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410ème semaine politique: comment la politique française se redresse

Publié le 14 mars 2015 par Juan
C'était le dernier weekend avant le premier tour de ce qu'on annonce comme une catastrophe démocratique. Des élections locales, pour des circonscriptions reconstruites que l'on voulait supprimer il y a un an; une abstention promise à un niveau record; un parti d'extrême droite qui mobilisera des troupes de mécontents.
Il y a deux belles, cependant, dans ce scrutin. Primo, le mode de scrutin impose la parité. On a vu fleurir des doubles candidatures femme/homme, dans tous nos cantons. Secundo, le vote blanc, encore une fois, sera mesuré.
La gauche fracassée ?
Manuel Valls s'inquiète, il le crie, il le clame. Il a peur que la France se fracasse sur le Front national.
EELV va mal. Le parti se déchire. On pourrait s'en désespérer. Il ne faut pas. La clarification est toujours une bonne chose. A droite, celles et ceux qui veulent encore un strapontin ministériel avant la grande défaite. Les plus bruyants sont le député François de Rugy et le sénateur Jean-Vincent Placé. Pensez vous ! C'est sans doute leur dernière occasion de la décennie de se faire appeler ministre ! Ils sont agités par l'équipe Hollande qui ne veut pas d'une candidature écologiste à la prochaine présidentielle.
A gauche, Cécile Duflot porte le combat pour un autre rapprochement. Cette semaine, EELV clame son soutien à la généralisation du tiers payant qui hérissent les médecins, mais fustige la réduction de 25 % des aides françaises à la production agricole biologique (*). Plus grave, le parti s'est fendu d'un communiqué rageur contre l'ensemble de la politique socio-économique du PS gouvernant: "la réalité commande pourtant d’envisager de sortir de la gestion de la crise pour adopter une politique volontariste et changer de cap."
Devant la débâcle électorale annoncée, le groupe écologiste a tenté de se ressouder sur une proposition de loi, rendre le vote obligatoire. Cette dernière mesure ne fonctionnera que si le vote blanc est à son tour comptabilisé dans les suffrages exprimés, histoire de bien remettre à leur juste place et niveau ces élus de tous bord qui clament représenter jusqu'à 30% d'un corps électoral en fait rabougri.
Le Front de Gauche existe encore. Certes, sa voix porte peu, le discours national n'est plus lisible. Pire, Jean-Luc Mélenchon s'égare en politique étrangère dans un soutien à Poutine, et récolte une volée de bois plus ou moins vert sur sa gauche. Son attaque tonitruante, sur son blog, contre un opposant russe à Vladimir Poutine, Boris Nemtsov, un "illustrissime inconnu" a surpris, ou choqué. Une précision importante: Nemtsov est mort assassiné à deux pas du Kremlin. Mélenchon s'est montré enragé qu'on ose soupçonner l'autocrate russe d'être l'instigateur de ce crime. La gauche s'est déchirée sur Poutine, cet excellent ami de Fillon, et dont quelques oligarques proches financent par ailleurs le Front national. Il faut parfois se pincer pour croire encore à la politique française. A gauche, quelques tribunes énervées contre les déclarations de Mélenchon ont été publiées par Mediapart, Libération et Politis.
Mais si l'on oublie ces péripéties qui intéressent peu nos concitoyens, le Front de gauche se cherche et travaille. L'élan électoral à la Syriza n'a pas eu lieu. Mais les perspectives politiques, "à la gauche de la gauche" ne sont pas pour autant désespéré.
Les socialistes ont leurs frondeurs, une catégorie qui fait régulièrement parler d'elle à force de parler mais qui pour l'heure n'a rien réussi à bloquer ni désorienter dans la politique menée par le gouvernement. Mais là encore, il y a une prise de conscience, trop lente, certes, mais réelle.
Mercredi soir, François Hollande s'est même permis un cocktail dinatoire avec une douzaine d'entre eux. La démarche suffit à encombrer les commentaires des éditorialistes politiques. Le jour même, Hollande fait la une du magazine Challenges avec ce titre des plus explicites: "je ne changerai pas de politique". Le tout-Paris bruisse encore de rumeurs de remaniement gouvernemental post-électoral.  Le jeune Emmanuel Macron n'a pas été échaudé par l'interminable débat sur sa précédente loi qui a débouché sur toutes sortes de "libéralisations" (notamment le travail le dimanche) et un recours au vote forcé via le 49-3 pour éviter un rejet. Il exhorte Hollande à aller plus loin. Il le dit sur France 2, premier plateau télé en "prime time" boudé, comme d'autres, par neuf téléspectateurs sur dix.
"On peut être de gauche et réussir." Emmanuel Macron.
Au plus près de l'équipe Hollande, certains réalisent enfin que la coupure de la gauche pourrait être définitive. 
Les affaires de la droite
La droite attend sa victoire, une victoire qu'elle n'a pas méritée. Elle le sait bien. Elle patauge. Elle n'a rien fait, rien proposé. Nicolas Sarkozy s'apprête à hériter d'une trentaine de conseils généraux (sur les 60 que la gauche gère), comme un fruit mûr qui tombe tout seul. A en croire une confidence rapportée par le Canard Enchaîné, l'ancien monarque veut même réclamer une dissolution de l'Assemblée nationale si la défaite socialiste est trop lourde. Sarkozy s'est giscardisé, on ne retient que ses numéros de clowns, plus ses idées.

