Centenaire – Somewhere Safe LP

Comme son nom l’indique involontairement, Centenaire est un groupe avec de la bouteille. Et de la bonne en plus, millesimée et rare. En effet, rôdés à la belle musique depuis leurs premières dégustations, ses trois membres parcourent depuis le début des années 2000 l’underground boisé parisien au sein de diverses formations, et fournissent depuis maintenant un certain temps le domaine familial Clapping Music (avec Domotic, Egyptology, My Jazzy Child…). Finissons d’introduire cet article avec une dernière et poussive métaphore œnologique : il est évident qu’un très bon cru s’apprécie toujours dans la durée. Et c’est un peu pour cela que le Limonadier décide de vous parler aujourd’hui du troisième album de Centenaire, ”Somehere Safe”, sorti en novembre dernier. Sans être tout à fait “hors actualité” non plus puisque le groupe vient de mettre en ligne un premier clip et continue de promouvoir l’album en tournée.

Formé en 2006, Centenaire ne s’est depuis jamais arrêté d’évoluer. Des chansons folk expérimentales du premier album à la pop tendue, mais à la peau douce, du deuxième, le groupe a toujours réalisé une musique très progressive, mais qui revient aujourd’hui beaucoup plus rock et abrasive. La pop et les mélodies sont toujours là, mais au cœur d’un tumulte parfois dissonant, légèrement noise.

Comme vous l’avez peut être déjà moyennement compris, le “temps” est une notion chère au groupe. Permettons-nous donc d’en prendre un peu avec une pause photographique très certainement hors-sujet. Voici un cliché issu du kit promo envoyé par le label. On peut y voir ces messieurs, un midi comme tant d’autres, déjeuner pépère en terrasse. Ce que nous voulons absolument vous démontrer ici, c’est que Centenaire , c’est tout d’abord et avant tout des gens simples, de bon sens et bon goût, pour qui “pose rock” peut s’envisager occasionnellement comme l’équivalent de “gratin dauphinois maison”.

Preuve de cette approche rationnelle de leur passion, voici ci-après le “rider” – c’est-à-dire la feuille technique destinée aux futurs lieux qui les accueilleront – qu’ils ont récemment envoyée à une salle de concert :

- stroboscope à fond la première minute puis fumée dans le noir absolu pendant les 44 suivantes

- On sera que 3 finalement, donc 3 repas, pas de végétariens ! si y a de la weed on est preneurs.

Stroboscope, machine à fumée, weed. Ces gens ont donc tout compris. Avis aux professionnels.

On reste en famille et on ne se prend toujours autant pas la tronche dans leur premier clip, illustrant le morceau “Where to go”. Le groupe nous invite dans le salon d’une maison pavillonnaire un peu hors du temps, et nous montre une petite répétition, mise en scène au sein d’un quotidien autant confortable que psychédélique.

On les laisse s’installer, voila, tout est branché, le groupe peut commencer à jouer. Le charme passéiste du grain VHS et la belle montée mélodique font le boulot, on se sent bien.

Comme la VIE, “Somehere Safe” est un album dense, qui peut s’avérer parfois compliqué. Les instruments, bien identifiables grâce à un son brut et chaud, nous claquent parfois à la gueule en partant en vrille à la frontière du jazz. Le groupe y propose une sorte de krautrock décontracté dont la batterie semble monter indéfiniment une montagne sans sommet, procédant par palier en arrivant sur de grandes plaines balayées par des rafales de fuzz, où résonnent encore des sonorités presque multi-culturelles.

Mais ces morceaux contiennent également de vrai beaux moments pop, souvent portés par le chant (en anglais). Ces véritables poussées mélodiques nous ramènent à nos plus beaux souvenirs de plaisirs musicaux, de ceux qui nous faisaient parfois exploser dans un cri chuchoté, pyjama et poing tendu vers le plafond de notre chambre d’adolescent.

Cela n’est certes pas très original, mais il est important de mentionner que le disque s’apprécie réellement sur la longueur. Sa matière bouillonnante et parfois grumeleuse se sculpte et se précise au fil des écoutes, qui nous révèlent peu à peu la beauté de ces compositions.

Concluons en musique en écoutant le long morceau au long titre “ The Truth About Those Who Pretend To Be Your Friends”, qui résume un peu tout ce qui est écrit ci-dessus, mais en musique, et, avouons le, c’est tout a fait normal.

Pour des informations moins parcellaires et bizarrement plus objectives, rendez-vous sur le site du label Clapping Music.

Pour commander le disque c’est (par) izi.

Le groupe sera en concert le vendredi 6 février 2015 à Tour, au Temps Machine et le dimanche 8 mars 2015 au festival Les Embellies de Rennes.