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La Soeur [Sándor Márai]

Publié le 26 avril 2015 par Charlotte @ulostcontrol_
Hello,
La Soeur [Sándor Márai]
J'ai découvert Sándor Márai par hasard : j'étais tombée sur Les Braises, le résumé m'avait bien plu et je n'avais pas été difficile à convaincre dans la mesure où la quatrième de couverture comparait l'auteur à Stefan Zweig. Lorsque j'ai ouvert ce premier livre, j'ai découvert un langage et une histoire qui m'ont beaucoup plu. Comme chez Zweig, les passions humaines sont mises en lumières et décrites avec beaucoup de justesse.
J'ai ensuite poursuivi l'aventure Márai avec L'Etrangère, qui a été une lecture plutôt étonnante : si je n'appréciais pas vraiment l'histoire au départ et n'accrochais pas à l'intrigue, la seconde moitié du livre m'a fait changer d'avis et la fin a achevé de me reconquérir. Je me suis donc enfin lancée dans la lecture de La Sœur qu'en est-il de ce troisième épisode de l'aventure Sándor Márai ?
« Ce qui est un véritable « événement » pour les hommes, ce qui découle inéluctablement des rapports entre eux, n'éveille jamais autant d'étonnement ni de terreur que la tension qui précède, que l'anticipation de l'horreur. » p.32
Nous sommes à la veille de Noël et les importantes chutes de neige empêchent le narrateur de quitter l'auberge dans laquelle il est pour rejoindre sa famille. Il rencontre ainsi les autres voyageurs présents à l'auberge et est particulièrement marqué par trois d'entre eux : un couple à l'attitude étrange, qui semblent s'intéresser plus aux faits divers qu'aux enjeux politiques majeurs de l'époque (nous sommes en plein pendant la seconde guerre mondiale !) et une de ses anciennes connaissances : Z., un pianiste très connu dont il n'a pourtant pas entendu parlé depuis longtemps...
Le narrateur renoue peu à peu avec ce certain Z. et profite de longues discussions avec lui pour l'interroger sur son activité : pourquoi ne joue-t-il plus ? mais Z. reste très vague sur les raisons de son absence : « Une maladie, répondit-il, simplement. Elle a un nom, un très joli nom. Mais ce n'est qu'une poubelle où on peut jeter toutes sortes de choses. La seule réalité est la maladie, rien d'autre. » (p.65) La neige passe et le narrateur quitte enfin l'auberge. Quelques mois plus tard, il apprend la mort de Z. et reçoit chez lui une enveloppe que le pianiste lui a laissée à sa mort : elle contient son manuscrit, jamais publié, et le secret de cette maladie...
La Soeur [Sándor Márai]
J'aime les détours que prend l'auteur pour nous amener vers le sujet, sa langue fluide et musicale, la modestie de ses personnages, leur honnêteté, leur mesure et la façon dont ils parlent de leurs passions. Le récit de La Sœur est assez dense et m'a parfois donné l'impression de manquer de souffle. L'auteur nous plonge dans la psychologie et dans le passé de son personnage sans prendre le temps de nous ménager ni de nous laisser respirer. Même lorsque les événement ne s'enchaînent pas rapidement, la tension et la douleur sont telles qu'on a l'impression de vivre à cent à l'heure. Paradoxalement, le dénouement final se fait quant à lui en douceur : on prend le temps de réfléchir, les douleurs et les passions qui ont précédé nous ont permis de nous purger de telle sorte que la fin, la délivrance paraît évidente et naturelle.
« Qu'est ce qu'on sait de la vie ? Rien de réel. On vit au milieu de représentations idéalisées, d'images de cartes postales. « L'amour » : mièvrerie, main dans la main sur fond de clair de lune, ou exhibition corporelle accompagnée de claquements de dents, joués ou véritables, dans une atmosphère moite, sous une lumière tamisée rouge : c'est ce que nous enseigne la littérature, ce qu'on nous montre sur les scènes de théâtre ou sur les toiles du cinématographe. D'un côté, il y a Béatrice, le grand amour de Dante, et de l'autre, ce qu'affirme Boccace, c'est-à-dire que Dante, en réalité, aimait les femmes à goitre. Que savons-nous de cette force qui fait tourner le monde, qui s'appelle l'amour et dont la raison d'être est la même pour l'humanité entière : celle d'accoupler les vivants et de féconder la substance terrestre ? Que savons-nous de la réalité de cette force ? » p.43-44
Cette troisième expérience de lecture avec Sándor Márai est donc une nouvelle fois assez convaincante, mais je ne suis pas sûre de lire un nouveau roman de cet auteur cette année (quoique... juste Les Confessions d'un bourgeois, peut-être ?). Je crois que je commence doucement à me lasser des auteurs européens ; ça fait des années que je ne lis que ça, mais je crois que la découverte récente des auteurs brésiliens m'a donnée une sorte de claque et que j'aspire maintenant à autre chose. J'ai besoin de plus. Avez-vous déjà ressenti cela : le besoin de plus, d'aller voir ailleurs ? Connaissez-vous Sándor Márai ? Avez-vous envie de découvrir cet auteur hongrois en lisant La Sœur ou un autre de ses livres ?

La Soeur [Sándor Márai]En 1939, un pianiste hongrois est hospitalisé à Florence, victime d'un mal mystérieux. Pendant trois mois, en proie à de grandes souffrances, il repense à la relation passionnelle qu'il entretient avec une femme mariée, tandis qu’au dehors la guerre se déchaîne. Réflexion subtile sur l'impuissance de l'artiste, l'amour instrument de vie et de mort, mais aussi sur le don de soi et la générosité qui sauve, La Sœur, écrit juste après Les Braises au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, est le dernier livre publié par Márai en Hongrie avant son exil. 


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