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une femme reconnaissante

Publié le 24 novembre 2014 par Dubruel

d'après LE PÈRE (1887) de Maupassant

Jean de Gallois

Et moi,

Nous nous promenions

Dans les environs

De sa propriété de Chanteloup.

Tout à coup,

Une voix cria dans le lointain :

-« Monsieur, monsieur ! » Jean répondit :

-« Nous sommes ici, Martin. »

Quand le valet

Nous eut trouvés,

Il dit :

-« C’est la bohémienne de monsieur. »

-« Nous sommes donc le 19 septembre ! »

-« Mais oui, monsieur. »

-« Martin, dites-lui de m’attendre.

Nous rentrons dans un moment. »

-« Allons doucement, me dit Jean.

Je veux te conter cette histoire :

Je faisais le tour de ce bois, un soir.

Soudain, Bock, mon chien,

Un grand saint-germain,

S’arrêta

Et grogna.

Je crus à la présence d’un sanglier.

J’avançais sur la pointe des pieds

Afin de ne pas faire de bruit.

Puis j’entendis des cris,

Des cris humains,

Plaintifs, déchirants.

Je m’approchai rapidement

Et aperçus devant moi

Une carriole de marchands forains.

Je montai les trois marches de bois.

Un homme très brun, à genoux, semblait prier

Tandis que sur un pauvre divan,

Une femme nue à moitié

S’agitait et hurlait.

Elle était en mal d’enfant !

L’homme, une sorte de Marseillais,

Me supplia de l’aider à délivrer sa belle,

Me promettant,

En échange, une reconnaissance éternelle.

Je lui ordonnai sèchement :

-« Allez chercher une infirmière ! »

-« Notre cheval est tombé dans une ornière.

Il a la patte cassée

Et ne peut plus se lever. »

-« Alors, emmenons votre femme chez moi. »

Haletant,

Suant,

Nous marchâmes tous trois,

Jusqu’au château

Et nous avons couché la femme aussitôt.

Je fis appeler le médecin.

…Peu après, la mère et l’enfant se portaient bien.

Camille la mère, le bébé et le Marseillais

Sont restés sous mon toit pendant huit jours !

L’année suivante, jour pour jour,

Après le déjeuner, Martin, mon valet

Venait au salon me trouver :

-« C’est la bohémienne de l’an dernier

Qui vient vous remercier. »

-« Fais-la entrer. » Je demeurai étonné

De voir qu’elle était accompagnée

Par un beau et grand garçon

Très blond.

Il n’était certes pas du Midi.

Camille,

Tenant par la main sa petite fille,

Me dit :

-« On n’a pas voulu laisser passer

Cet anniversaire sans vous apporter

Nos remerciements

Et le témoignage de notre reconnaissance. »

Puis nous causâmes un moment

De cette mémorable naissance.

La pauvre femme revient tous les ans,

À la même date avec son enfant

Et chaque fois …avec un nouveau fiancé.

Un seul, un Auvergnat,

Me ’’ remerchia’’,

Deux années d’affilé.

Quand nous arrivâmes chez Jean,

Trois personnes l’attendaient patiemment.

L’homme, un roux, lui dit avec un grand salut :

-« Monsieur le Comte, nous sommes venus

Vous dire encore un grand merci. »

C’était un Belge ! Et puis,

La petite fille

Récita un compliment.

Je demandai à Camille :

-« Est-ce le père de votre enfant ? »

-« Oh non ! » -« Il est mort, son père ? »

-« Oh non ! Il a épousé une crémière. »

-« Alors, celui de l’accouchement,

Le Marseillais,

Était-ce le premier ? »

-« Oh non ! Celui-là, il est parti

Avec mes économies ! »

-« Et le vrai père, connait-il votre enfant ? »

-« Oui, mais comme il en a deux

Avec sa femme maintenant

Il s’en occupe très peu. »


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