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Responsabilité des attentats: le cynisme des dirigeants français - 3

Par Plumesolidaire
Une miniature célèbre représentant Muhammad et les traits de son visage, extraite de l’ouvrage d’al-Bîrûnî, al-Âthâr al-bâqiya, Iran, XVIe siècle (Paris, BnF, Manuscrits orientaux, Arabe 1489, fol. 5v). Cette image est celle que l’éditeur Belin avait choisi de flouter dans l’un de ses manuels d’histoire destiné aux classes de 5e, en 2005

Une miniature célèbre représentant Muhammad et les traits de son visage, extraite de l’ouvrage d’al-Bîrûnî, al-Âthâr al-bâqiya, Iran, XVIe siècle (Paris, BnF, Manuscrits orientaux, Arabe 1489, fol. 5v). Cette image est celle que l’éditeur Belin avait choisi de flouter dans l’un de ses manuels d’histoire destiné aux classes de 5e, en 2005

Image de l'Institut Français du Proche-Orient

Dans son article Amères leçons d’un crime terroriste, Bruno Guigue met en lumière trois maillons principaux dans la chaînes des responsabilités des attentats du 7 janvier.

Dans le même sens, je me souviens qu'au cours de la dernière campagne pour l'élection présidentielle, seuls les candidats des petits partis avaient répondu à mon interpellation concernant l'enseignement de la lecture et de l'écriture du français aux immigrés et aux étrangers dans leur programme. Les grands partis m'avaient boudé.

L'illettrisme et les carences de l'organisation de la formation professionnelle en France, dont l'effarant gaspillage a été à relevé par Jacques Attali comme l'un des chantiers prioritaires des réformes de l'Etat à engager, sont deux outils qui auraient du, et devraient toujours être à mon sens, privilégiés, comme outils indispensables pour une intégration sans heurt des étrangers salariés ou non.

On sait aujourd'hui qu'une proportion considérable de jeunes qui résident dans les banlieues est sans emploi*. Dans une récente enquête, j'ai lu que le taux ce chômage des salariés étrangers non européens est deux fois supérieurs (autour de 20%) à celui des français et des salariés qui sont ressortissants de l'Union Europénne. Et, si je connais comme tout un chacun quelques personnes, proches ou lointaines, blanches de couleur de peau, brunes, jaunes, noires ou vertes, qui s'échinent à mettre en oeuvre des stratégies de refus d'insertion ou de retour dans le monde de l'emploi salarié, force est de constater que la plupart, de France, de Navarre et d'ailleurs, travaillent, ou souffrent de ne pas travailler assez ou pas du tout.

Sensibilisé à la politique de la ville pour en avoir exercé la mise en oeuvre dans mon domaine de compétence dans une ville emblématique par l'importance et le nombre des ethnies qui y sont installées, je prends note avec consternation, tant j'étais convaincu qu'elle n'était plus que l'ombre de ses ambitions initiales, d'un certain renouveau de l'intérêt pour les enjeux qu'elle représente depuis les évènements du 7 janvier. Si l'énorme chantier de rénovation des banlieues était une impérieuse nécessité, nos politiques semblent se rendre compte aujourd'hui, contrairement à un vieil adage en matière économique que "quand le bâtiment va, tout" ...ne va pas nécessairement bien. 

En particulier dans les secteurs d'activité où l'humain est prépondérant : éducation, religion, vie citoyenne, culturelle.

C'est que les territoires perdus de la République ne se limitent pas à la surface et aux immeubles rénovés au sein de leurs périmètre urbain. Les terres laissées en friche sont aussi de nature intellectuelles, artistiques, spirituelles, civiques, relationnelles.

La "mal-mondialisation", celle des réseaux sociaux, des sites Internet djihadistes, des chaînes de télévisions  à vocation religieuse diffusées par satellite, s'est chargée de les conquérir.

Même la nature humaine a horreur du vide.

* les chiffres lancés au cours des débats télévisés vont de 25 à 50% de taux de chômage des jeunes.

Plume Solidaire

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 

Source : omma.com

Amères leçons d’un crime terroriste

Par Bruno Guigue | le 13. janvier 2015 - 8:11

Car la criminalité terroriste de ces ex-délinquants n’est pas une délinquance au carré, mais l’expression dévastatrice d’une violence idéologique, celle qui voue les « kouffars » et autres « mécréants » à l’exécration des prétendus « vrais musulmans ».

