Michel Onfray et le déclin de l'Occident

Ce matin dans le Figaro, on peut lire une interview de Michel Onfray et de François-Xavier Bellamy. Je n'ai gardé ici que les réponses de Onfray.

D'après lui, la civilisation occidentale est en train de mourir et va disparaitre; les lumières, la raison, la spiritualité chrétienne ; tout cela s'écroule sous le poids du néolibéralisme et de l'Islam.

Quel conseil donne-t-il aux jeunes? "Le bateau coule, restez élégant. Mourez debout.."

Tout cela est franchement pitoyable, et on se demande pourquoi donc avoir publié près de 50 livres si le seul conseil qu'Onfray peut offrir c'est celui de regarder notre civilisation disparaître et mourir ? Il aurait mieux valu ne pas toucher aux arbres qui ont servi à faire tous ses bouquins apparemment bien inutiles...

Je partage un constat : le retour de l'Islam pose un problème nouveau à nos sociétés occidentales. Mais penser que l'Occident va mourir et avec lui la raison et la spiritualité montre simplement qu'Onfray n'a pas compris - comment le pourrait-il de par sa position fermée à la spiritualité - le destin de l'Occident.

D'abord l'Occident doit continuer de promouvoir ses valeurs acquises de haute lutte comme la liberté, la sortie des religions, l'égalité entre homme et femme, la pensée critique, la démocratie. Il est hors de question de retourner en arrière dans le moyen-âge.

De plus l'Occident doit maintenant s'ouvrir à une nouvelle spiritualité dégagée des religions et qui n'abandonne pas les apports essentiels de l'Occident dont je viens de parler.  Telle est la prochaine étape que nous devons penser et préparer : l'ouverture à une conscience universelle, ouverture que la découverte de la raison universelle préparait au 18ème siècle. L'horizon de l'Occident ne peut être un matérialisme consumériste; il lui faut un surcroit de sens, une nouvelle vigueur .

jlr

"LE FIGARO. - Michel Onfray,dans Cosmos, le premier volume de votre triptyque philosophique,vous rappelez la beauté du monde. Nous ne la voyons plus?

Michel ONFRAY. - Nous avons perdu l'émerveillement. De Virgile jusqu'à la naissance du moteur, il nous habitait. Mais depuis, nous avons changé de civilisation: de leur naissance à leur mort, certains individus n'auront vécu que dans le béton, le bitume, le gaz carbonique. Des saisons, ils ne connaîtront que les feuilles qui tombent des quelques arbres qui restent dans leur rue. Il s'agit d'une véritable rupture anthropologique et ontologique: la fin des campagnes, la mort de la province et de la paysannerie au profit d'une hyper cérébralisation. Le vrai problème n'est pas l'oubli de l'être, comme disait Heidegger, mais l'oubli des étants qui constituent le Cosmos.

Faut-il être conservateur?

Michel Onfray :. - Ni conservateur ni réactionnaire. Contrairement à Alain Finkielkraut ou Éric Zemmour, je ne crois pas que nous puissions restaurer l'école d'hier ni même que ce soit souhaitable. Si je partage leur pessimisme concernant la destruction de la civilisation occidentale par le néolibéralisme qui dicte sa loi, je me distingue d'eux sur les solutions. On ne peut revenir en arrière, sauf à entrer dans une logique de dictature où l'on demanderait à un nouveau César de se couper totalement de l'Europe et du monde en restaurant les frontières. Cela ne me paraît ni possible ni souhaitable. La vérité cruelle est que notre civilisation s'effondre. Elle a duré 1 500 ans. C'est déjà beaucoup. Face à cela, je me trouve dans une perspective spinoziste: ni rire ni pleurer, mais comprendre. On ne peut pas arrêter la chute d'une falaise.

Le retour du religieux est-il une bonne nouvelle pour l'intelligence ?

M. O. - On pensait que la sortie de l'ère religieuse verrait la naissance de 1'« ère philosophique et positive » pour repren­dre le vocabulaire d'Auguste Comte. Il n'en est rien. Les gens préfèrent toujours des mensonges qui les rassurent à des certitudes qui les inquiètent. Néanmoins, je crois qu'on assiste moins au retour du religieux qu'à l'avènement de l'islam. Je ne suis pas sûr que le judaïsme ou le christianisme se portent très bien. Cer­tes, des chrétiens descendent dans la rue pour protester contre le mariage homo­sexuel, mais cela signifie-t-il pour autant la grande santé chrétienne, du moins en Europe ? Je ne crois pas...

Une civilisation se construit toujours avec une religion qui utilise la force. Si l'Église est tolé­rante aujourd'hui, c'est parce qu'elle n'a plus les moyens d'être in­tolérante. L'islam a aujourd'hui les movens d'être in­tolérant et ne s'en prive pas. Reste que c'est la spiritualité chrétienne qui a ren­du possible l'Occident. Aujourd'hui, une religion laisse la place à une autre reli­gion. Quand le pape François, dont le métier consiste à apprendre à la planète entière qu'il faut tendre l'autre joue, af­firme qu'il frapperait celui qui parlerait mal de sa mère, on se dit que le christia­nisme est mort ! L'islam qui lui succède fait l'économie de dix siècles de philoso­phie: quid du cogito, de la raison, de la laïcité, de la démocratie, du progrès? La raison disparaît quand la foi fait la loi. Et la disparition de la raison n'est jamais une bonne nouvelle...

Que dire à un jeune de 20 ans?

M. O. - Le bateau coule, restez élégant. Mourez debout..."