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L’exposition Velázquez, une visite qui se mérite

Publié le 28 avril 2015 par Lifeproof @CcilLifeproof

Le temps me manquait, mais je tenais absolument à voir l'exposition, qui se déroule en ce moment au Grand Palais à Paris. Visible jusqu'au 13 juillet prochain, je ne savais pas quand je retournerai dans la capitale ; j'ai persévéré dans mon objectif avec beaucoup de patience.

L’exposition Velázquez, une visite qui se mérite

Diego Velázquez, Les Ménines (détail), 1656, huile sur toile © Photo Madrid, Museo Nacional del Prado © Rmn - Grand Palais, Paris 2015

C'était la première fois que je visitais le Grand Palais et en arrivant, j'ai été surprise de constater qu'il y a plusieurs entrées ; chacune correspond à une exposition. Actuellement, vous pouvez voir celles sur Jean Paul Gaultier et les Icônes Américaines.

Et ce ne fut que le début, car après avoir trouvé la bonne entrée, j'apprends que pour les visiteurs n'ayant pas de billet - c'était bien entendu mon cas - il y avait entre 1h30 et 2h d'attente. Avec l'espoir que ce soit plus rapide, je me lance dans ma rangée. Malheureusement, j'ai eu tort ! Nous avancions de trois pas toutes les trente minutes, alors que pour les fils avec réservation et billets préachetés, une cinquantaine de personnes rentraient régulièrement. Certains s'impatientaient en râlant ouvertement, moi je me suis avancée dans ma lecture. Cependant, je ne pouvais que reconnaître qu'ils avaient raison : nous ne voulions pas rentrer gratuitement, mais payer un billet tout comme les autres ! Bref... tel un pèlerin attendant son tour pour toucher le saint des saints, je pénètre enfin dans le " sanctuaire " après avoir langui 1h30.

L’exposition Velázquez, une visite qui se mérite

Diego Velázquez, Portrait du pape Innocent X, 1650, huile sur toile © Photo Rome, Amministrazione Doria Pamphilj srl

L'exposition se déroule de façon chronologique : de ses débuts dans l'atelier de Francisco Pacheco jusqu'aux Velazquenos - les héritiers de l'artiste - en passant par ses séjours en Italie et ses influences, notamment mythologiques et le caravagisme. Mais ce qui marque l'œuvre de Diego Velázquez sont évidemment les portraits, qui font sa renommée.

Né à Séville en 1599, le portraitiste est connu pour être le peintre officiel du roi espagnol Philippe IV dès 1623. Le tableau le plus célèbre représentant la famille royale est sans conteste Les Ménines (1656), dans lequel un jeu entre le spectateur, les personnages et le décor opère une sorte d'interaction dynamique assez remarquable. En effet, cette œuvre est composée de plusieurs actions successives. L'artiste à gauche regarde le sujet de la toile, qu'il est entrain de peindre. Nous sommes le sujet du tableau, cependant le miroir au fond reflète le couple royal, qui est à notre place. La jeune infante, accompagnée de ses suivantes, interrompt le travail paisible du peintre, en arrivant au milieu de la pièce pour observer ses parents. Afin d'apporter de la luminosité à la peinture, la porte est entrouverte, laissant voir le chambellan gravissant l'escalier et jetant un petit coup d'œil à la scène. Celle-ci est saisie sur le vif, nous faisant découvrir l'intimité du travail artistique et de la famille royale.

Ce chef-d'œuvre, que tout visiteur souhaite voir dans cette exposition, n'est pas présent ; seule une reproduction de l'artiste Juan Bautista Martinez del Mazo, principal collaborateur de Velázquez, nous donne une idée de l'œuvre. Ce choix est justifié par le commissaire de l'exposition, Guillaume Kientz, en ces termes : " Les Ménines ne se déplacent pas, non seulement parce que le risque zéro n'existe pas, mais parce que plus qu'un tableau, Les Ménines sont un monument. [...] Les Ménines sont un monument de la peinture, un monument de l'art, un monument de l'histoire, un monument espagnol et les monuments on les visite, on va vers eux, on ne les déplace pas (ou en tout cas on ne devrait pas) ".

Toute fois, d'autres œuvres illustres sont exposées, comme le Portrait de l'infante Marguerite en bleu (vers 1659), La Forge de Vulcain (vers 1630), ou bien L'Immaculée Conception (vers 1617).

L’exposition Velázquez, une visite qui se mérite

Joël-Peter Witkin, 1939, Las Meninas, self-portrait, 1987, photo NB, 66x66 cm

Alors que Velázquez a été influencé par des peintres italiens - c'est une évidence pour son Portrait du pape Innocent X (vers 1650) dont la référence est le Portrait du cardinal Filippo Archinto (1558) de Titien - il est une source d'inspiration pour de nombreux artistes impressionnistes et contemporains, surtout pour Manet qui fut un adepte de son travail et qui le qualifiait de " peintre des peintres ". Reprenons le portrait du pape précédemment cité ! Une quarantaine de variations a été réalisée entre 1951 et 1965 par Francis Bacon. L'Étude d'après le portrait du pape Innocent X (1953) est bien plus sombre et inquiétant que celui de Velázquez. Semblable à un fantôme assis sur un fauteuil au centre d'une cage, le visage du pape est étiré dans un cri terrifiant. Le violet de la tunique met en valeur le jaune de l'assise et de la cage. Une sorte de voile recouvre le pape conférant davantage de distance entre le sujet et le spectateur, et accentuant la forme allongée du visage.

Autre tableau, autres artistes influencés. C'est d'ailleurs le cas pour Les Ménines. Pablo Picasso en a fait une série en 1957. Tantôt en noir et blanc, tantôt en couleurs vives, les toiles de Picasso préservent les éléments de l'original tout en faisant l'apologie du cubisme. Pour Joel-Peter Witkin, Las Meninas, self-portrait est le sujet d'une photographie, datant de 1987. Partisan du hors-normes, il fait le choix de modèles estropiés et de décors étranges. L'atmosphère de son œuvre peut à la fois déranger et fasciner, donnant une toute autre lecture de celle de Velázquez.

Provenant de différents musées internationaux, les œuvres offrent aux visiteurs une belle rétrospective. Malgré l'interdiction du Prado de prendre des photos, nous gardons en mémoires la virtuosité de l'artiste, façonnant les couleurs et le clair-obscur. D'un réalisme exacerbé, les portraits accrochent le regard et captivent nombre d'entre nous. L'exposition est une déambulation dans le temps, mais également dans le travail exemplaire d'un artiste éternel.

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Exposition Velázquez au Grand Palais, Galerie Nationales

Entrée Square Jean Perrin

Ouverture : dimanche et lundi de 10h à 20h

Du mercredi au samedi de 10h à 22h

Fermé le mardi et le 1 er mai

La nuit européenne des musées le samedi 16 mai entrée gratuite de 20h à minuit

Tarif normal : 13€

Tarif réduit : 9€


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