Bruno Guigue

Normalien, énarque, aujourd'hui professeur de philosophie, auteur de plusieurs ouvrages, dont "Aux origines du conflit israélo-arabe, l'invisible remords de l'Occident (L'Harmattan, 2002)

(...)

Comme toute manifestation d’unanimisme, celle qui s’est déroulée le 11 janvier 2015,  toutefois, a son revers de la médaille. A son insu, elle a jeté un voile pudique sur de multiples non-dits. Passé le moment exaltant d’une communion quasi-universelle, on voit bien que le monde est tel qu’il était auparavant, qu’il n’a pas changé d’un iota. Des millions de manifestants ont exprimé avec dignité leur rejet de la terreur, mais ce n’est pas leur faire injure de dire que ce rejet ne résout rien. « Rien ne sera plus jamais comme avant », ont dit certains commentateurs optimistes. Il faut l’espérer, mais en est-on si sûr ?

Pour que rien ne fût comme avant, il faudrait d’abord tirer les leçons de l’événement,  en analyser les circonstances, identifier la chaîne des responsabilités qui y ont conduit. Or qu’en est-il ? Sans nul doute, la radicalisation d’un petit groupe d’individus se réclamant d’une idéologie sectaire et suicidaire est le premier chaînon de cette chaîne. Les trois auteurs des assassinats en assument la responsabilité personnelle, et aucune excuse absolutoire ne saurait les en dispenser. Coupables du crime commis, ils l’ont d’ailleurs payé de leur vie, ce qu’on peut évidemment regretter, tant il est vrai que vivants ils eussent contribué à faire la part des autres responsabilités.

Ces individus, loin d’être des « loups solitaires », n’ont pas agi seuls. Et surtout, ils n’ont pas conçu dans la solitude de leur repaire la nécessité politique d’une telle violence, ils n’ont pas inventé la justification idéologique nécessaire au passage à l’acte. Soldats perdus du jihad planétaire de seconde génération,  ils furent les exécutants d’une opération-suicide dont le modèle, sinon l’ordre, est venu d’en haut. Car la criminalité terroriste de ces ex-délinquants n’est pas une délinquance au carré, mais l’expression dévastatrice d’une violence idéologique, celle qui voue les « kouffars » et autres « mécréants » à l’exécration des prétendus « vrais musulmans ».

C’est pourquoi le deuxième chaînon de la chaîne des responsabilités qui ont mené au crime, c’est bien cette idéologie née au Moyen-Orient arabe à la fin du 18ème siècle, savamment distillée par les prédicateurs wahhabites, dont le jihadisme d’Al-Qaida et de « Daech » est l’ultime avatar. Radicalisée à l’extrême pour justifier le jihad global, cette doctrine morbide apporte à l’entreprise terroriste une caution prétendument religieuse. Elle nimbe abusivement de sacré une subversion violente des sociétés dont les coutumes n’ont pas la chance de correspondre à l’idée que les sectateurs du jihad se font de l’islam.

Si cette idéologie sectaire est l’affaire du monde musulman, il est clair que le monde musulman, dans son ensemble, n’en est pas responsable. Pourquoi le croyant de Tunis ou de Karachi, de Damas ou d’Aubervilliers devrait-il se battre la coulpe à propos d’une idéologie qui n’est pas la sienne ? C’est pourquoi la sommation faite aux musulmans, en tant que tels, de dénoncer le terrorisme jihadiste n’a pas de sens, même s’il est vrai que, le wahhabisme et ses rejetons faisant partie de l’islam, il appartient aux musulmans d’en combattre l’influence.

Problème du monde musulman, l’idéologie sectaire du jihad global ne cessera d’exercer ses méfaits que lorsqu’on lui aura appliqué une solution musulmane. Mais ce combat ne date pas d’hier. Adversaire résolu de la monarchie saoudienne dans les années 1960-70, le raïs égyptien Gamal Abdel Nasser a chèrement payé son désir de moderniser les sociétés arabo-musulmanes. Est-ce un hasard si les régimes nationalistes arabes égyptien, irakien et syrien, respectueux de l’islam mais non confessionnels, ont été systématiquement combattus par l’Occident allié à Israël, avec la complicité des pétromonarchies obscurantistes ? 

