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Le Château des Pyrénées [Jostein Gaarder]

Publié le 08 avril 2015 par Charlotte @ulostcontrol_
Hello,
Je ne connaissais pas du tout Jostein Gaarder avant d'en entendre parler sur la toile, notamment avec le blog Sur la route de Jostein et les vidéos d'Hajar. Lorsque je suis tombée sur Le Château des Pyrénées à Gibert Joseph, je me suis dit que c'était l'occasion de découvrir enfin cet auteur.

Le Château des Pyrénées [Jostein Gaarder]Simple coïncidence ? Steinn et Solrun se croisent par hasard au milieu des montagnes norvégiennes, à l'endroit même où ils se sont aimés puis séparés trente ans plus tôt. Incapables de se parler face à face, ils échangent de longs mails. Deux conceptions du monde s'affrontent : le rationalisme de Steinn et la foi de Solrun. Lentement, ils essayent de comprendre ce qui les a séparés...

L'histoire est assez simple et assez romantique, puisque Jostein Gaarder nous raconte ici l'histoire de Steinn et Solrun : ils se sont connus, se sont aimés et se sont séparés. Alors que chacun a refait sa vie, ils se retrouvent des années plus tard dans un lieu qui a marqué leur histoire. Petit à petit, suite à ces retrouvailles, ils reprennent contact par mail : c'est un roman épistolaire 2.0 que nous propose ainsi l'auteur. Est-ce un hasard ou est-ce que cette rencontre était « écrite d'avance » ? Leurs démons refont surface, leurs conceptions différentes du monde s'affrontent dans leurs mails et ils redécouvrent les raisons pour lesquelles ils se sont aimés puis séparés.
Il y a pour moi deux dimensions dans ce roman, deux lectures possibles en quelque sorte. Dans un premier temps, on a l'histoire d'amour avortée de Steinn et Solrun. On s'identifie très facilement à eux, à leur histoire qui semble s'être arrêtée avec remous. On la devine d'abord à demi-mots, on lit entre les lignes de ce qu'ils veulent bien se dire et s'avouer, on comprend leur ressenti, leurs regrets, leur nostalgie. On comprend qu'ils idéalisent presque cette relation tout en la sachant impossible. On sent toute la spontanéité, tout le naturel de cette histoire, son côté pur et simple ; mais on sent aussi son impossibilité rationnelle, on devine qu'ils ne peuvent pas s'épanouir ensemble, que leurs univers voyagent en parallèle mais sans jamais se rencontrer.
Le Château des Pyrénées [Jostein Gaarder]
Au-delà de l'histoire d'amour, vous l'avez peut-être deviné, il y a donc la confrontation entre deux conceptions de la vie et de l'univers, l'affrontement entre deux philosophies. C'est la « deuxième dimension » du roman. Si Steinn est croyante, se fie aux signes et a une vision assez symbolique de ce qui l'entoure, Solrun est beaucoup plus terre à terre et rationnel. Leurs échanges de mails vont petit à petit se concentrer autour de ces deux visions du monde, l'un va chercher à expliquer à l'autre pourquoi il pense ainsi et vice-versa, mais malgré toute leur bonne volonté, on sentira rapidement que ces tentatives de convaincre l'autre sont vaines, que chacun d'entre eux campe sur ses positions. Leurs discussions sont intéressantes -que dis-je, passionnantes !, j'ai adoré voir leurs deux visions de la vie, suivre leurs argumentations et voir deux visions « classiques » du monde s'affronter : l'une rationnelle, suivant une approche environnementale et expérimentale, et l'autre plus divine et mystique.
« Je me souviens évidemment très bien du tableau de Magritte. Nous l'avions en poster, magnifique, dans notre chambre à coucher et je l'ai retrouvé sur Internet. Il a pour titre Le Château des Pyrénées et représente un monde qui flotte librement. C'est en tout cas l'interprétation que toi et moi en faisions. Nous étions des agnostiques, réfutant le raisonnement éculé comme quoi tout doit avoir une cause, donc il doit y avoir un « Dieu » qui a créé le monde. Il nous arrivait aussi de discuter pour savoir s'il y avait une instance à l'origine ou derrière ce que nous appelons l'univers. Mais aucun de nous ne croyait à une forme de « révélation » de forces supérieures. En revanche, nous étions en permanence stupéfaits du fait que le monde et nous-mêmes existions. » p.41