A l'UMP, il enchaine meeting sur meeting. Ce scrutin départemental est son premier test électoral depuis sa prise de l'UMP en novembre dernier. On espère qu'il n'a pas prévu de conférence rémunérée au Qatar pour l'entre-deux tour. A Belfort jeudi soir, devant une assistance conquise, il fait le show, multipliant les calembours et les blagues. Ce nouveau Giscard observe du coin de l'oeil comment certaines affaires judiciaires.
Le weekend dernier, son ancien vizir a terminé ses 48 heures de garde à vue par une mise en examen pour faux et blanchiment dans le cadre de l'enquête sur le financement de la campagne présidentielle... de Nicolas Sarkozy.  L'affaire Guéant a tous les ingrédients d'un nouveau Sarkogate.
Mercredi, l'hebdomadaire l'Express révèle que l'un des dirigeants d'une filiale de Bigmalion a avoué aux juges l'existence d'une réunion en début d'année 2012, à l'Elysée, avec trois proches de Sarkozy, pour traiter des frais de meeting.
Et le Front national ? Depuis que Manuel Valls, dimanche, a déclaré qu'il fallait "stigmatiser" le FN, les ténors de ce dernier sont en émoi. A l'Assemblée, la jeune Marion Maréchal-Le Pen accuse le gouvernement de vouloir les faire taire. Sur France 2, Florian Philippot offre des calmants au premier ministre. En campagne dans les Landes, Marine Le Pen accumule les clichés et les peurs, sans preuves ni regrets, contre le "communautarisme" et ses "familles polygames qui se multiplient sans que les services sociaux ne fassent rien." Dans son édition hebdomadaire, le Canard Enchainé revient sur le programme économique et social du FN. On suffoque d'effroi... ou de rire: nationalisation des banques, augmentation générale des salaires, etc. La France en faillite, sur fond de regression xénophobe, voici le programme frontiste.
Mais la vraie et bonne nouvelle est ailleurs. Les commentateurs avaient raison. Marine Le Pen a complètement normalisé le groupuscule de son père. Une enquête vient d'être ouverte pour détournement de fonds ou emploi fictif. Une vingtaine d'assistants parlementaires frontistes à Bruxelles, rémunérés donc sur fonds publics, n'y mettent jamais les pieds.
Citoyen, reprends le dessus !

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