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jour et nuit de noces

Publié le 10 mars 2015 par Dubruel

d'après FARCE NORMANDE de Maupassan

Le marié, Louis Jardy,

Le plus riche fermier du pays,

Était un chasseur frénétique.

La mariée, Rosalie Toudic

Avait été maintes fois courtisée

Car on la savait fort bien dotée.

Pour le déjeuner, on s’assit à deux heures.

On mangeait encore à huit heures.

Plus on buvait, plus on engloutissait.

Les fermières oppressées,

Coupées en deux par leur corset,

Gonflées du haut et du bas,

Restaient à table par pudeur.

L’une d’elle, sans doute la plus gênée, se dressa

Et sortit pour soulager sa rondeur.

Alors, à sa suite, toutes se sont levées,

S’isolaient et revenaient plus heureuses.

Les lourdes plaisanteries pleuvaient.

Dans un coin, trois convives préparaient

Aux mariés une farce vraiment joyeuse.

Ils en trépignaient :

-« C’est les braconniers

Qui vont s’en donner c’te nuit

Avec la lune qu’y a !

T’en penses quoi, Louis ? »

Vers eux, le marié se tourna :

-« Qu’i z’y viennent, les braconniers ! »

Son voisin se mit aussi à rire :

-« Ah ! I’ peuvent ben y venir;

Tu quitteras pas ta besogne pour ça ! »

-« Qu’i’ z’y viennent ! J’ te dis qu’ ça ! »

Après avoir sifflé le dernier verre

D’eau de vie

Chacun partit.

Et les mariés entrèrent

Dans leur chambre à coucher

Située au rez-de-chaussée.

D’un œil sensuel, Louis guettait Rosalie

S’apprêtant à se mettre à l’ouvrage.

Il quitta son habit.

Elle, avait défait sa robe de mariage

Et lui dit : -« Viens donc au lit. »

Dix minutes après, Louis entendit

Un coup de feu dans le bois voisin.

Il se dressa,

Se pencha au dehors, regarda

Mais ne vit rien.

Il étreignait Rosalie

Quand une nouvelle détonation retentit.

Alors Louis, secoué de colère, jura :

-« Nom de D…! Ils croient

Qu’à cause de toi,

Je ne sortirai pas ! »

Il se rhabilla, décrocha son fusil,

Sauta dans la cour

Et, partout dans la petite forêt,

Rechercha les braconniers.

Rosalie attendit

Une heure,

Deux heures.

Son mari ne rentrait pas.

Alors, elle appela le charretier,

Le valet, et le volailler

Qui partirent à la recherche de leur maître.

Ils le trouvèrent à un kilomètre,

Ficelé des pieds à la tête

Au tronc d’un conifère.

Sa culotte et sa veste

Avaient été enfilées à l’envers.

À son cou pendaient un lapin, une perdrix

Et un écriteau où l’on avait écrit :

’’ Qui va à la chasse,

Perd sa place !’’


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