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[feuilleton] "Au fil du narré, #5", Daniel Pozner interroge Patrick Beurard-Valdoye

Par Florence Trocmé


 
Publication à partir du 1er avril 2015 d’un nouveau feuilleton, dans le cadre du travail entrepris simultanément par Poezibao et par remue.net, autour du « Cycle des Exils » de Patrick Beurard-Valdoye (dont le premier volume, Allemandes, est paru il y a trente ans).   
Patrick Beurard-Valdoye a donné le 6 mars dernier un récital à la Maison de la Poésie de Paris, suivi d’un débat passionnant mais peut-être un peu bref, d’où un sentiment d’inachevé. C’est sur ce sentiment d’inachevé que cette proposition a été bâtie : offrir à ceux qui étaient présents la possibilité de poser une (ou deux) questions à Patrick Beurard-Valdoye.  
Chaque mercredi, une ou des question(s) et la réponse de l’auteur.  
  
Cinquième épisode ce mercredi avec une question de Daniel Pozner 
 
 
 
Daniel Pozner & Patrick Beurard-Valdoye : échange de balles au filet 
 
Et le départ ? 
Des sources, orienté de l'avant vers les sources. Pas de départ dans un cycle. Permanence de l'exil. Seule embarque : la nacelle du lecteur.  
 
Au cœur ? 
Dès le périnée, via les salières de Vénus, droit, laisser monter énergiquement : suivre le flux. Gare : on laisserait passer facilement le sacrum. 
 
Au fil de l’eau ? 
Autant dire en nous, cours aux vaisseaux, fleurs de peau. Une ressource. Parfois le mal des rivières au tournant. 
 
Et la trouvaille ? 
Le fil conducteur, l'épreuve par la justesse. Le savoir nous détient, et le fait savoir par la trouvaille. 
 
Et le secret ? 
La nef. La récompense au bout du silence. Mise au secret. Une origine du monde vaut mieux que deux déjeuners sur l'herbe.  
 
Et le glissement ? 
Sans frottement. D'une année sur l'autre. 
 
Frôler ? Creuser ? 
Caresser. Carotter. 
 
Découper ? Inventer ? 
Prélever. Élever. Monter. 
Ligaturer.  
Faire se mieux co-incider. 
Adapturer. Récitcoller. 
Vocaluscrire. 
 
Et la dissonance ? 
Elle rime avec dissidence.  
Comme Harmonie du soir avec encensoir, reposoir et ostensoir.  
Selon certaines fréquences, atteindre la résonance. 
 
Et la concision ? 
L'advertance. 
 
Et l’épaisseur ? 
Le Dicht, du Dichter allemand. 
1) - Du mur : la montagne défiant la rembleur, atmée d'un sentier broussailleux dans une anse meusienne, avec Rimbaud d'Illuminations pour compagnon errant. Desiderius Erasmus Roterodamus en ligne de mire. 
2) - De l'espace : une cale sèche au port de Brest nuitamment, sous l'hélice d'un paquebot. Interdit, à force.  Segalen au large. Le Magnifique au manoir. 
3) - De l'enceinte : sur une île déserte norvégienne, dos courbé sous plafond bas, dans la bergerie merzée en cabane par Kurt Schwitters, devant sa couchette de 1,60 x 0,60 m. Et me demandant comment le géant s'y prenait pour dormir. Placenta. Arno Schmidt sur le rivage d'en face. 
 
Et l’humour ? 
Les Romantiques de l'Athenaeum lui préféraient l'ironie. Les Belges ont aussi leurs blagues parisiennes. Parfois après mes récitals, quelqu'un vient me dire qu'il aurait aimé rire mais n'a pas osé. 
 
Et l’étoile filante ? 
Davantage Poète de ligne que Météorologue. 
 
Et le détour ? 
L'essentiel dans la quête comme dans l'enquête, c'est l'expérience du cheminement. La conquête est proscrite. 
 
Et la marche à pieds ? 
Illusion de croire et mystification de faire croire, qu'on écrit de la poésie au rythme de la marche. Tout est à réécrire dès son scriptorium.  
 
Et le pied de nez ? 
Depuis des lustres, quand on me demande ce que je fais dans la vie : "poète". 
 
Et l’odeur du temps ? 
Certes, sans oublier Texture, Corti, Kléber, Tschann, Le monte en l'air ... Acheter un livre d'arts poétiques hors patrimoine est geste politique. 
L'odeur du temps aussi bien traversant ton Trois mots ; que (dernièrement) Voire de Maël Guesdon ; Reste d'hirondelle d'Ulrike Draesner ; ou Poésie possible de Michaël Batalla. 
Sans oublier le temps pédagogique quand les arts poétiques sont en odeur de sainteté, en particulier à l'École nationale supérieure des beaux-arts de Lyon. 
 


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