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L’orangeraie

Publié le 02 mars 2015 par Adtraviata

L’orangeraie

Présentation de l’éditeur :

Quand Amed pleure, Aziz pleure aussi. Quand Aziz rit, Amed rit aussi.   Ces frères jumeaux auraient pu vivre paisiblement à l’ombre des orangers. Mais un obus traverse le ciel, tuant leurs grands-parents. La guerre s’empare de leur enfance et sépare leurs destins. Des hommes viennent réclamer vengeance pour le sang versé.    Amed, à moins que ce ne soit Aziz, devra consentir au plus grand des sacrifices. Et tous payeront le tribut des martyrs, les morts comme ceux qui restent.   Larry Tremblay  frappe encore un grand coup, mais vise cette fois le cœur, laissant au lecteur le soin de départager les âmes pures des fourbes, les fanatiques des héros. Un texte à la fois actuel et hors du temps qui possède la force brute des grandes tragédies et le lyrisme des légendes du désert. 

Je ne sais pourquoi, j’avais peur de ce livre, je craignais d’y trouver une violence physique et une description de la guerre insupportables. Mais je me suis laissé convaincre par la charmante demoiselle de la Librairie du Québec à Paris et bien m’en a pris. Mais comme il m’est difficile de parler de ce roman !

Dans un pays jamais nommé, qui pourrait être le Liban ou la Palestine, deux frères jumeaux inséparables vont partager et porter le poids, le prix du sang. En quelques pages denses et poétiques, douloureuses et lumineuses, se déploient les thèmes de la paix (dans cette orangeraie si symbolique de l’appartenance à une terre), de la violence aveugle, de la vengeance, du martyre, de la manipulation. Car c’est à des enfants que l’on demande de venger la mort de leurs grands-parents en allant se jeter sur un ennemi lointain, inconnu et d’autant plus diabolisé. Deux enfants, deux parents qui sont acculés à faire des choix, à sacrifier l’un contre l’autre.

Avec sobriété, Larry Tremblay fait le récit de ces jours passés à tourner et retourner le choix dans la tête et le coeur, sous un soleil qui finit par écraser autant que la main du chef vengeur. Le thème du double, dans la personne des jumeaux Amed et Aziz, nous renvoie comme un miroir à deux faces, où le sacrifié hante définitivement la mémoire du survivant. Deux personnages qui symbolisent l’ambivalence des sentiments, l’écartèlement moral et physique auxquels ils sont livrés.

Tout se « dénoue » sur une scène de théâtre, des années après le drame, de l’autre côté de l’océan. Rien d’étonnant à cela car Larry Tremblay est d’abord un auteur de théâtre. C’est là que se révèle le dessous des cartes, dont on se doutait bien qu’elles étaient truquées dès le départ. Et resurgissent avec acuité les questions de la manipulation, de l’endoctrinement, de la réalité de guerres qui sont tellement éloignées de nous ou que nous croyons connaître.

Et malgré qu’il m’ait manqué un peu d’émotion, ce roman resserré et intemporel prend encore plus de sens. J’ai l’impression que les Canadiens ont une grande sensibilité aux conflits du Proche et du Moyen-Orient : j’ai pensé au film Incendies, que j’avais beaucoup aimé.

Car ce pays pourrait être le Liban ou la Palestine. Ou la Syrie ou la Lybie… ou…

« Tamara ne parlait pas souvent avec son mari. En fait, elle préférait leurs silences à leurs habituelles disputes. Ils s’aimaient comme ils devaient s’aimer sous le regard de Dieu et des hommes.

Souvent, avant de retrouver son mari déjà couché, elle allait dans le jardin. Elle s’assoyait sur le banc placé devant les roses trémières et respirait les odeurs riches qui montaient de la terre humide. Elle se laissait bercer par la musique des insectes, levait la tête en cherchant la lune des yeux. Elle la regardait comme si c’était une vieille amie qu’elle venait rencontrer. Certaines nuits, la lune lui faisait penser à une empreinte d’ongle dans la chair du ciel. Elle aimait ce moment où elle se tenait seule devant l’infini. Ses enfants dormaient. Son mari l’attendait dans leur chambre, et elle existait peut-être comme une étoile qui brillait pour des mondes inconnus. En contemplant le ciel, Tamara se demandait si la lune avait connu le désir de la mort, celui de disparaître à jamais de la face de la nuit et de laisser les hommes orphelins de sa lumière. Sa pauvre lumière empruntée à celle du soleil. » (p. 25)

Larry TREMBLAY, L’orangeraie, Editions Alto, 2013 – Le roman vient d’être publié en France aux éditions de La Table ronde (avec une couverture très sombre, dommage…)

Une semaine au Québec avec Marilyne qui a lu L’ingratitude, de Ying Chen.

Un roman qui fait aussi partie de la liste de Québec-au-trésor chez Karine.

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