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Ma bohème Pragoise…

Par Alyette15 @Alyette1

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C’est par la lumière que tu te dévoiles avec la pudeur frileuse qu’autorise les grands hivers. De brume tu n’es pas avare et tu laisses sur la Vltava serpenter les embruns de l’aurore. Enfin les eaux de ta rivière se révèlent et les hirondelles volent bas comme des baigneuses ailées d’opale. Il fait déjà si froid. Sur les fenêtres de la chambre d’hôtel elle pose ses lèvres sur la buée et du bout du doigt trace ton nom : Prague. Elle regarde et elle pourrait rester égarée dans sa contemplation pendant de longues heures. Simplement suivre le vol des hirondelles sur les eaux de glace et leur trajectoire effrontée sur le Pont Charles qui peu à peu s’extrait de son hébétude et laisse apparaître les silhouettes massives de ses statues. Déjà de nombreux touristes arpentent le pont qui mène à la Cathédrale dont les tours inquiétantes épient la ville. Hier elle a fait ce trajet et est restée accoudée à la balustrade du pont tandis que le fantôme de Casanova déposait sur sa nuque la morsure d’un baiser sensuel et sans suite. A quelques pas un homme faisait vibrer l’archer de son violon. Entre accords et désaccords les notes s’évadaient tourmentées puis espiègles. Elle aurait voulu prolonger cet enchantement, demeurer sur ce pont et renouer avec les mirages du passé. Qu’un fiacre vienne à sa rencontre et que Nosferatu la fasse sienne et l’emmène. Ailleurs. Peut-être dans un bistrot pour goûter ce vin de bohème qui tourne la tête et rosit les joues. Puis avec précaution il aurait dénoué  les rubans de son chapeau pour libérer les mèches de ses cheveux. Après le vin, ils auraient fui, plus loin, aux confins de la Bohème du sud pour naviguer sur les eaux sorcière du Danube. Sans que personne n’en sache rien, disparaître parmi les légendes slaves. Le temps d’une métamorphose.

Ferme et douce la main de Matthieu la sort de sa rêverie. Il faut marcher et visiter la ville aux cent clochers. Quelque chose d’un crépuscule de neige. Elle trébuche sur les pavés et cherche à nouveau cette main qui retiendra sa chute. Il la lui tend. De rares et fragiles flocons se frayent un chemin parmi la couverture nuageuse et tapissent d’une pellicule vierge les empreintes laissées par les badauds. A Prague c’est encore l’hiver.

Astrid Manfredi, le 04 mars 2015

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