Magazine Culture

La vie devant soi d’Émile Ajar

Publié le 31 janvier 2015 par Alexis Louet

Madame Rosa, qui a connu Auschwitz, et qui, autrefois, se défendait avec son cul (selon le terme utilisé par Momo pour signifier prostitution) rue Blondel à Paris, a ouvert " une pension sans famille pour les gosses qui sont nés de travers ", autrement dit une pension clandestine où les femmes qui se défendent avec leur cul laissent leurs rejetons pendant quelques mois pour les protéger (de l'Assistance Publique ou des représailles de " proxynètes "). Momo, jeune musulman d'une dizaine d'années, raconte son amour pour Madame Rosa et son amour pour la seule " mère " qui lui reste, cette ancienne prostituée, devenue grosse et laide et qu'il aime de tout son cœur. Le jeune homme accompagnera la femme jusqu'à la fin de sa vie.

MA NOTE FINALE : 18/20

SCÉNARIO ET PERSONNAGES : 5/5 ÉCRITURE : 5/5 ORIGINALITÉ : 5/5 LE LIVRE EST-IL ADDICTIF ? 3/5

Une claque de franchise. Oui, une claque de franchise, de réalisme.

Je me suis énormément attaché à Momo, ce petit gamin de 10 ans puis d'un seul coup 14. J'ai aimé, même adoré, ce ton de légèreté, de naïveté, d'insolence, de questionnement. La force de l'écriture, du personnage, est de ne pas réellement saisir le sens des mots, mais pourtant tout ça nous résume le sens de la vie, tant ces mots innocents sont d'une incroyable justesse, comme si l'auteur avait voulu rendre une sorte de spontanéité de l'enfance.

Parmi ce florilèges d'expressions tordues, inventées, on en retrouve avec plaisir certaines répétées tout au long de l'œuvre, comme se " défendre avec son cul ", le " proxynète " à la place de proxénète, ou encore le " à mon honneur ". Ces expressions font réfléchir, m'ont parfois même touché par leur sincérité et leur vérité.

Et le plaisir de lire ce livre n'en ait que plus accru par le réalisme fort de l'histoire, son aspect vrai, documenté, par la présence d'une certaine tendresse, l'humanité de ses personnages, sa diversité (juifs, musulmans, noirs, jeunes, personnes âgées, travestisme) ...

En résumé, j'ai réellement accroché à cette histoire d'une spectaculaire vérité, tant par son rapport à la vie et à la mort, par ses personnages et par son écriture.

QUELQUES CITATIONS :

" Elle était si triste qu'on ne voyait même pas qu'elle était moche. "

" Elle disait qu'en France on était contre la mort douce et qu'on vous forçait à vivre tant que vous étiez encore capable d'en baver. "

" Moi, l'héroïne, je crache dessus. Les mômes qui se piquent deviennent tous habitués au bonheur et ça ne pardonne pas, vu que le bonheur est connu pour ses états de manque. "

" Monsieur Hamil dit que l'humanité n'est qu'une virgule dans le grand Livre de la vie et quand un vieil homme dit une connerie pareille, je ne vois pas ce que je peux y ajouter. L'humanité n'est pas une virgule parce que quand madame Rosa me regarde avec ses yeux juifs, elle n'est pas une virgule, c'est même plutôt le grand Livre de la vie tout entier, et je veux pas le voir. "


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Alexis Louet 39 partages Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossier Paperblog

Magazines