Pire encore : quelle est, aujourd’hui, la crédibilité de ces dirigeants occidentaux qui n’ont cessé, à la suite de l’administration américaine, de pactiser avec le diable ? Laurent Fabius n’a-t-il pas déclaré en décembre 2012 que le Front Al-Nosra faisait du « bon boulot » en Syrie ? (Voir « La farce tragique de l’Etat islamique »). C’est pourquoi le plus ahurissant, lors de la manifestation du 11 janvier, ce fut la feinte candeur des dirigeants français, comme si le crime revendiqué par Ahmed Coulibaly au nom de « Daech » n’avait aucun rapport avec les errements de la politique française au Proche-Orient.  

Et pourtant, la diabolisation insensée du régime de Damas, les livraisons d’armes à la rébellion, la complicité éhontée avec des pétromonarchies qui en sont les bailleurs de fonds notoires : autant d’aberrations qui ont exposé le peuple français à la vengeance sanguinaire des jihadistes. La France est passée en quelques jours, au cours de l’été 2014, des livraisons d’armes en faveur de la guérilla antigouvernementale en Syrie au bombardement aérien des groupes jihadistes en Irak : comment ces derniers n’auraient-ils pas été furieux de ce revirement incompréhensible ?

Naviguant à vue, influencé par des conseillers à l’incompétence crasse et des experts ayant perdu toute objectivité, François Hollande a mené en Syrie, à la suite de Nicolas Sarkozy, une politique interventionniste dont nous payons aujourd’hui la stupidité criminelle. Contraire aux intérêts de la France, cette prise de parti dans une guerre civile étrangère nous est revenue à la figure comme un boomerang. L’obstination maladive à vouloir abattre le régime syrien, par tous les moyens, a accouché d’un monstre, le prétendu « Etat islamique », qui est le rejeton abâtardi des politiques française, américaine, saoudienne et qatarie.

 Parce qu’ils prétendent combattre aujourd’hui à Paris des terroristes qu’ils soutenaient hier à Damas, les dirigeants de la France ont cru se refaire une virginité en se mêlant à la foule immense de ceux qui ont clamé, sur le pavé de nos villes, leur refus de la haine. Rivalisant en proclamations grandiloquentes, ils ont étalé leur autosatisfaction devant les caméras, comme si cette victoire massive du bon sens était la leur, le tout, comble du grotesque, en compagnie des tortionnaires de la Palestine. Peine perdue : dans la chaîne des responsabilités qui ont conduit au crime terroriste du 7 janvier, c’est hélas l’incroyable cynisme des dirigeants français qui constitue le troisième chaînon.

Une miniature célèbre représentant Muhammad et les traits de son visage, extraite de l’ouvrage d’al-Bîrûnî, al-Âthâr al-bâqiya, Iran, XVIe siècle (Paris, BnF, Manuscrits orientaux, Arabe 1489, fol. 5v). Cette image est celle que l’éditeur Belin avait choisi de flouter dans l’un de ses manuels d’histoire destiné aux classes de 5e, en 2005

Une miniature célèbre représentant Muhammad et les traits de son visage, extraite de l’ouvrage d’al-Bîrûnî, al-Âthâr al-bâqiya, Iran, XVIe siècle (Paris, BnF, Manuscrits orientaux, Arabe 1489, fol. 5v). Cette image est celle que l’éditeur Belin avait choisi de flouter dans l’un de ses manuels d’histoire destiné aux classes de 5e, en 2005

Image de l'Institut Français du Proche-Orient

Dans son article Amères leçons d’un crime terroriste, Bruno Guigue met en lumière trois maillons principaux dans la chaînes des responsabilités des attentats du 7 janvier.

Dans le même sens, je me souviens qu'au cours de la dernière campagne pour l'élection présidentielle, seuls les candidats des petits partis avaient répondu à mon interpellation concernant l'enseignement de la lecture et de l'écriture du français aux immigrés et aux étrangers dans leur programme. Les grands partis m'avaient boudé.

L'illettrisme et les carences de l'organisation de la formation professionnelle en France, dont l'effarant gaspillage a été à relevé par Jacques Attali comme l'un des chantiers prioritaires des réformes de l'Etat à engager, sont deux outils qui auraient du, et devraient toujours être à mon sens, privilégiés, comme outils indispensables pour une intégration sans heurt des étrangers salariés ou non.

On sait aujourd'hui qu'une proportion considérable de jeunes qui résident dans les banlieues est sans emploi*. Dans une récente enquête, j'ai lu que le taux ce chômage des salariés étrangers non européens est deux fois supérieurs (autour de 20%) à celui des français et des salariés qui sont ressortissants de l'Union Europénne. Et, si je connais comme tout un chacun quelques personnes, proches ou lointaines, blanches de couleur de peau, brunes, jaunes, noires ou vertes, qui s'échinent à mettre en oeuvre des stratégies de refus d'insertion ou de retour dans le monde de l'emploi salarié, force est de constater que la plupart, de France, de Navarre et d'ailleurs, travaillent, ou souffrent de ne pas travailler assez ou pas du tout.

