Il y a un peu plus d’un an , je vous disais tout le bien que je pensais de Daran (le nom d'artiste de Jean Jacques Daran, son nom complet), un auteur compositeur interprète phare de la scène français dont le talent n’était, en France, du moins, pas reccnnu à mon sens, à la hauteur de sa valeur.
Ce que j’ignorais évidemment à l’époque, c’est qu’un an après, j’allais pouvoir dire(tout ce bien en question) directement de vive voix à l’artiste en question, puisque dans le cadre de la sortie de son nouveau disque "Le monde perdu", j’ai eu l’immense privilège la semaine passée de dialoguer plus d’une demi heure au téléphone avec Daran.
Je lui ai notamment parlé de ce magnifiquealbum Le petit peuple du bitume en 2007, qui pour moi, est incontestablement un des plus grands albums de rock français de ces dix dernières années, composé de pas mal de longues plages, aux solos instrument aux longs et ébouriffants, contenait quelques perles exceptionnelles, comme un Mouvement des Marées, et que j’étais ravi d’avoir eu 5 ans après cet album et cet exil volontaire au Québecdes nouvelles en 2012 avec un album "L’homme dont les bras sont des branches" de très belle tenue, puis à peine deux ans plus tard ce "Monde Perdu "que je me suis empressé d’écouter avec toute l’attention que ce joyau mérite..
Daran m'a toujours émerveillé par la qualité de sa voix, sa musique et ses thématiques abordées, entre chroniques sociale et rêveries d'un monde meilleur, et ce "Monde Perdu", qui ne peut s’écouter en faisant autre chose au risque de passer complètement à coté, ne déroge pas à la régle, au contraire.
En effet, ce dernier opus, exclusivement acoustique, et très épuré, n’a jamais aussi bien mis en valeur la voix de Daran ( le timbre éraillé, fragile de l'interprète n'a jamais été aussi beau) ainsi que la grande qualité des textes de son fidèle parolier Pierre Yves Hébert.
Daran songeait depuis de nombreuses années à réaliser un album folk, totalement dépouillé, qui valorise son indéniable talent de songwriter, accentué par ce grain vocal reconnaissable à mille lieues.
Guitare folk, harmonica, textes ô combien introspectifs, Daran nous dévoile toute en retenue ses ritournelles avec une intensité jamais égalée jusqu'à présent, avec des morceaux d'une force et d'une beauté assez incroyable, comme ces gens du voyage qui prolonge parfaitement la thématique du petit peuple du bitume, en s'interessant à ces sans papiers toujours obligés de se nomadiser malgré eux.
Daran - Gens du voyage
J'avais, vous vous en doutez, énormément de choses à dire à Daran, et du coup, ce dernier, que je pensais moins à l'aise avec la promo (certainement des a priori liés à son côté rebelle et hors du sytème) s'est montré super généreux et affable au téléphone, et a répondu à toutes mes questions (en me tutoyant d'emblée, moi qui ait un peu de mal à tutoyer les célébrités), mêmes celles qui n'étaient pas forcément très agréables à entendre, notamment sur le potentiel peu commercial du disque, comme je vous le prouve dès à présent :
ITW exlcusive avec Daran pour son album "Les mondes perdus" :
Mon amour pour la langue française est immodéré !!!
Baz'art : Bonjour Jean Jacques, et merci beaucoup de bien vouloir prendre un peu de votre temps pour les lecteurs de Baz'art et avant tout, félicitations pour nous avoir offert ce magnifique nouvel album.
Ce qui frappe en premier en écoutant cet album c’est évidemment sa radicalité par rapport à le reste de ta discographie, ce côté, très dépouillé, acoustique tourné à l’essentiel, afin de mettre en valeur le texte juste avec une guitare et un harmonica…On pense énormément aux Storytellers du folk nord américain (Johnny Cash, Neil Young, Dylan, Springsteen), et le fait que tu résides au Canada depuis plusieurs années y est sans doute pour quelque chose. Franchement, est-ce tu aurais pu faire un tel album de la même façon si tu étais resté en France ?
Daran : Disons en fait que je pense avoir atteint le bon moment pour créer un tel album. Avant, je n’aurais pas pu atteindre un dépouillement aussi ultime, même si cela fait longtemps que j’ai dans la tête ce projet de faire un album en entier juste en guitare voix.
