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Actu insolite de mi-mars

Publié le 13 mars 2015 par Valentine D. @sciencecomptoir

actu_insolite_mars1_2015Et voici l’actu insolite du premier mi-mois de mars ! Au sommaire : changement climatique, gastronomie indienne, tribune sur les grandes femmes en sciences, art scientifique, cimetière de baleines et migration humaine. Commençons avec plusieurs actus ratées en février, que je m’empresse d’ajouter à ce billet.

Changement climatique : une pause d’origine « naturelle »

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Températures atmosphériques passées, observations (en noir) versus prédictions (en couleurs).

Le changement climatique fait apparemment une « pause » depuis une dizaine d’années. Un artefact dans la courbe globale d’augmentation des températures qui laisse les scientifiques perplexes et les climatosceptiques radieux, et dont l’origine demeurait jusqu’ici inconnue. Le 27 février dernier paraissait dans la revue Science un article consacré à cette épineuse question : cette « fausse pause » est-elle normale dans le système climatique de la Terre ou avons-nous enrayé la machine climatique ? Trois chercheurs américains ont ainsi enquêté sur cette affaire, avec dans leur boite à outils des modèles climatiques basés sur les océans Atlantique et Pacifique combinant simulations et observations. Résultat : l’oscillation thermique des océans selon un cycle de plusieurs dizaines d’années (50 à 70 ans pour l’Atlantique, davantage pour le Pacifique) expliquerait une grande partie des variations internes de températures atmosphériques dans l’Hémisphère Nord. En particulier, ce ralentissement du changement climatique serait dû à une tendance de refroidissement de l’océan Pacifique, dont la dynamique thermique suit sa propre route indépendamment des oscillations du système climatique global. Michael Mann, co-auteur de l’étude, a déclaré que « la variabilité interne multidécennale des températures de l’Hémisphère Nord compense probablement le réchauffement d’origine anthropique [humaine, NLDR] à l’échelle de la dernière décennie ». En s’appuyant sur les enregistrements climatiques passés, les chercheurs prévoient que la situation s’inversera très probablement dans le futur. Les oscillations océaniques empireraient alors vraisemblablement le changement climatique.

Sources : (via Science Etonnante) Science (article payant) et Science Daily

Climat toujours : et les pays les plus exposés au changement climatique sont…

63 ans de changement climatique selon des données issues de la NASA.
63 ans de changement climatique selon des données issues de la NASA.

Infographies à l’appui, Le Monde a publié un article le 27 février dernier sur le World Risk Index (WRI). Un « indice mondial d’exposition humaine au changement climatique » conçu « par l’université des Nations unies pour l’environnement et la sécurité humaine (UNU-EHS), et l’Alliance Development Works ». Il « traduit le risque, en pourcentage, qu’une communauté humaine soit exposée aux catastrophes naturelles ». L’article énumère les différents critères pris en compte dans l’indice, présente un planisphère du WRI et le très attendu classement des pays en fonction de leur exposition au changement climatique. Comme je suis terriblement sadique et que les journalistes sont payés au clic, je vous invite à découvrir le podium par vous-mêmes sur le site du Monde (merci pour eux).

Source : Le Monde

Curry, Tandoori, Tikka Masala, Korma : pourquoi la nourriture indienne est-elle si bonne ?

Curry végétarian.

Curry végétarien.

