« Alors qu’il rejoignait l’extrémité de ce qui serait bientôt une farandole de demandeurs d’emplois, Augie fut surpris et consterné de voir que la femme juste devant lui avait un bébé endormi sur le dos. Les joues du bébé étaient rougies par le froid et chaque expiration était accompagnée d’un léger râle. A l’approche du souffle court d’Augie, la femme se retourna. Elle était jeune et assez jolie, même avec ses cernes noirs sous les yeux. »
10 avril 2009, un chauffard fonce dans une foule de demandeurs d’emploi qui attendent l’ouverture du City center, il tue huit personnes et blesse gravement des dizaines d’autres. La police est persuadée que c’est l’acte délibéré d’un sociopathe, mais pourquoi, alors que l’enquête piétine depuis plusieurs mois, ce petit frère de Norman Bates provoque-t-il l’inspecteur Bill Hodges, retraité depuis peu? Et Bill Hodges qui se morfond, vautré dans son canapé n’attendait que cela : reprendre du service en marge de l’enquête officielle.
Cela commence comme un roman social, Stephen King en une vingtaine de pages dresse un émouvant portrait de laissé-pour- compte, victimes de la crise des Subprimes ; le fantôme de Stenbeck plane sur ce formidable prologue. Reprenant ensuite les codes du thriller avec le métier et le talent qu’on lui connait, le romancier nous embarque dans une enquête étonnante où en véritable démiurge il manipule ses personnages et le lecteur.
Mères possessives, geek en manque de père, femmes bafouées, gamines hystériques devant un Boys band insipide, un marchand de crème glacées trop poli….
Si dans plusieurs années vos petits-enfants ou arrières petits-enfants (je vous souhaite de vivre très longtemps) vous demande : « dis Papy c’était comment l’Amérique au début du siècle » vous lui tendrez « Mr Mercedes » : « tiens lis ça, il y a tout dedans. »
Chronique de Michel D.