Mais je pense que si j’étais resté en France, il n’aurait pas tout à fait ressemblé à celui-ci. Il est évident que les influences, toute cette veine folk nord américaine dont tu parles , auxquelles j’ajouterais aussi Léonard Cohen, ont beaucoup compté dans l’élaboration de mon disque, et le fait que je baigne dedans depuis près de 5 ans, a forcément compté, de manière inconsciente ou non, lorsque j’ai commencé à bosser sur cet album.
Baz'art :Et justement, comment s’est déroulé la conception de cet album, de manière concrète? Et plus particulièrement, est-ce que le fait d’avoir été le plus sobre possible au niveau de l’accompagnement musical et des arrangements t’a-t-il donné encore plus de pression pour le soin des textes et de la voix qui forcément sont encore plus mis en avant que d’habitude ?
Daran : Ah, tu touches un point important du disque, qui s’est évidemment imposé très vite à moi lorsque je me suis mis à enregistrer cet album. C’est un album que j’ai conçu en étant totalement seul avec moi-même, j’étais souvent dessus entre deux dates de ma précédentes tournées, je m’enfermais chez moi dans mon studio et tout ce travail très introspectif, de mise à nu a forcéement eu des incidences sur ma façon de chanter et la façon de mettre en valeur mes textes.
Il y a d’ailleurs un truc un peu paradoxal :on m’a dit à plusieurs reprises que sur ce disque, je n’avais jamais chanté aussi juste alors même que je n’ai jamais été autant dans le « sous chanté», alors même que c'est un exercice très difficile de ne plus se cacher derrière une grosse guitare et de tenir une ligne très ténue, très fragile.
En même temps, sur cet album, j’ai eu le temps comme allié, je n’avais pas de contraintes de date de sortie, et du coup, j’ai fait l’album sur la durée, et cela m’a permis de ciseler de manière parfaite les morceaux avec la voix et le texte le plus adapté à la tonalité de l’album.
Baz'art : A ce propos, est que ca a été facile pour toi de tenir toute la lignée du disque sur cette tonalité là, est ce que tu n’as pas été tenté sur un ou deux morceaux de rajouter une ou deux envolées vocales comme tu as l’habitude de faire sur les autres albums ? Et au niveau de l’accompagnement musical, vu que cet univers est tellement éloigné du Petit peuple du bitume par exemple, avec plein d’envolées lyriques, et de longues plages de musique pendant plusieurs minutes à la Pink Floyd, tu n’as pas eu envie de temps en temps de céder à ce péché mignon ?
Daran : Ah, mais que les choses soient bien claires : ce n’est pas parce que j’ai fait cet album que je renie mes gouts d’avant : j’aime toujours autant Pink Floyd et ce genre d’"envolées musicales" comme tu dis. C’est juste que là, j’avais vraiment envie d’autre chose et que le projet imposait intrinsèquement que je reste dans ce schéma totalement dépouillé, donc tout s’est fait de manière naturelle.
Concernant la voix, il y a deux moments dans l’album où je la pousse un peu plus que sur le reste des morceaux, car cela se justifiait précisemment, mais à part ces deux endroits là, il fallait vraiment que je reste dans la même tonalité vocale, très douce, presque chuchotée, et ce faut vraiment un exercice, pas toujours évident mais toujours passionnant à faire.
Baz'art : A propos des textes, il y a au départ une sorte d’antinomie naturelle de faire sonner des mélodies folk et country avec des paroles en français puisqu’on n’a plus l’habitude d’entendre ce genre de morceaux avec des textes en anglais (dernièrement Bertrand Cantat avec son groupe Détroits s’est essayé à ce genre d’approche, mais les exemples sont rares)…Est ce que tu as hésité à chanter en anglais sur ce disque sur certains morceaux ( comme tu l’avais fait sur la BO de Monsieur Papa, le film de Kad Merad), ou bien était ce très clair pour toidès le début du projet d’être un story teller dans lalangue de Molière ?
Daran : Ah non, je n’ai jamais pensé à chanter ce disque en anglais… pour moi le français est ma langue naturelle, celle avec laquelle je manie les mots de manière la plus évidente qui soit…oui j’ai fait deux trois trucs en anglais, mais franchement là pour un album qui donnait autant d’importance au texte et à la voix, il était évident dès le départ que je le chante en français… Je porte un amour immodéré pour cette langue que je trouve magnifique, donc chanter les Mondes Perdus en français était évident pour moi, et forcément la meilleure façon de la défendre.
Baz'art : Au niveau des textes justement, ton fidèle compère Pierre- Yves Lebert en a écrit une nouvelle fois un certain nombre (Miossec a écrit le texte dumorceau qui donne le titre à l’album et Morain un autre). Comment se passe concrètement le travail de collaboration avec lui : tu amènes des thématiques que tu aimerais voir aborder et c’est lui qui ensuite finalise le texte ?