Ce qui rassemble ces deux dimensions, l'histoire d'amour et la confrontation entre deux visions du monde, c'est un événement qui leur est arrivé lorsqu'ils étaient sur la route et qu'ils se rendaient dans les montagnes norvégiennes, alors qu'ils étaient encore ensemble. Dès le début, on sait qu'il s'est passé quelque chose, mais aucun des deux ne semble vouloir aborder ce sujet le premier, tous deux semblent l'éviter, tourner autour, en parler sans le nommer. Cet élément met indiscutablement du suspens dans le roman, nous donne une bouffée d'air frais lorsque les discutions des héros nous semblent interminables voire indigestes : on revit, on redécouvre une deuxième histoire dans l'histoire grâce à cet élément plutôt mystérieux. La deuxième partie du roman se concentre alors plutôt sur la découverte de cet élément puisque Steinn va vouloir le re-raconter à Solrun pour essayer de le déchiffrer, de le comprendre...
« Tu ne dors pas, Steinn ? Tu es déjà debout, toi aussi ? En ces heures où je suis dans ma chambre jaune à me remémorer cette fameuse journée, j'ai besoin de te sentir près de moi. Nous étions convenus de ne jamais évoquer ce qui s'était passé là-haut dans la montagne, mais beaucoup d'eau a coulé sous les ponts et nous sommes déliés de cette promesse » p.157
Le Château des Pyrénées [Jostein Gaarder]
Ce roman est loin d'être un coup de cœur pour moi, il m'a parfois ennuyé, m'a parfois laissée dubitative. J'espérais peut-être plus de poésie dans ce roman, plus de rêve, en cela j'ai bien aimé la deuxième partie du roman, même si elle est peut-être arrivée trop tard. C'est peut-être un côté narration qui m'a manqué.  En revanche, j'aime beaucoup voir ce genre de réflexions dans les romans, voir plusieurs visions du monde s'affronter et essayer de déchiffrer le mystère de la vie et de l'Homme. J'ai aimé voir ces deux conceptions de la vie s'opposer et se challenger, voir l'auteur nous poser des questions sans y répondre. Ces questions qu'il nous pose sont d'ailleurs judicieuses et particulièrement touchantes puisqu'elles nous concernent tous, ou au moins nous ont tous concernés à un moment ou à un autre.
J'ai beaucoup apprécié la démarche de Jostein Gaarder, l'idée de faire réfléchir ses lecteurs autour de sujets essentiels et universels. Le thème qu'il aborde est touchant et je pense que nous sommes beaucoup à valser entre deux explications, à hésiter entre deux conceptions du monde, à être convaincu par l'une sans pour autant trouver l'autre ridicule. En cela j'ai adoré cette histoire, et j'ai encore plus apprécié le fait que Jostein Gaarder ne nous donne pas de solution toute faite et ne nous donne pas de réponse comme une leçon. Au contraire, il nous laisse avec le souvenir de ces deux conceptions qui s'opposent, mais avec l'impression paradoxale qu'elles se rejoignent et se complètent sûrement plus que ce que l'on veut bien penser.
Sans hésiter, je vous le conseille si vous aimez les romans qui font réfléchir et qui déstabilisent, qui nous interrogent sur notre condition humaine et le monde qui nous entoure, et si vous aimez les débats du type créationnisme VS évolutionnisme.
Avez-vous lu un ou plusieurs livre(s) de Jostein Gaarder ? Si oui, qu'en avez-vous pensé ? Quel autre livre de Jostein Gaarder me conseilleriez-vous de lire pour poursuivre ma découverte de l'auteur ? 

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