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On y était : Limbo Festival

Publié le 06 février 2015 par Hartzine
White Fence@LIMBO Fest 17_Cle╠ümence BIGEL Photos © Clémence Bigel Limbo Festival, du 23 au 27 janvier (Mécanique Ondulatoire, Point Éphémère & La Maroquinerie) On y était le 25 janvier, un dimanche qui plus est, le soir parfait pour s’abandonner gentiment et se saboter doucement pour oublier cette âpre sensation… celle qui vous gagne en journée et que vous cherchez insidieusement à dépasser. Et bien c’était fait en allant voir les grands garçons de White Fence et Baston. Baston! Ce nom! Mais Y a personne qui y répond !. Un nom direct et franc qui augure de bons moments d’actions mais la musique n’était pas à la hauteur de ses prétentions. Du garage pop tropical comme l’indique le carton d’invitation mais aussi tropical que je ne suis orientale. C’est d’ailleurs souvent ainsi, les titres et les dénominations sont alléchantes, et t’invitent à t’immerger sans modération puis vient le temps de la déception et de la persécution. On est capillo-tracté de tous les côtés bon sang de bon sang. Ça sent la baston ! Puis on s’indigne et on redescend ! Les rennais de Howlin banana records, sont sympathiques et plutôt entraînants ce qui, pourtant, ne suffit absolument pas à effacer de son expression ces petits tics d’énervement, signes d’inassouvissement. Le temps s’est rapidement écoulé puisqu’ils ont joué dans l’urgence : parfait dans ces moments. Les White Fence sont arrivés ou plutôt le projet du petit génie Tim Presley comme l’avait gentiment annoncé le chanteur de Baston. Nous nous frayions alors laborieusement un chemin afin d’entrer dans la fosse, de s’immerger davantage, de retrouver la rage, en se dodelinant timidement avec des sourires contrits pour gagner un micro bout de terrain dans cette foule compacte et intacte. Arrivaient ensuite les quatres chantres du style nonchalant/évanescent, Tim Presley et son archer, Cate Le Bon et son pantalon de survêt, et Dan Lead au port altier et le batteur Nick Murray. Tout était immaculé…. Les trois premiers titres issus du dernier album « For the Recently Found Innocent » , sorti en juillet 2014, annonçaient l’orientation délibérément néo psyché dans l’évolution du projet. En dépit du manque manifeste d’inventivité, il demeurait cette grâce, certes un peu fadasse, en comparaison des maitres à chanter que Presley invoquait, Syd Barrett (« Sandra (When The Earth Dies) »), et des maitres à jouer ( 13th Floor Elevators dans l’introduction de « Anger ! Who Keeps You Under ? »), ou encore Quicksilver dans l’intro également de «Wolf Gets Red Faced » pour ne citer que mes préférés. La liste est longue cependant de sons empruntés. Puis est arrivé le moment incandescent….sur le titre « Baxter Corner » issu d’un précédent album (« White Fence is Growing Faith » 2011). L’accélération du rythme s’est aussitôt faite sentir, le chant s’est rapidement éclipsé au profit d’une longue phase instrumentale d’une bonne dizaine de minutes, tout en progression. Le rythme était lancinant, entêtant, les distorsions jaillissaient de tous côtés, les échos nous hantaient, on retrouvait la fièvre du garage, les pulsations hypnotiques, les réactions psychotiques, tous les éléments des parties étaient enfin réunis pour nous faire véritablement décoller, pour nous faire replonger dans le passé barbiturique. La foule inflexible s’est mise à onduler, mes compagnons de soirée, dispersés aux quatre coins de la salle, se sont aussitôt rassemblés et l’unité s’est enfin réalisée. C’était un moment de communion réellement partagé avec l’ensemble de l’assistance. Et là ! Ce fut le point culminant, j’eus une vision ! Je levai les yeux au plafond et vis la croix ensanglantée ! La structure cruciforme du plafond peint en rouge de la maroquinerie était jonchée de taches d’humidité, d’alcool, de fluides mélangés, et d’expectorations et donnaient l’impression que les parois se mettaient à saigner. C’était le bon sang du bon dieu ! En retournant à la Maroquinerie quelques jours après pour assister au concert de Père Ubu, je me surprenais à jeter des regards de dévotion au plafond…. Un couple de russes au look Glam prononcé s’enthousiasmaient sans modération devant moi, je ne comprenais que le terme Kraaah oooot rock qui revenaient 2 ou 3 fois dans la conversation. Mais j’avais envie de leur dire qu’ils avaient bien raison. Ce fut un très beau moment fédérateur autour du son, comme on en assiste rarement. Nous sommes sortis de là, dégoulinants, tels de pauvres chiffons suintants sortis de la machine à laver. De tels moments d’ébriété sont si rares finalement, en ces temps musicaux désincarnés, qu’on exagérerait bien volontiers la description de toutes ces sensations combinées. Alors sur-jouons l’exacerbation, intensifions nos moments, décuplons nos descriptions. Il en va de notre besoin vital de sensations! Une fois ce moment passé, tout est redevenu pâle et édulcoré alors que nous rêvions juste de nous lover encore un moment dans le son. C’était dur de revenir à la réalité. Nous espérions, à chaque titre suivant, un nouveau départ tonitruant, un riff prodigieux, augurant de nouvelles envolées proprement psychédéliques. Mais il fallait s’assagir et apprécier dignement la frustration. En effet, s’il faut faire jaillir la beauté, s’il faut l’extraire de la médiocrité, il faut savoir la valoriser. Si tout n’était que qualité, serions-nous alors capables de l’apprécier à son injuste valeur ? Ne vaut-t-il mieux pas sélectionner scrupuleusement ce que l’on souhaite sublimer ? Il m’arrive, de me réjouir à l’avance du morceau prodigieux à venir, alors que celui même que je suis en train d’écouter, dans le même album, ne comporte que peu d’intérêt. Le titre raté crée une attente, une excitation propre à susciter les plus belles émotions ultérieurement. Mais le mieux étant peut être de garder le meilleur pour la fin … Au fur et à mesure que les titres s’enchainaient, les White Fence perdaient des points. On ne reprochera rien au batteur Nick Murray (aussi batteur des Young Veins, Thee Oh Sees ou encore Cate Le Bon) qui aurait souhaité ardemment pouvoir faire décoller les morceaux de leur morne environnement. Il avait cette propension à vouloir tout dépoussiérer, sa fougue nous entraînait, mais cela ne suffisait pas à raviver les couleurs de leur palette compassée. En revanche, on finissait par apprécier leur distinction, leur pâle présence, leur charme discret, incarnés par un chanteur dans la lignée des dandys anglais, et une Cate le Bon diablement sexy, toute de blanc vêtue, à la Bryan Ferry. Elle portait un ensemble 80’s pantalon cigarette et pull blanc dévoilant des seins pointus et engageants, mis en valeur par la saillie de la sangle de sa guitare, et adoptait une pose rock de garçon manqué Quoi de mieux pour faire frémir les garçons sensibles de l’assemblée. Élégant de but en blanc. Sonia Terhzaz Photos © Clémence Bigel

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