Daran : Oui oui, c’est à peu près comme cela que ca se passe : j’apporte une ligne directrice, des grands thèmes, des pistes à suivre et ensuite il bosse dessus et me propose sa version, et j’y apporte le cas échéant quelques variations en fonction de ce que je peux chanter ou pas…mais tu sais, on se connait tellement bien maintenant qu’on a plus besoin de beaucoup se parler pour se comprendre tous les deux, ca se fait de façon vraiment naturelle.
Pour « le bal des poulets », par exemple, j’avais très envie d’aborder ce problème du monde ouvrier face à la mondialisation, des usines qui se ferment, mais vu sous un angle intime, individuel, et j’ai trouvé que ce qu’ a écrit Pierre Yves la dessus est vraiment magnifique et ressemble énormément à l’idée que j’avais en tête au départ.
Baz'art :Oui, d’ailleurs, à ce propos, dans tes textes, on voit bien une continuité évidente avec les thématiques des précédents albums- (Les gens du voyage par exemple est un prolongement logique et évident "du petit peuple des bitumes"), avec toujours ce même intérêt et vraie tendresse pour les paumés, ces individus à la marge de la société, qui se contentent de peu, mais si je peux me permettre, je trouve que ta vision globale du monde n’a peut etre jamais été aussi desespérée avec pas mal de morceaux vraiment sombres (Valentine’s day, Le Bal des poulets, le monde perdu, Tchernobyl, T’es jaloux aussi qui, sous ses dehors plus légers, finit un peu tragiquement)…Moi qui croyais que tu avais atteint la sérénité en partant au Canada, pourquoi alors une telle vision du monde ?
Daran : Ah, ben, tout simplement parce que les choses ne s’arrangent pas mon bon monsieur… ce n’est pas parce que je vis au Canada que je suis dans ma bulle et que je vois pas que le monde n’a jamais été aussi mal qu’aujourd’hui ( rires)… Les individus en marge de la société, comme tu dis, ils ont jamais été aussi nombreux qu’aujourd’hui , ca devient vraiment une très grosse part de la population, donc forcément j’ai envie de parler d’eux, encore plus maintenant qu’avant si c’est possible…
Mais je ne suis pas trop d’accord sur un point avec toi : pour moi dans cet album, il ya tout un tas de morceaux optimistes, avec plein de lueurs d’espoirs en tout cas… "T’es jaloux" que tu cites en exemple de morceau triste, il faut le voir comme un conte de fées, Tchernobyl aussi n’est pas du tout un morceau pessimiste, ca dit que la nature reprend ses droits après la catastrophe…
Si on met à part le titre Valentine’s day qui est, je te le concède, très noir, on a essayé avec Pierre Yves de porter un regard lucide sur ces individus qui composent la société, parfois triste, car les réalités sont ce qu’elles sont, mais avec toujours une pointe de tendresse et d’espoir…
Baz'art : Toujours dans le choix des textes, j’ai vu que tu avais repris dans cet album ton très beau morceau « une sorte d’église » qui figurait déjà dans l’album Pécheur de Pierre en 2003. Pourquoi un tel choix, est ce que ce morceau là en particulier que tu souhaitais reprendre de manière acoustique, est ce que c’est pour insister sur le fait que dans ces temps d’extremisme religieux importants, il est nécessaire de trouver une autre spiritualité, en dehors de la religion ?
Daran : Non, ce choix de remettre "Une sorte d’église" sur ce nouvel album… C’est une jolie histoire au départ en fait, c’est moins une question de fond que de forme : À l'occasion d'une émission de TV québécoise équivalente à Taratata en France, Louis-Jean Cormier, leader de Karkwa, auteur compositeur célèbre au Québec et que j’aime tout particulièrement, a chanté avec moi "Une sorte d'église" en guitare voix et j’ai trouvé cette version tellement belle que je regrettais de ne pas l’avoir immortalisée.
Du coup, quand l’idée de faire un album entièrement acoustique s’est concrétisé, je me suis dit qu’il était logique de l’inclure dans l’album, c’était un prolongement évident.
"UNE SORTE D EGLISE" - DARAN
Baz'art :Dans le dossier de presse, tu affirmes que les maisons de disques ont toujours été frileuses avec un projet comme celui-là. Mais qu’est qui selontoi leur faisait peur concrètement : le coté épuré, pas formaté des mélodies ou ce coté noir des textes (désolé, mais malgré tes arguments contraires, je persiste et signe là-dessus) ?
