Le cessez-le-feu dans l'est de l'Ukraine entre les forces de Kiev et les rebelles prorusses semblait tenir dimanche matin, les autorités ukrainiennes et séparatistes notant une nette accalmie des affrontements malgré des incidents isolés ayant entrainé la mort de deux civils dans la nuit.
Entré en vigueur samedi à 22H00 GMT, ce cessez-le-feu est la première étape d'un plan de paix destiné à mettre fin à un conflit qui a fait plus de 5.500 morts en 10 mois.
Mais si deux civils ont été tués seulement vingt minutes après son entrée en vigueur à Popasna (région de Lougansk), par des tirs d'artillerie venant d'une zone que Kiev estime être contrôlée par des cosaques dissidents ne respectant pas l'autorité des Républiques séparatistes, les affrontements se sont considérablement réduits ensuite.
Les forces ukrainiennes ont fait état de bombardements dans la région de Lougansk et autour du noeud ferroviaire de Debaltseve, où se sont déroulés les combats les plus violents de ces derniers jours, mais ces attaques étaient "des tirs de harcèlement très localisés et non systématiques" selon un porte-parole militaire ukrainien, Vladislav Seleznev.
Les troupes ukrainiennes ont subi dix attaques dans la nuit, a-t-il précisé, un nombre bien inférieur aux journées précédentes.
Un haut responsable militaire de la République séparatiste de Donetsk (DNR), Edouard Bassourine, a pour sa part déclaré que le cessez-le-feu était "globalement respecté", tout en notant lui aussi des affrontements résiduels dans la zone de Debaltseve.
"Nous espérons que le cessez-le-feu sera bientôt toalement respecté d'ici quelques heures. Il faut un peu de temps, ce n'est pas un processus instantané", a déclaré à l'AFP Ilia Kiva, responsable du ministère ukrainien de l'Intérieur dans la région de Donetsk.
Les soldats ukrainiens ont du cependant repousser des attaques rebelles près du village de Tchornouguine (5 km à l'est de Debaltseve), a précisé un autre porte-parole militaire ukrainien, Anatoli Stelmakh. Les autorités ukrainiennes ont aussi fait état de mouvements rebelles à proximité du port de Marioupol, dernière grande ville de l'est rebelle contrôlé par Kiev.
La violence des affrontements, quelques heures seulement avant l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, avait renforcé les craintes de voir cette trêve aussi peu respectée que les précédentes.
- Pressions internationales -
L'accord conclu jeudi à Minsk à l'issue d'une nuit de négociations entre les dirigeants d'Ukraine, Russie, Allemagne et France prévoit que Kiev et les rebelles ont deux jours après l'entrée en vigueur du cessez-le-feu pour commencer à retirer leurs armes lourdes de la ligne de front.
Le président russe Vladimir Poutine, son homologue ukrainien Petro Porochenko, le président français François Hollande et la chancelière allemande Angela Merkel doivent faire ensemble dimanche un "premier point" sur l'application du cessez-le-feu, selon la présidence française.
M. Porochenko a affirmé que le processus de paix était menacé par des actions des rebelles autour de Debaltseve où les troupes ukrainiennes sont quasiment encerclées.
"Le président américain Barack Obama a appelé M. Porochenko pour lui exprimer sa "sympathie" et sa profonde "préoccupation" concernant notamment la situation "dans et autour de la ville de Debaltseve".
Le président ukrainien a également évoqué le sujet avec M. Hollande et Mme Merkel, parrains de l'accord de paix conclu jeudi à Minsk. Selon un haut responsable du département d'Etat, le secrétaire d'Etat John Kerry a insisté sur le respect complet des accords passés à Minsk, dans un entretien téléphonique avec son homologue russe Sergueï Lavrov.
De son côté, Vladimir Poutine a réaffirmé, lors d'un entretien téléphonique avec François Hollande et Angela Merkel, son attachement au respect du cessez-le-feu, a indiqué l'Elysée.
La situation à Debaltseve avait suscité des doutes quant à une application effective de la trêve. "Il n'y a pas un mot sur Debaltseve dans les accords de Minsk", avait lancé samedi le dirigeant de la république autoproclamée de Donetsk, Alexandre Zakhartchenko, cité par le site officiel séparatiste.
Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a expliqué que les tentatives des soldats ukrainiens encerclés à Debaltseve de sortir "de la chaudière" seraient considérées comme une violation du cessez-le-feu.
M. Zakhartchenko avait signé samedi en fin d'après-midi un décret introduisant le cessez-le-feu qui donne cependant le droit aux rebelles de riposter à des "tirs contre les infrastructures militaires et civiles de la République populaire de Donetsk".
De son côté, Moscou a d'ores et déjà accusé Kiev et les Occidentaux de "déformer le contenu des accords de Minsk".
- Calme à Donetsk -
A Donetsk même, les habitants se réjouissaient dimanche d'une première nuit passée sans bombardement grâce au cessez-le-feu.
"Le cessez-le feu à une heure du matin, nous l'avons attendu comme on attend les douze coups de minuit pour le nouvel an !", a déclaré à l'AFP Irina, 55 ans, qui vend quelques cornichons et du chou mariné sur un marché faisant face à la gare ferroviaire de Donetsk, inhabituellement animé par rapport à ces derniers mois.
"Les gens ici sont tellement abattus par les bombardements quotidiens qu'ils ont du mal à croire que la situation peut s'améliorer", a-t-elle cependant ajouté.
Source : AFP