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On y était – Weather Winter

Publié le 19 mars 2015 par Hartzine

10915040_720796284686450_97823194422578351_oWeather Winter, Paris Event Center, Paris, 21 février 2015

Il y a cinq semaines exactement, Surprize, instigateur de barouf émérite et organisateur de l’after le plus célèbre de la capitale, s’apprêtait à donner le coup d’envoi de sa dernière trouvaille : le bien nommé Weather Winter.

Présenté au public comme le prologue de sa version best-of-best-known, dont la troisième édition aura lieu du 4 au 7 juin prochain, le Weather Winter a tout de même trouvé le moyen de rassembler, pour la première fois sous le toit du Paris Event Center, la bagatelle de 10 100 personnes.

45 000 m² de terrain au pied du parc de La Villette, deux scènes gigantesques réparties sur 16 250 m² d’espaces modulables, une dizaine de foodtrucks, un vestiaire autonome de 5 000 casiers, une douzaine d’artistes, quatorze heures de fête non-stop filmées et retransmises en direct sur Arte Concert, et un havre d’amour tendu autour des platines joyeuses de Romain Play et des bambocheurs de la Mamie’s. Une ode à la démesure pour une soirée qui, l’espace d’une nuit, a revêtu sans complexe sa plus belle robe de festival.

Certes, on est encore loin de la machine de guerre qui, en trois ans à peine, a su se hisser aux rangs des plus grands rassemblements de musiques électroniques mondiaux, mais il faut tout de même admettre que pour un prologue, l’équipe de Surprize a sorti le grand jeu. Une organisation irréprochable, des bars raisonnablement bondés, de l’eau potable en libre service, des toilettes toujours disponibles, un staff ultra réglo et une équipe logistique qui mérite amplement son vingt sur vingt.

Du point de vue monétaire, si le tarif des consommations ne peut être retenu comme un vrai point positif de la soirée, il faut tout de même reconnaître que les prix ont été maintenus dans la fourchette basse de ce que l’on est en droit d’attendre d’une soirée légale de cette envergure. Qu’on le qualifie, par abus de langage, de rave ne doit pas pour autant faire oublier que le Weather Winter est une soirée publique et déclarée, et donc soumise à une réglementation spécifique, dont les prix ne peuvent sortir indemnes. Là encore donc, pas grand-chose à dire.

Du point de vue des installations, il faut bien avouer que l’expression « cathédrale de lumières », répandue dans le matériel promotionnel, ne tenait ni de l’hyperbole ni de la métaphore mais bien de la promesse. Chapeau bas aux techniciens qui ont très largement contribué à la réussite de la soirée.

Venons-en maintenant au nerf de la guerre : le public, le line-up, les performances, l’ambiance.

On ne dispose pas de statistiques précises sur la fréquentation de la soirée, mais l’impression générale qui demeure répartit le gros des troupes dans la fourchette 18/25 ans. Public assez jeune donc, avec son lot de vagissements indécrottables (« allllllllleeeeeeeezzzzz lààààààà !« ) et ses chenilles à paillettes qui poussent tout le monde pour attraper la queue du selfie ou coller ses lunettes de soleil dans la membrane des enceintes. Mais ne soyons ni bégueules ni vieux cons, les plus honnêtes admettront, d’une manière ou d’une autre, qu’ils sont passés par-là ; les autres avaient, de toute façon, largement assez de place pour danser tranquille.

Le line-up. Partage équitable entre de grosses légendes et des acteurs bien connus de la scène contemporaine française. Un line-up propre et majestueux auquel on reprochera peut-être de s’être laissé aller au jeu de la facilité. Evidemment, il est difficile de construire de véritables arguments à l’encontre des choix de programmation, on est très loin d’une soirée fourre-tout, et la cohérence dans le choix des artistes est évidente. Tabassage en règle par les académiciens du kick et la nouvelle mafia de la techno martiale française. Aucun mauvais choix mais pas non plus de vraie surprise. Quand on sait à quelle vitesse se vendent les préventes du moindre événement estampillé Weather, je ne sais pas, je me dis qu’on est en droit de s’attendre à une programmation un peu plus déconcertante — surtout de la part de Brice Coudert et de son équipe qui, tant ils arrosent Paris depuis déjà plus de quatre ans, n’ont plus rien à prouver à personne. Finalement, c’est peut-être dans cet écart entre les prises de risque sincères des affiches des Concrete (Vatican Shadow, Cio D’Or, Xhin, Joe Claussel, Delroy Edwards, ou encore les Spi, et cette liste pourrait continuer pendant encore longtemps), et ce line-up Weather Winter assez convenu, que loge le cœur de la critique. Mais encore une fois, la soirée s’adressait sans doute plus aux fêtards avertis qu’aux mélomanes à la recherche de nouvelles sensations musicales. Et de ce point de vue là, inutile de préciser que l’objectif a été plus qu’atteint. On a beau faire la fine bouche, quand Robert Hood balance un gros Dancer au milieu d’un hangar de 6 000 personnes, on lève les bras et on chante comme tout le monde.

Les dimensions colossales du lieu et les dilemmes de programmation (Robert Hood ou Raresh, DJ Deep ou Minilogue, Derrick May ou Laurent Garnier), incitant à zapper d’une salle à l’autre, compliquent la réalisation d’un report focalisé sur telle ou telle performance. Honnêtement, j’aurais bien du mal à défendre un set plutôt qu’un autre. De ce que j’en ai vu, chacun a eu son lot de bons et de mauvais moments. Techno dure et sans concession dans la salle 1. Ambiance très martiale et machinique où l’émotion naissait essentiellement de rythmiques précises et linaires, couplées à une surenchère de reprises de basses. Ambiance plus deep et introspective dans la salle 2. Cadence plus suave et mélodieuse qui convenait d’ailleurs mieux à la taille plus réduite cette seconde salle. Mention spéciale au Camion Bazar tout de même qui, une fois n’est pas coutume, a su créer à l’écart des stars et de leurs hangars olympiens un îlot festif chaleureux dans lequel ont pu se réfugier ses fidèles.

Bilan de ce premier Weather Winter : si on aurait apprécié une programmation un peu plus audacieuse de la part de Surprize, force est d’admettre que d’un point de vue purement festif, la soirée est une franche réussite. Organisation impeccable, choix du lieu excellent, exploitation des possibilités offertes par l’espace quasi optimale, partenariat avec Arte très bien senti, line-up qualitatif et cohérent, bonne répartition du public sur le terrain qui parvient à donner la sensation d’avoir beaucoup d’espace tout en participant à l’euphorie de la foule. Un bémol peut-être, la qualité du système son de la scène 1, très variable en fonction de sa position dans la salle. D’autres ont mentionné la sueur qui s’est mise à goutter du plafond aux alentours de cinq heures du matin. Bon, à titre personnel, quand je vais à la piscine, je sais bien que je risque de me faire éclabousser ; quand je fais une teuf de quatorze heures, je ne m’attends pas non à en sortir frais comme un gardon. Pas de quoi en faire un plat.

N’en déplaise aux ronchons, il faut bien admettre que Surprize a, une fois de plus, prouvé son expertise dans la gestion des événements techno d’envergure et continue d’asseoir son hégémonie sur la scène électronique parisienne « grand public pointu ».

Une soirée pour ceux qui aiment quand ça crie, que ça pousse, que ça brille, que c’est grand, que ça tape, pas toujours dans les tons les plus raffinés mais sans jamais tomber dans la vulgarité. Bref, une putain de bonne soirée.


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