Daran : Ah, tout leur faisait peur, c’est certain, ça…c’est un peu suicidaire de sortir un disque juste en guitare voix, c’est pas du tout à la mode actuellement.
Franchement, dans ce monde actuel ou tout va super vite, on a plus le temps de rien faire, sortir un disque qui nécessite de rester concentré et très attentif pour l’écouter attentivement, c’est plus que risqué..et puis comme tu le dis, ce n’est pas du tout formaté pour les radios, j’ai pas de refrains entrainants que les gens peuvent retenir très vite donc franchement ce projet n’est pas très vendeur sur le papier…
Mais, je le dis totalement sincèrement, je m’en moque un peu de tout cela, j’en suis arrivé maintenant à une période de ma vie où je fais ce que j’ai envie de faire, sans écouter les dictats commerciaux, donc j’ai pu faire l’album que j’ai toujours révé de faire, et j’en suis ravi.
Baz'art : Oui d’ailleurs, tu l’as dit aussi sur le dossier de presse qu’aujourd’hui, tu n’avais plus de comptes sur mes choix artistiques . Ca veut dire qu’avant , du temps des chaises ou au début de votre carrière solo, tu avais le sentiment de devoir faire constamment des concessionset d’expliquer tous tes choixartistiques, et que désormais, tout cela est derrière toi, tu te sens vraiment libre?
Daran : Ah, tu peux pas te douter à quel point j’ai du lutter tout le long de ma ma carrière pour imposer mes choix…par exemple, pour mon second album, "le 8 barré", sur un titre qui a bien marché comme "Domir Dehors" (le seul morceau vraiment connu du grand public), tu peux pas imaginer à quel point j’ai lutté pour qu’il y ait la longue intro musicale… la voix qui apparait au bout de plus d’une minute, franchement ca n’était juste pas possible pour les maisons de disques, mais bon j’ai pas cédé la dessus, et d’ailleurs j’en suis très fier…
Alors voilà, c’est tout ce genre de lutte incessante qui me fatiguait énormément, et là c’est sûr que d’où je suis et avec mes moyens du bord, je suis débararassé d’une grande partie de ces contraintes et c’est quand même super jouissif, je trouve..
Baz'art :Oui, sauf que tu as quand même une autre contrainte dont tu ne peux pas totalement t’affranchir, celle du public, en tout cas, je veux parler du public français puisque j’ai cru comprendre que ca marchait bien pour toi au Québec … Tu as connu du succès en France il ya quelques années avec des morceaux plus rocks, plus électriques, plus accessibles. Comment alors penses tu réussir à reconquérir le public français et accaparer l’attention des gens , avec un album aussi épuré, qui n’est pas forcément raccord avec le gout du grand public surtout si les radios ou les tourneurs te tournent le dos, et surtout avec un album certainement plus fait pour la scène que pour écouter chez soi en faisant autre chose ?
Daran : Oh, je ne reconquérirais ce que je peux reconquérir évidemment, je ne suis pas Don Quichotte (rires) …Non franchement, je ne me pose pas ce genre de question, si je commence à penser en terme de marketing de ce qui va vendre ou ne pas vendre, franchement je ne me lance pas dans un tel projet, c’est sûr…
C’est certain que c’est un album qui requiert de l’attention, de l’écoute, et c’est sur qu’on n’est plus à l’époque du vynile (même si ca revient en force) où l’on pouvait commencer par la Face B et ou on donnait la chance aux dernières chansons de l’album…aujourd’(hui, si on écoute les deux premièrs morceaux d’un album, c’est déjà bien…
Mais franchement, j’ose encore croire que les gens peuvent faire cet effort là d’écoute et d’attention … tu sais, il reste encore à notre époque une petite bulle moderne où les gens peuvent s’isoler , c’est la voiture … en bagnole les gens arrivent encore à prendre le temps de mettre un CD dans leur auto radio et de faire attention aux paroles et à la musique, sans être trop embeté par leur téléphone ou d’autres parasites..
Et puis, pour finir avec ce sujet, tu as raison évidemment sur un point : mon album est bien plus fait pour la scène au départ, c’est là que les gens auront les meilleures conditions pour écouter attentivement ce que j’ai à leur proposer sur ce disque…
Baz'art : Concernant la scène justement, tu peux nous dire un mot sur la tournée prévue en françe, tu vas faire un seul sur scène, pour offrir un écrin le plus intimiste possible ? Et au niveau des dates prévues, tu as quoi de fixé, il y aura des dates sur Lyon ou sa région ?
