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Rachetez-les nous !

Par Amaury Piedfer

Science et Vie Junior, dans son dernier numéro, fait paraître un article fort intéressant sur le recyclage des composants d’ordinateurs, téléphones portables, chargeurs, disques durs, etc…
On voit des photos impressionnantes de « décharges » où s’alignent, s’empilent, suivant les cas, des centaines, des milliers ou dizaines de milliers de ces pièces. On y apprend que ce sont chaque jour tant de milliers de téléphones portables qui sont jetés aux USA, tant de milliers d’ordinateurs chaque année en France, etc…
Le message écolo est sans équivoque : plutôt que de jeter ces objets « bêtement » n’importe où, avec les risques de pollution accrue dont ils sont porteurs, faites l’effort « citoyen » de les jeter dans des décharges spécialisées, de les donner à Emmaüs, etc…
Ces jours-ci, à la radio, un « spot » fait parler un vieux magnétophone, qui nous dit sensiblement la même chose : rapportez-moi à un collecteur spécialisé, vous ferez une bonne action.
Amen.
Pas question ici de contester le besoin écologique de retraiter ces déchets un peu spéciaux ; pas question de se dérober à notre responsabilité collective ; pas question de dire : jetons cela n’importe où.
Donc, c’est entendu, nous ferons le tri, et aiderons au recyclage.
Mais par delà cette belle prise de conscience citoyenne, ne peut-on s’interroger un peu plus loin ?
Pourquoi Emmaüs veut-il récupérer ces objets ? Emmaüs n’est pas un recycleur industriel, ne dispose d’aucun matériel spécialisé pour dépolluer, désosser, revaloriser ces déchets. Que va en faire Emmaüs ? En tirer de l’argent, évidemment : c’est le souci majeur de cette association charitable, qui réutilisera ensuite cet argent au profit des pauvres.
Re-amen.
Emmaüs va donc tirer de l’argent de ces objets, en les revendant, évidemment. A qui ? Aux décharges officielles, aux recycleurs professionnels, aux récupérateurs d’or, d’argent, de cuivre, de cadmium, d’étain, de sélénium, de germanium, de silicium ; aux récupérateurs de composants encore en état de marche qui les revendront sur les marchés africains : les transfos, les diodes, les régulateurs de tension, les transistors de puissance, les câblages et connecteurs, les alims complètes en état de marche sur des appareils en panne pour d’autres raisons, les barrettes mémoire, les cartes vidéo, les disques, floppys, nappes de connexion, les micros et buzzers, les composants enfichés…
Ces « déchets » ont de la valeur. Beaucoup. Et c’est normal, il s’agit de produits technologiques, complexes, raffinés, élaborés, ayant coûté beaucoup à mettre au point et fabriquer. Les jeter tels quels serait un gaspillage idiot ; personne ne conteste cela.
Des gens, donc, vont gagner de l’argent avec ces « déchets ». Mais pas nous. Pas vous, pas moi. Nous, le public, le consommateur en bout de chaîne, nous ne gagnons jamais rien dans ces affaires là. Nous, nous les avons payés, souvent fort cher – nous ne sommes bons qu’à cela, payer. Et quand ça ne marche plus – bien avant le temps que nous aurions estimé raisonnable, nous, pour qu’ils tombent en panne – on nous dit de les jeter dans les poubelles dorées de ces « bienfaiteurs » qui vont les recycler.
Nous payons, puis nous leur donnons ce que nous avons payé et qui vaut encore quelque chose. Nous payons, mais personne ne semble prêt à nous les racheter ; on veut que nous les donnions.
Comme nous donnons le verre que nous avons payé en achetant notre vin ou notre eau minérale, ce verre si gênant paraît-il, mais qui est, lui, entièrement recyclable, et rapporte de beaux profits à ceux qui le récupèrent.
Comme nous donnons le plastique – vous savez, ces formidables collectes de bouchons plastiques qui vont servir à fabriquer des fauteuils pour les handicapés ! A, bon plan, ça, les handicapés ! Comment ne pas se sentir coupable si l’on ne donne pas ?
Comme nous donnons le papier, le carton…
L’écologie a bon dos ! Comme c’est pratique, ce prétexte du « réflexe citoyen » !
Et si on cessait de nous prendre pour des cons, pour changer un peu ? Et si l’on admettait publiquement que le recyclage, en plus d’être bon pour la nature, c’est aussi une formidable source de profit, et que les premiers à en profiter devraient être ceux-là même qui ont payé en premier pour les matières premières, nous ?
Vous voulez mon vieil ordinateur ? Combien m’en donnez-vous ?
Mon vieux portable ? C’est tant.
Ma vieille télé, mon imprimante à aiguilles, ma machine à laver, le poste de radio de mon grand-père ? Quel effort financier ferez-vous pour cela ?
Quand est-ce que les « élites » qui prétendent nous gouverner, et ne font en fait qu’exercer le pouvoir, cesseront de nous prendre pour des cons, des cochons de payant, des serfs taillables et corvéables à merci ?
Quand est-ce que le peuple va se réveiller, et prendre conscience de ce qu’il est sous la coupe de prédateurs ?
Richard Bach.

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