Sensibilisé à la politique de la ville pour en avoir exercé la mise en oeuvre dans mon domaine de compétence dans une ville emblématique par l'importance et le nombre des ethnies qui y sont installées, je prends note avec consternation, tant j'étais convaincu qu'elle n'était plus que l'ombre de ses ambitions initiales, d'un certain renouveau de l'intérêt pour les enjeux qu'elle représente depuis les évènements du 7 janvier. Si l'énorme chantier de rénovation des banlieues était une impérieuse nécessité, nos politiques semblent se rendre compte aujourd'hui, contrairement à un vieil adage en matière économique que "quand le bâtiment va, tout" ...ne va pas nécessairement bien. 

En particulier dans les secteurs d'activité où l'humain est prépondérant : éducation, religion, vie citoyenne, culturelle.

C'est que les territoires perdus de la République ne se limitent pas à la surface et aux immeubles rénovés au sein de leurs périmètre urbain. Les terres laissées en friche sont aussi de nature intellectuelles, artistiques, spirituelles, civiques, relationnelles.

La "mal-mondialisation", celle des réseaux sociaux, des sites Internet djihadistes, des chaînes de télévisions  à vocation religieuse diffusées par satellite, s'est chargée de les conquérir.

Même la nature humaine a horreur du vide.

* les chiffres lancés au cours des débats télévisés vont de 25 à 50% de taux de chômage des jeunes.

Plume Solidaire

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Source : omma.com

Amères leçons d’un crime terroriste

Par Bruno Guigue | le 13. janvier 2015 - 8:11

Car la criminalité terroriste de ces ex-délinquants n’est pas une délinquance au carré, mais l’expression dévastatrice d’une violence idéologique, celle qui voue les « kouffars » et autres « mécréants » à l’exécration des prétendus « vrais musulmans ».

Bruno Guigue

Normalien, énarque, aujourd'hui professeur de philosophie, auteur de plusieurs ouvrages, dont "Aux origines du conflit israélo-arabe, l'invisible remords de l'Occident (L'Harmattan, 2002)

(...)

Comme toute manifestation d’unanimisme, celle qui s’est déroulée le 11 janvier 2015,  toutefois, a son revers de la médaille. A son insu, elle a jeté un voile pudique sur de multiples non-dits. Passé le moment exaltant d’une communion quasi-universelle, on voit bien que le monde est tel qu’il était auparavant, qu’il n’a pas changé d’un iota. Des millions de manifestants ont exprimé avec dignité leur rejet de la terreur, mais ce n’est pas leur faire injure de dire que ce rejet ne résout rien. « Rien ne sera plus jamais comme avant », ont dit certains commentateurs optimistes. Il faut l’espérer, mais en est-on si sûr ?

Pour que rien ne fût comme avant, il faudrait d’abord tirer les leçons de l’événement,  en analyser les circonstances, identifier la chaîne des responsabilités qui y ont conduit. Or qu’en est-il ? Sans nul doute, la radicalisation d’un petit groupe d’individus se réclamant d’une idéologie sectaire et suicidaire est le premier chaînon de cette chaîne. Les trois auteurs des assassinats en assument la responsabilité personnelle, et aucune excuse absolutoire ne saurait les en dispenser. Coupables du crime commis, ils l’ont d’ailleurs payé de leur vie, ce qu’on peut évidemment regretter, tant il est vrai que vivants ils eussent contribué à faire la part des autres responsabilités.

Ces individus, loin d’être des « loups solitaires », n’ont pas agi seuls. Et surtout, ils n’ont pas conçu dans la solitude de leur repaire la nécessité politique d’une telle violence, ils n’ont pas inventé la justification idéologique nécessaire au passage à l’acte. Soldats perdus du jihad planétaire de seconde génération,  ils furent les exécutants d’une opération-suicide dont le modèle, sinon l’ordre, est venu d’en haut. Car la criminalité terroriste de ces ex-délinquants n’est pas une délinquance au carré, mais l’expression dévastatrice d’une violence idéologique, celle qui voue les « kouffars » et autres « mécréants » à l’exécration des prétendus « vrais musulmans ».

