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le magnétisme

Publié le 09 janvier 2015 par Dubruel

d'après MAGNETISME de Maupassant

Les matelots quittaient ce port

Plusieurs mois par an

Pour pêcher dans le Grand Nord.

Or, une nuit, l’enfant

D’un de ces terre-neuvas

En sursaut se leva

Et se mit à clamer :

« Pé est mort à la mé ! »

On apaisa le jeunot

Mais il se réveilla de nouveau

Et hurlait : « Pé s’est noyé ! »

Un mois plus tard, on apprenait

La noyade de son père, arraché du pont.

La veuve se souvint du rêve de son garçon.

C’était un miracle bien singulier.

Tout le monde était stupéfié.

Les dates furent rapprochées. Voilà :

La même nuit, à la même heure, c’est bizarre,

Coïncidaient l’accident et le cauchemar.

Mystère du magnétisme, n’est-ce pas ?

J’ai interrogé plusieurs veuves

De marins et j’eus la preuve

Que pas une semaine complète

Ne se passait sans qu’un garçonnet

Ou une fillette

Ne rêvat

Et annonçat :

« Le pé est mort à la mé ! »

Si, par hasard, une prédiction

Coïncide avec une disparition,

On crie au miracle aussitôt

Car on oublie de facto

Les songes restés sans confirmation.

J’ai considéré la question

Sur cinquante auteurs de présages

De différents âges :

Huit jours plus tard,

Ils avaient oublié leurs racontars.

Mais si un pêcheur était mort,

La mémoire se réveillait tel un ressort.

Et l’on célébrait l’intervention de Dieu…

Ou le magnétisme, pour les non-religieux.

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Dans mon cercle de relations,

Il se trouvait

Une femme qui n’avait jamais

Retenu mon attention.

Je la classais parmi les insignifiantes

Bien qu’elle ne fut ni laide ni distante.

Elle était de ces êtres compassés

Qui ne retient pas la pensée.

Une nuit, je fus surpris :

Un frisson du cœur passa dans mon esprit.

Je vis cette femme en sa totale nudité.

Je lui découvrais mille qualités

Et un charme que je n’avais jamais observé.

Je me réveillai : j’avais rêvé.

Chacun de nous a déjà pu noter

Qu’un songe pouvait abriter

Une femme désirée,

L’étreindre, l’accaparer.

Eh bien ! Cette jeune femme fut à moi !

La douceur de sa peau

Me restait aux doigts.

Son parfum enivrait mon cerveau.

La tendresse de ses baisers

Sur mes lèvres persistait.

Au matin, je me suis habillé

Et, cœur battant, je suis allé

La voir chez elle

Avec un désir véhément pour elle.

Là, nos yeux se croisèrent.

Elle me fit asseoir sur une bergère.

Je balbutiai des banalités

Qu’elle ne semblait pas écouter.

Alors, je me jetai sur elle brusquement

Et mon rêve s’est accompli.

Je vous le dis :

Elle fut ma maitresse pendant deux ans.

Que s’était-il passé ?

Une coïncidence ? Qui sait ?

Un regard non remarqué ?

Une attitude inexpliquée ?

D’où viennent ces mystérieux

Sentiments affectueux

Négligés par la conscience,

Et inaperçus par l’intelligence ?

Si, après cela, vous ne croyez pas

Au magnétisme, vous êtes un ingrat !


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