La vérité

Bientôt trois ans d'expat et beaucoup de changements à venir. Le bilan? il s'impose régulièrement. Cette expérience n'est guère une sinécure. Parfois j'aimerais pouvoir dire que je me plais comme vous ne pouvez pas savoir, qu'il ne me viendrait pas l'idée de rentrer, que je me sens comme dans des pantoufles ici. Mais la vérité, c'est que j'ai souvent pensé que cette ville n'était pas faite pour moi. Dans le même temps, ça me ferait chier de rentrer. Certains jours, soyons honnête ca me prend comme une crise d'urticaire. J'ai envie de courir chez ma mère ou comme avant, pouvoir dévaler la rue du Chemin Vert pour dix minutes plus tard me retrouver chez ma soeur, avoir le luxe d'improviser des apéros avec les amis, savoir qu'à n'importe quel moment je peux filer au cinéma me réconforter dans les bras d'un film qui ne serait pas un blockbuster. C'est une drôle de sensation de culpabilité qui parfois m'attrape par le poignet et me traîne ingratement.

J'ai peur du sentiment d'échec si on devait rentrer demain.

Pourtant il faut voir les choses en face. Oui l'expat est une expérience formidable mais personne n'a dit que ca allait forcément plaire à tout le monde. Vous savez le plus stupide? Tellement de gens semblent aduler Londres que je me suis souvent demandée si le problème venait de moi. J'ai un job décent, un toit que je ne partage pas, et pourtant je vais être franche, souvent je me fais chier comme un rat mort. Certains soirs, je rentre du boulot et ça me contrarie qu'ils ne vendent pas de compote au supermarché. Parce qu'en ce moment j'ai des putains d'envies de compote et que je suis trop fatiguée pour la faire. Alors je chiale. Je chiale pour une compote et aussi parce que j'ai envie de pommes noisettes. Et ils n'ont pas de pommes noisettes, ni de Picard.

J'ai fini par accepter que cette ville ne colle pas avec ma personnalité.

L'autre jour, alors j'étais aux urgences pour des raisons x et y, le doc m'a regardé dans les yeux et m'a dit: I know you're scared but it's in God's hands now.

A ce moment là, j'avais vraiment envie d'être dans les bras de ma mère.