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Jour 60, Cyril : CARDINAL, Self-titled (1994)

Publié le 27 mai 2008 par Oagd
Jour 60, Cyril : CARDINAL, Self-titled (1994) Cardinal, par Franck Chambrun, dont c'est la première participation à On a Good Day : bienvenue ! Il y aurait deux voies pour les artistes pop, deux relations possibles à la tradition du genre. Une manière héroïque, pleine reprise, au présent, d'un héritage sans âge. Une manière spectrale, promenade plus ou moins inquiète à travers les ruines d'une tradition qui ne se saisit plus qu'à l'état de fragments et de survivances. Pop ronde ou pop zizag, confort mélodique d'un artisanat de haute tradition ou aventure syncopée, déroute rythmique hantée par des souvenirs de gloires fantomatiques. La carrière de Richard Davies n'a cessé d'osciller entre ces deux voies, d'un album à l'autre ou à l'intérieur du même album. Peu d'albums sont allés aussi loin qu'Instinct, de The Moles, sur le chemin d'une pop spectrale et fragmentaire, d'une esthétique de la survivance. Cardinal, le suivant, fait demi-tour, retrouve la forme pleine d'une pop boisée, ligne claire, ronde, à la séduction immédiate. Tous les albums suivants de Richard Davies ouvriront un champ intermédiaire, tendu entre les deux pôles opposés. Il les signera enfin de son nom, comme s'il lui avait fallu prendre un masque pour expérimenter les extrêmes avant d'assumer à visage découvert une position médiane, réconciliée.   La découverte de Cardinal, en 1994, c'est, comme pour Instinct, le choc des premières mesures. Celles d'Instinct annonçaient la mélancolie boiteuse et pluvieuse du voyage, celle de Cardinal le séjour solaire dans la clairière. On en dira autant des pochettes : silhouette de statue abîmée sur le fond vert pour The Moles, gentleman farmers marchant dans l'herbe, le long d'une haie de conifères taillés, le visage ensoleillé. On parla à l'époque de génie pop, d'un album immédiatement classique. Quatorze ans plus tard, l'aisance mélodique séduit toujours, mais si un disque a acquis une valeur historique, s'est imposé comme un jalon, une césure à l'influence durable, c'est Instinct.   Observons les deux types sur la pochette : à gauche Davies, à droite Eric Matthews, auteur pop américain auquel l'exilé d'Australie s'associe le temps d'une halte dans la clairière. Au centre Matthews nous regarde, nous sourie, les bras sereinement allongés le long d'une parfaite panoplie pop. Sur la gauche, Davies a les mains dans les poches, son regard déjà se porte ailleurs, de côté, plus loin. Faut-il en conclure au rôle prépondérant assumé par Matthews dans la conception et la production de Cardinal, à la position marginale d'un Davies occupé par d'autres pensées, plus profondes, moins souriantes ? C'est possible. Cette composition faussement centrée, discrètement déséquilibrée, invite à chercher, sous l'équilibre classique des morceaux, les lignes de fuite, les nuances discordantes, les plis baroques qui font entendre dans Cardinal autre chose qu'une restauration néo-classique, la plus talentueuse soit-elle. On en reparle la semaine prochaine.

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