Heureusement, la Science est là pour lever le voile sur cette question existentielle qu’on s’est tous posée un jour (ça, et le mystère du fromage à l’intérieur des cheese nans : comment diable est-il arrivé là ?), et que le Washington Post a abordée le 3 mars dernier. En s’appuyant sur une base de données de 2500 recettes, des chercheurs ont réalisé que la gastronomie indienne se distinguait des cuisines occidentales jusqu’au niveau moléculaire. La saveur d’un aliment ne s’appuie que sur un nombre limité de familles de composés moléculaires, comme l’illustre ce diagramme interactif du Scientific American publié en 2013. De cette manière, des connections voire des redondances gustatives ont pu être mises en évidence entre des aliments à première vue très différents : par exemple, les fraises sont plus proches du vin blanc que des pommes, des oranges ou du miel. Certaines cuisines, comme la cuisine asiatique, ont tendance à éviter les superpositions de saveurs. Et à ce titre, les indiens sont très bien placés. En analysant les ingrédients de chacun des 2500 plats étudiés, les chercheurs ont été étonnés que ces saveurs se superposent si peu. Il semblerait que la présence de certaines épices, comme le piment de Cayenne, la coriandre ou le garam masala, omniprésents dans la cuisine indienne, soit associée à une faible superposition de saveurs. Contrairement à la gastronomie occidentale où produits laitiers et pain sont aussi utilisés que gustativement redondants, dans la gastronomie asiatique (et indienne en particulier), chaque ingrédient a son importance car il a une saveur unique.

Source : Washington Post (pour les cheese nans, j’ai obtenu la réponse auprès d’un chef indien : ils introduisent les triangles de fromage à tartiner à l’intérieur de la boule de pâte crue avant de l’aplatir et de la mettre à cuire. Ne me remerciez pas, c’est cadeau)

Tribune : les femmes, les sciences, et le reste

L'immense primatologue Jane Goodall.

La primatologue Jane Goodall.

A l’occasion de la Journée Internationale des Droits des Femmes, le 8 mars dernier, Florence Porcel signe sur son blog un billet dédié aux grandes femmes de sciences, qui ne se résument heureusement pas à la seule Marie Curie. L’article ouvre sur une chronologie des grands évènements scientifico-politiques faisant intervenir des femmes à travers les différents domaines scientifiques, et poursuit par des biographies illustrées des principales femmes de sciences qui l’ont marquée.

Source : blog de Florence Porcel

Wellcome Image Awards : la Science, tout un art !

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Reticulum (un des quatre estomacs) de chèvre. Micrographie confocale de Luis de la Torre-Ubieta, Université de Californie, Los Angeles, Etats-Unis.

Le 9 mars, la BBC nous a présenté les 20 photos finalistes du concours de photos scientifico-artistiques organise par la bibliothèque en ligne d’images médicales Wellcome. Images macroscopiques, microscopiques ou simulations informatiques, il y en a pour tous les goûts ! Seul critère, les images doivent être en haute définition et se rapporter aux sciences biomédicales et à la Santé contemporaine. Le concours devrait s’achever le mercredi 18 mars prochain avec l’annonce du classement final. Pour les plus artistes d’entre vous, sachez que la récolte des images pour l’édition 2016 du concours est d’ores et déjà ouverte !

Sources : BBC et Wellcome

Les baleines s’échouent pour mourir

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Existe-t-il des cimetières de baleines ? C’est la question que s’est posée la BBC suite à l’échouage en masse de 200 baleines pilotes sur la côte Néozélandaise le 15 février dernier. Sa plage Farewell Spit y est tristement célèbre pour ses échouages réguliers de mammifères marins. Ce n’est malheureusement pas un cas isolé : des centaines d’événements similaires sont reportés chaque année sur les côtes américaines, australiennes, néozélandaises ou anglaises. Certaines zones semblent être la cible de ces « suicides collectifs » de cétacés. Il semblerait qu’un pic dans la fréquence d’échouages ait lieu tous les 11-13 ans, ce qui serait corrélé à un changement dans le régime des vents. Ainsi, les vents pousseraient les eaux riches en nutriments (donc en proies pour les cétacés) près des côtes, entraînant un déplacement des mammifères dans des zones méconnues et peu profondes. Cette modification du régime des vents pourrait aussi causer de violents orages susceptibles de désorienter les mammifères marins. Ces derniers pourraient également être piégés par des marées à marnage important, qui causent des mouvements rapides de grands volumes d’eau.