Daran : En fait, sur cette tournée, je tente un concept un peu nouveau : oui je suis en solo au niveau de la musique, mais je suis doublement accompagné d'abord d’une belle scénographie sur écran, ainsi que d’un dessinateur sur scène qui interagit avec les images filmées, c’est une sorte de concert dessiné que j'ai voulu mettre en place pour la toute première fois de ma carrière.
J’essaie en fait de faire un peu l’inverse de ce que j’ai fait avec le travail sur la BO du film de Kad Merrad "Monsieur Papa", ici il s’agit de mettre de l’image sur la musique et non pas le contraire , on arrive avec notre projecteur donc c’est pas bien embetant pour les salles, et sincèrement au Québec tous les spectateurs qui sont venus ont trouvé le spectacle assez magique donc j’espère qu’il plaira autant qu’en France…
Pour le moment, j’ai une dizaine de dates de fixées, je commence en mars sur Paris au café de la danse, je fais quelques dates aussi dans le Nord, puis je reviendrais dans un second temps sur le Sud de la France et normalement sur Lyon, oui, il me semble.
Baz'art :Je voulais aussi qu’on aborde ton travail de compositeur pour d’autres artistes, comment tu fait pour t’approprier des univers musicaux a priori radicalement différent du tien je pense à ta collaboration avec Johnny ou Maurane …en entendant "Trop forte" (dont le texte est écrit aussi par ton parolier habituel Pierre Yves Hébert) la 1ere fois je me suis dit sans savoir que c’est marrant ca sonne comme du Daran… c’est difficile ou pas de concilier ces deux approches , il y a pas un peu un côté Docteur Jekyl et Mr Hyde ?
Daran : Ah, c’est un tout autre travail, c’est certain, ca n’a strictement rien à voir mais j’arrive parfaitement à dissossier les deux… C’est marrant que tu dises reconnaitre ma patte dans la chanson de Maurane, car franchement ca a pas grand-chose à voir avec ce que je fais d’habitude sur mes disques…
Et sincèrement, à part peut etre un ou deux morceaux près, je ne me serais jamais vu mettre sur un de mes albums un titre que j’ai composé pour un autre artiste. Il faut pas mal de savoir faire, fabriquer un écrin pour quelqu’un d’autre que soi, et trouver sa place de compositeur et ne pas aller au-delà de ce rôle là, mais bon je connais les limites de l’exercice et il n’y a pas de confusion dans mon esprit …c’est un exercice très différent , mais franchement j’y prends aussi pas mal de plaisir..
Baz'art :Comment tu expliques que malgré l’éloignement géographique, tu es toujours bien perçu par le milieu et arrivez à conserver fidélité avec des gens comme Miossec, Pagny ou Maurane justement…C’est l’éloignement qui crée le manque en fait et l’envie de travailler avec toi ?
Daran : Non, c’est plus simple que cela, c’est juste que dans ce métier, et avec les avancées technologiques qui sont les notres, il n’y a plus vraiment de distance et j’ai pas du tout le sentiment d’être plus éloigné du milieu de la musique quand que je vivais en Bretagne …Paris Brest ou Paris Montréal, ca revient quasi du pareil au même, je t'assure… c’est tellement facile maintenant de se joindre, de bosser à distance, que franchement on n’a aucun de mal à collaborer avec qui le désire...
Baz'art : Sinon, une dernière petite question pour la route, vu que Baz'art est avant tout un site axé cinéma… tu as composé en 2011 la Bande Originale du film de Kad Merad, "Monsieur Papa" ( voir chronique du film ici)…est ce un exercice que tu as aimé, et si oui, y a t-il d’autres projets dans ce sens qui pourraient déboucher rapidement ?
Daran : Oui, j’ai vraiment adoré ce projet, bosser sur ce disque, et voir ensuite mon travail finalisé à l’image, mais il faut savoir que c’est un travail vraiment très chronophage, ca m’a pris plus de 6 mois pour le faire, et actuellement avec la sortie du disque, la tournée et autres, ce n’est vraiment pas possible que je consacre autant de temps à un tel projet …
Si j’ai une proposition vraiment très interessante dans ce domaine, évidemment que je l’étudierais avec beaucoup d’attention, mais il faudrait vraiment que ca soit un très très beau projet…
Un beau projet qu'on te souhaite évidemment tant tu le mérites amplement... Merci énormément à toi Daran pour toutes ces précisions, et très longue carrière à ce Monde perdu et à ta tournée française à venir en 2015...