Le roi disait que j'étais diable de Clara Dupont-Monod: portrait d'une femme moderne du XII e siècle: Aliénor

Ce roman mêle les voix d’Aliénor d’Aquitaine et de son mari Louis VII, de leur première rencontre à  la rencontre d’Aliénor avec son deuxième mari Henri Plantagenêt.

D’un côté une jeune femme libre, intelligente, descendante d’une lignée de guerriers et d’amateurs de poésie, fière fille du sud. De l’autre un homme du nord qui ne devait pas être destiné à être roi mais prêtre, très croyant, qui préfère les mots, la douceur à la force.

Dès le départ Aliénor prend en aversion son mari, elle le trouve lâche, faible et ne le comprend absolument pas alors que pour lui c’est un coup de foudre immédiat, elle l’ensorcèle et il veut gagner peu à peu son respect. Elle ne rêve que de combat, de violence, elle ne comprend pas le caractère posé de son mari, les rares fois où elle va le regarder avec admiration c’est lors de ses batailles.

Les visions conjointes sur les mêmes événements sont très intéressantes, la plongée dans l’intimité du couple les enjeux politiques, la vision de la société avec les troubadours, les croisades, la vie seigneuriale est bien retranscrite. Les descriptions et la fascination pour l’Orient, la ferveur religieuse du roi, la rage d’Aliénor confinée dans un rôle subalterne sont bien retranscrites. On a l'impression d'entendre leurs voix nous conter leur histoire ce qui est très agréable, on s'attache à ces deux êtres aux responsabilités importantes.

L’auteur dresse un beau portrait de femme, entière, sans concession, pleine de rage et de confiance. Elle décrit aussi l’évolution de Louis qui de roi effacé s’impose de plus en plus, se révèle guerrier et affirme peu à peu ses choix, homme de conviction qui grandit au fil des pages et comprend qu’il n’arrivera jamais à faire plier Aliénor, il la compare d’ailleurs à une forteresse. Elle nous montre leurs failles et leurs humanités au delà de leurs fonctions.

Tendresse particulière  pour le personnage de Louis qui essaye de se faire aimer comme il l’a fait avec  son père mais il échoue et c’est  le roman d’un amour déçu, impossible. Mais l’originalité du récit et la prépondérance de la vision d’Aliénor et pour une fois l’échec est du côté du mari,. Il y a une sorte d’inversion des rôles Aliénor se plait à provoquer  l’abbé Suger, à se faire obéir, sortir dans Paris ou faire venir sa cour, ses poètes. Alors que le roi a un côté très fleur bleue avec son bout de menthe, sa tendresse, son admiration pour la beauté et les beaux yeux gris de sa femme même si il connait sa violence.

C’est un roman agréable qui nous laisse vagabonder auprès des personnages historiques, chevaucher avec eux, être au cœur des intrigues, de la violence du XII e siècle. Alors n’hésitez pas à ouvrir et découvrir ce beau portrait de femme très moderne et à faire un voyage dans le temps.