C’est pourquoi le deuxième chaînon de la chaîne des responsabilités qui ont mené au crime, c’est bien cette idéologie née au Moyen-Orient arabe à la fin du 18ème siècle, savamment distillée par les prédicateurs wahhabites, dont le jihadisme d’Al-Qaida et de « Daech » est l’ultime avatar. Radicalisée à l’extrême pour justifier le jihad global, cette doctrine morbide apporte à l’entreprise terroriste une caution prétendument religieuse. Elle nimbe abusivement de sacré une subversion violente des sociétés dont les coutumes n’ont pas la chance de correspondre à l’idée que les sectateurs du jihad se font de l’islam.

Si cette idéologie sectaire est l’affaire du monde musulman, il est clair que le monde musulman, dans son ensemble, n’en est pas responsable. Pourquoi le croyant de Tunis ou de Karachi, de Damas ou d’Aubervilliers devrait-il se battre la coulpe à propos d’une idéologie qui n’est pas la sienne ? C’est pourquoi la sommation faite aux musulmans, en tant que tels, de dénoncer le terrorisme jihadiste n’a pas de sens, même s’il est vrai que, le wahhabisme et ses rejetons faisant partie de l’islam, il appartient aux musulmans d’en combattre l’influence.

Problème du monde musulman, l’idéologie sectaire du jihad global ne cessera d’exercer ses méfaits que lorsqu’on lui aura appliqué une solution musulmane. Mais ce combat ne date pas d’hier. Adversaire résolu de la monarchie saoudienne dans les années 1960-70, le raïs égyptien Gamal Abdel Nasser a chèrement payé son désir de moderniser les sociétés arabo-musulmanes. Est-ce un hasard si les régimes nationalistes arabes égyptien, irakien et syrien, respectueux de l’islam mais non confessionnels, ont été systématiquement combattus par l’Occident allié à Israël, avec la complicité des pétromonarchies obscurantistes ? 

Pire encore : quelle est, aujourd’hui, la crédibilité de ces dirigeants occidentaux qui n’ont cessé, à la suite de l’administration américaine, de pactiser avec le diable ? Laurent Fabius n’a-t-il pas déclaré en décembre 2012 que le Front Al-Nosra faisait du « bon boulot » en Syrie ? (Voir « La farce tragique de l’Etat islamique »). C’est pourquoi le plus ahurissant, lors de la manifestation du 11 janvier, ce fut la feinte candeur des dirigeants français, comme si le crime revendiqué par Ahmed Coulibaly au nom de « Daech » n’avait aucun rapport avec les errements de la politique française au Proche-Orient.  

Et pourtant, la diabolisation insensée du régime de Damas, les livraisons d’armes à la rébellion, la complicité éhontée avec des pétromonarchies qui en sont les bailleurs de fonds notoires : autant d’aberrations qui ont exposé le peuple français à la vengeance sanguinaire des jihadistes. La France est passée en quelques jours, au cours de l’été 2014, des livraisons d’armes en faveur de la guérilla antigouvernementale en Syrie au bombardement aérien des groupes jihadistes en Irak : comment ces derniers n’auraient-ils pas été furieux de ce revirement incompréhensible ?

Naviguant à vue, influencé par des conseillers à l’incompétence crasse et des experts ayant perdu toute objectivité, François Hollande a mené en Syrie, à la suite de Nicolas Sarkozy, une politique interventionniste dont nous payons aujourd’hui la stupidité criminelle. Contraire aux intérêts de la France, cette prise de parti dans une guerre civile étrangère nous est revenue à la figure comme un boomerang. L’obstination maladive à vouloir abattre le régime syrien, par tous les moyens, a accouché d’un monstre, le prétendu « Etat islamique », qui est le rejeton abâtardi des politiques française, américaine, saoudienne et qatarie.

 Parce qu’ils prétendent combattre aujourd’hui à Paris des terroristes qu’ils soutenaient hier à Damas, les dirigeants de la France ont cru se refaire une virginité en se mêlant à la foule immense de ceux qui ont clamé, sur le pavé de nos villes, leur refus de la haine. Rivalisant en proclamations grandiloquentes, ils ont étalé leur autosatisfaction devant les caméras, comme si cette victoire massive du bon sens était la leur, le tout, comble du grotesque, en compagnie des tortionnaires de la Palestine. Peine perdue : dans la chaîne des responsabilités qui ont conduit au crime terroriste du 7 janvier, c’est hélas l’incroyable cynisme des dirigeants français qui constitue le troisième chaînon.


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