vous dire, c'est vous chers lecteurs de Baz'art, qui m'ont fait prendre conscience de l'existence de ce documentaire lors du petit jeu concours que j'ai fait en août dernier autour du film Z 32, lorsque je vous ai demandé de me citer votre documentaire préféré de tous les temps, et de m'en donner les raisons.Si beaucoup avait cité "Sur le chemin de l'école", "le cauchemar de Darwin" ou" une vérité qui dérange" ( trois documentaires incontournables et incontestés chacun dans leur genre), une petite dizaine de personne avaient indiqué à mon grand étonnement cette saga des Conti paru en DVD aux Editions Montparnasse en septembre dernier.
Le film nous renvoie en mars 2009, lorsque les 1120 ouvriers de l'usine Continental de Clairoix apprenaient leur licenciement et ont décidé de se battre contre cette décision de licenciement.
Pendant trois mois et même plus, ces ouvriers se sont battus corps et âmes. Le documentariste Jérome Palteau, natif du cru, les a suivis pas à pas avec ce qu'il faut d'empathie et d'intensité. Le film est assez poignant à voir, tant ce combat de David contre Goliath , de voir 'autant d'individus mobilisés contre leur employeur afin de ne pas se faire "bouffer" par le système est exemplaire tant il arrive à nous faire partager la "rage" et la colère qui anime ces travailleurs mis au chômage du jour au lendemain, face au démantèlement de l'outil industriel français.
La saga des conti est ainsi une belle démonstration (certes un poil manichéenne par instants, mais c'est le lot de ce documentaire forcément partial) que tout n'est pas écrit d'avance par le patronat et les actionnaires, et que le mot solidarité peut parfois prendre tout son sens, tant tout le monde, des ouvriers aux cadres sont remontés afin de défendre les droits de tous face à cette véritable injustice qui malheureusement ne cesse de trouver de nouvelles illustrations dans la politique économique et industrielle française.
La Saga des Conti - Bande-annonce