25 janvier 2015. Véronique Sanson – Le Maudit (1974) Vous allez certainement bondir d'affliction, mais il faut que vous sachiez que j'aime sincèrement Véronique Sanson et particulièrement ses premiers disques que je place assez haut dans mon petit panthéon musical. Ainsi ce Maudit enregistré en 1974. C'est son premier disque « américain », son premier sans Michel Berger, son premier après cette rupture incongrue que l'on ne saurait ignorer (je suis assez midinette). Une Sanson qui semble un peu chanter à côté d'une petite armée de musicien west-coast ultra compétent. Étonnamment c’est ce léger décalage qui fait beaucoup pour le charme du disque, ce qui pourrait sembler comme plaqué, Sanson vient d'ailleurs, de la « musique classique », de Barbara et de la « chanson française » fonctionne merveilleusement, il y dichotomie et alchimie, c'est un tour de force. (Quant à la relation Berger/Sanson c'est presque du Sirk/McCarey.)
26 janvier 2015. D'aucuns me trouveront un tantinet snob, mais je dois avouer un certain goût pour la littérature hongroise et le post-punk japonais. Pour ce qui est de la littérature hongroise, il faut lire Dezsö Kosztolanyi, pour ce qui est du post-punk japonais il faut écouter Aunt Sally. Je ne sais pas s'il est recommandé de lire l'un en écoutant l'autre, mais c'est ce que j'ai fait, en sautillant un peu. Paul Simon – There Goes Rhymin (1973) Le second album de Paul Simon en partie enregistré dans les studios de Muscle Shoals. Une collection de chansons optimistes, une berceuse, une déclaration d'amour filiale, un peu de mièvrerie, mais juste ce qu'il faut pour ne pas entraîner l'auditeur vers les glutineux rivages du coma diabétique.
27 janvier 2015. Elvis Costello – Get Happy (1980) L'une des meilleures productions de Declan le fielleux. Un disque qu'il faut savoir apprivoiser tant il peut paraître hermétique de prime abord. Costello n'y a presque plus la voix de roquet arrogant qu'il avait dans ses trois formidables premiers disques, il semble un peu ailleurs, un peu monolithique, presque désabusé et asthénique. Il faut tendre l'oreille pour percevoir les quelques infimes variations de sa voix, un demi-ton par ci, une intonation un peu différente par là. Évidemment, Costello noie le poisson et ce que nous percevons comme monocorde n'est en fait que la manifestation d'une toute nouvelle subtilité. Plus de subtilité pour moins d'arrogance. Les compositions sont à l'identique, apparemment monochromes (un digest de ce qui c'est fait de mieux entre 1955 et 1968), mais finalement bien plus colorées qu'il n'y paraît (on parlera de finesse de touche). Des riffs basiques, des nappes d'orgues en autarcie et des histoires intimes, terriblement intimes. Écoutez New Amsterdam, l'un des incontestables highlights de Costello. 28 janvier 2015. Howlin» Wolf, un vrai musicien, un « professionnel ». Un « proud to be black » avant l’heure légale, une bête de scène et un isthme sexuel à lui tout seul. Son importance est considérable. Il est l’invité des Rolling Stones quand ceux-ci passent à TV américaine (Shindig, 1965). On ne voit que lui, les « vedettes anglaises » sont assises à ses pieds comme des petits enfants oubliés à la crèche, la séquence est formidable. Danny Whitten était le premier guitariste de Crazy Horses un type tellement saisi par les problèmes d’héroïne que Neil Young le virera un soir de 1972. Tragique coïncidence Whitten trépassera le soir même d'une surdose hasardeuse de Valium et de vodka. Young restera un brin traumatisé par cette histoire et lui dédiera son album le plus sombre Tonight the Night (1975). I' dont Walk to talk about est la plus belle chose laissée par Whitten, une ballade des cœurs brisés qui sera popularisée dans la guimauve par Rod Stewart mais qui ici chantée par son auteur prend des airs aussi déchirants que les plus déchirantes plaintes de Gene Clark.29 janvier 2015 Jack Teagarden – Think Well (1962) L'un des derniers enregistrements du grand Jack Teagarden. Une merveille avec cette voix qui déraille dans le velouté, cet inimitable accent texan et ces cordes empourprées. Écoutez Dont smoke in Bed, indépassable. Deux trois choses piochées au hasard de mes pérégrinations virtuelles : Colin Blunstone chante Say You Mind une chanson de Denny Laine. Voix fabuleuse. La très jeune Cat Power derrière sa guitare triangulaire chante sa plus belle chanson, on a envie de la prendre dans ses bras. Rickie Lee Jones et son fameux béret rouge. Carole King pieds nus, de l'or dans les rideaux, un chat dubitatif et un mètre étalon adult rock. Cliff Edwards et son Ukulele fatal, Richard Manuel dans une version alternative de Whispering Pines qui pourrait faire fondre le premier bloc de marbre monolithique qui passe (j'en pleure encore). 30 janvier 2015. Acetone – Acetone (1997) Quatrième album d'Acetone. Certainement le moins bon. La musique semble s'y évaporer dans l’éther tandis que le groupe s'enfonce dans un puits de tristesse sans fond. D'Acetone il faut préféré les albums Cindy (1993) et If You Only Knew (1996) deux merveilles pêchées dans l’océan du troisième Velvet. Il faut aussi ne pas oublier Richie Lee chanteur timide suicidé au champs d'honneur. Ned Doheny – Ned Doheny (1973) Ned Doheny est surtout connu pour son album de 1976 Hard Candy, l'un des sommets les moins arpentés du son west-coast seventies. Son premier album celui de 1974 (sans titre) est pourtant presque meilleur, moins remuant, encore plus proche de l'esprit de Laurel Canyon et pour tout dire assez formidable. C'est le disque que j'ai le plus écouté depuis un an. Il ne cesse de me ravir et je commence à placer très haut l’enchaînement de quatre ballades qui le conclut (Postcards From Hollywood, Take Me Far Away, It Calls For You, Standfast). Si vous voulez plus d'information sur Ned Doheny il y a un article assez exhaustif consultable à cette adresse là. 31 janvier 2015. The Sneetches – Slow (1991) Le hasard faisant bien les choses je suis retombé sur ce disque qui ne paye pas de mine avec une pointe de satisfaction amusée. Rien de transcendant, pas d'âme en déroute, aucun « travail sur les textures sonores », mais un climat apaisé et des chansons. C’est déjà beaucoup et c'est parfois amplement suffisant.