Autre phénomène étrange, ces échouages concernent généralement de grands nombres d’individus. En cause, le comportement extrêmement social des cétacés qui évoluent en bancs. Des groupes sociaux qui se constituent dès la naissance et jusqu’à ce que la mort les sépare. Si l’un des individus est en difficulté (y compris malade) ou en danger, de nombreuses études ont montré que les autres individus ne prendront pas la fuite mais resteront à ses côtés, au péril de leur vie. C’est d’ailleurs ce comportement social qui a rendu la chasse à la baleine si prolifique au Moyen-Âge : même après avoir blessé un individu (en général un juvénile), les autres cétacés ne s’éloignaient pas et allaient bientôt subir le même sort. Si un ou plusieurs mammifères marins s’aventurent dans une baie peu profonde, il est donc probable que l’ensemble de son groupe social l’y suive, ce qui peut aboutir à un échouage collectif.

Mais cela n’explique pas pour autant pourquoi les baleines vont s’échouer en premier lieu. Andrew Brownlow, du Scotland’s Rural College (à Inverness, en Ecosse), suggère que ce comportement pourrait concerner des individus malades : « une des théories est que les animaux vont s’échouer quand ils sont très faibles parce qu’ils ne veulent pas couler ». Une autre hypothèse stipule que les individus malades pourraient aller s’échouer, se sachant malades, pour protéger les autres membres de leur groupe social de la propagation du pathogène ; sauf que les autres membres finissent par s’échouer à leurs côtés.

D’autres hypothèses mettent en cause les sonars maritimes (notamment militaires) qui constituent une pollution sonore sous-marine et perturbent le sonar (véritable GPS) des cétacés, ou encore des efflorescences ponctuelles d’algues toxiques. Quoi qu’il en soit, la question de la cause de ces échouages collectifs de mammifères marins n’a toujours pas trouvé de réponse à ce jour.

Source : BBC Earth

Quand l’ADN permet de retracer le chemin des premiers hommes

Squelette humain (origine inconnue).

Squelette humain (origine inconnue).

C’est en étudiant l’ADN que des chercheurs en ont appris un peu plus sur l’origine de l’Homme en Europe. Dans leur article paru dans la revue Nature le 2 mars dernier, 39 chercheurs du monde entier ont analysé l’ADN de 69 restes humains issus de sites archéologiques datant du Néolithique et répartis sur l’ensemble du continent européen. La signature de leur génome a permis de confirmer une hypothèse stipulant qu’il y a entre 7000 et 8000 ans, un groupe de fermiers aurait migré depuis l’est du continent européen jusqu’en Europe occidentale. Toutefois, ces individus ne se seraient hybridés avec les populations de chasseurs-cueilleurs indigènes que plusieurs milliers d’années plus tard (il y a 5000 à 6000 ans). Dans un deuxième temps, une communauté pastorale tout droit venue du sud de la Russie, les Yamnaya, serait venue se mélanger à son tour avec les autochtones à l’Âge de Bronze. Le génome des Européens serait donc principalement issu de ces 3 groupes humains, dans des proportions variables selon les pays. Les chercheurs mettent ensuite leurs découvertes en parallèle avec l’origine des langues indo-européennes. Ce groupe de langues inclue la majorité des langues parlées aujourd’hui en Europe et qui présentent des similitudes de vocabulaire et de grammaire, de l’anglais au russe et de l’espagnol au grec (à l’exception de la langue basque par exemple qui, elle, est beaucoup plus ancienne). Une des hypothèses admises jusqu’ici est que ces langues indo-européennes auraient été apportées par la première vague de migrants évoquée plus haut, il y a 5000 ans. Cependant, cette nouvelle étude corrobore une seconde hypothèse selon laquelle ces langues auraient pour berceau une région de steppes située au nord des mers Noire et Caspienne. David Reich, dernier auteur de l’étude, a confié à la BBC que la question était aujourd’hui de déterminer « si les langues parlées par ces migrants des steppes sont uniquement les ancêtres d’un sous-échantillon de langues indo-européennes actuellement parlées en Europe – par exemple, le Slave et peut-être l’Allemand – ou au contraire si elles sont à l’origine de l’immense majorité des langues indo-européennes actuelles ».

Sources : BBC et Nature (publication en consultation gratuite)

Photo d’introduction : galets de silex posés sur un granite. (Crédit: Science de comptoir)

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