Le fameux tournoi de tennis s’est ouvert, et les allées de la Porte d’Auteuil fourmillent d’amateurs de revers et de rebonds ; la quinzaine s’annonce bien. Mais d’où viennent cet engouement et cet enthousiasme ?
Certains, préférant le ballon rond ou ovale, s’étonnent de ce jeu dépourvu d’esprit d’équipe et de ces raquettes, curieux appendices ; ils regrettent ces belles combinaisons nées de l’entente entre coéquipiers. D’autres, n’aimant que le théâtre et la musique, s’étonnent de l’intérêt qu’il peut y avoir à suivre des yeux un objet en mouvement, balle ou ballon.
Sous ces préférences se cache pourtant un fond commun d’admiration. C’est ce sentiment qui assemble les hommes. Ce qui plaît, c’est de voir cet athlète maîtrisant les gestes de son corps ; d’écouter ce pianiste qui a surmonté les difficultés de l’exécution ; bref, cette grandeur de l’homme qui a su vaincre les premiers échecs, la lassitude, les doutes.
Ces victoires sur soi sont sublimes et nous agréent par-dessus tout. Le spectateur admire dans ces coups droits placés et ces services sur la ligne les heures d’entraînement et le sang-froid. Ce contrôle orienté et cette passe en profondeur sont admirées comme des victoires sur l’approximation du débutant. Cette maîtrise est sublime, car au-dessus du commun, et explique l’engouement pour ce genre de spectacles.
Si l’art du poète, du dramaturge ou du compositeur était aussi visible que ce passing le long de la ligne ou que ce coup-franc qui lobe le gardien, les foules seraient plus nombreuses au théâtre et au concert. Là aussi, mais plus cachées, se trouvent des victoires sur la médiocrité et la facilité. Celui qui ne les aperçoit pas s’y ennuie.
En tout spectacle nous cherchons et aimons le surhumain.