Sony Congo ou la chouette petite vie osée de Sony Labou Tansi

Il y a du monde ce soir pour la première représentation de la pièce de théâtre de Bernard Magnier revisitant la vie de l’homme de lettres congolais Sony Labou Tansi; une pièce adaptée par Hassane Kassi Kouyaté.  Il y a du beau monde, une salle comble dans la grande salle du Tarmac. Un public constitué à la fois de fins connaisseurs, de nombreux romanciers, des dramaturges, des journalistes, mais également les habitués du Tarmac. Une bonne occasion de faire des rencontres, d’échanger et de partager autour de Sony. 
Emotions avant et après les planches violentéesEmue, la directrice du Tarmac, Valérie Baran, a introduit la pièce et cette semaine dédiée à l’auteur congolais en resituant le lien très fort qui unit cette institution qui promeut le théâtre francophone en France et le dramaturge disparu il y a 20 ans aujourd’hui : En 1985 Sony Labou Tansi jouait J'ai soussigné cardiaque le premier et inaugurait le TILF ancêtre du Tarmac. Emotion très forte au début de cette représentation qui m’a quelque peu rappelée l’atmosphère qui présidait la rencontre que j’avais animée à la librairie Galerie Congo, il y a deux semaines. Atmosphère qui m’avait convaincu d’une chose : Sony était aimé par ce public. D’ailleurs, lors de cette rencontre avec Bernard Magnier, j’avais été frappé  par la puissance de sa rencontre avec Sony Labou Tansi. La vie et demie. Un roman si fort dans son impact que Bernard Magnier chercha à entrer tout de suite en contact avec son auteur et noua avec lui une longue relation  de travail et d’amitié. Quel hommage rendu à Sony Labou Tansi. Bernard Magnier peinant à contenir l’émotion qui l’a envahi à la fin de cette pièce. Sony Labou Tansi lui a fait toucher du doigt l’acte de la création artistique et sa réception. Douce et passionnante expérience. 
La pièce 
Je suis les prestations de Criss Niangouna depuis quelques années. Un comédien talentueux et charismatique avec une gouaille que j’apprécie. Incarnant le rôle de Kala-Lubu dans la fameuse Saison au Congo, version Christian Schiaretti, j’ai découvert l'artiste chevronné Marcel Mankita au théâtre des Gémeaux de Sceaux. Un très grand comédien dans le rôle de Sony Labou Tansi. Un jeune lecteur inconditionnel de Sony entre en échange avec l’homme de lettres. Il  parle du poète, du dramaturge et du romancier avec la même fougue que les jeunes d’un quartier soutenant avec force et conviction, les faits et gestes de Cristiano Ronaldo. Il y a quelque chose de très Brazzavillois dans cette mise en scène et cette prise de parole du lecteur passionné. Mais, dans les rues de la capitale congolaise, les joutes verbales se gagnent à coups d’arguments imparables. Et pour un écrivain, rien ne vaut mieux - pour convaincre l'auditoire - que ses écrits, ses prises de parole, des séquences de ses pièces de théâtre jouées, ses correspondances affichées… Au fil du jeu des acteurs, on découvre ou redécouvre le discours percutant, truculent, vindicatif, engageant, dense de Sony Labou Tansi. Difficile d’imaginer toute la complexité du travail de Bernard Magnier en extrayant minutieusement des archives audiovisuelles, dans les romans ou dans les pièces de théâtre toutes ces paroles et surtout en les agençant de manière cohérente pour en faire une pièce. Sony Labou TansiHassane Kassi Kouyaté a réussi une mise en scène sobre. Tout est fait focalisé sur Sony, ses mots, son art. Pour les vingt ans de la disparition d'un tel auteur, on ne pouvait par envisager plus bel hommage et une meilleure introduction pour celles et ceux qui ne connaissent cet homme de lettres que de nom. Sony, c'est le Congo, le fleuve. Les Congo. Le Kongo. La dimension politique de ce personnage hors norme n'a pas été évoqué. Mais une chose est certaine, voir ce spectacle vous donnera envie de lire ou relire cet auteur engageant. Une très belle pièce à voir au Tarmac jusqu'au 14 Février 2015Sony Congo ou la chouette  petite vie osée de Sony Labou TansiDISTRIBUTIONTexte de Bernard Magnier Mise en scène d'Hassane Kassi Kouyatéavec Marcel Mankita, Criss NiangounaAssistant à la mise en scène Guillaume MalasnéLumière Cyril Mulon Vidéo Florian Berutti Décor Mahamoudou Papa Kouyaté Costumes Anuncia BlasMENTIONSProduction Compagnie Deux Temps Trois MouvementsCoproduction Le TARMAC - La scène internationale francophone, la CITF (Commission internationale du théâtre francophone), l’EPCC ATRIUM MARTINIQUE.Photo Sony Labou Tansi - copyright Christophe Laurentin