Magazine Culture

"Voir du pays" de Delphine Coulin

Par Secriture @SEcriture
"Voir du pays" de Delphine Coulin Aurore et Marine sont inséparables depuis le lycée. Elles ont vécu le deuil, les plages de Bretagne, les brimades, les problèmes familiaux. Ensemble. Alors, quand Marine s'engage dans l'armée à 17 ans, par dépit, provocation, dépression, Aurore la suit, un an plus tard. Quelques années ont passé. Les deux amies reviennent d'une mission de six mois en Afghanistan. Six mois de guerre. Six mois d'horreur. Six mois de souffrance. Avant de les rendre à leur mère patrie, l'armée les envoie trois jours sur l'île de Chypre, un sas de dépressurisation à mi-chemin entre l'Afghanistan et la France. Pendant ces trois jours, elles sont supposées se détendre, suivre des sessions thérapeutiques de groupe, oublier la guerre, le sable, le sang, avant le retour auprès de leurs proches.

Souvent avec les romans sur la guerre, le lecteur doit avoir le cœur bien accroché pour achever sa lecture. Avec Voir du pays, on peut s'attendre au contraire à un roman plus léger, plus féminin. Un roman facile en somme. Et bien non, bien au contraire. Delphine Coulin aborde le sujet très sensible des femmes soldates : leur motivation, leur place contestée dans ce monde ultra-masculin, les efforts qu'elles doivent fournir pour se sentir exister dans le bouillonnement guerrier. C'est à travers les yeux d'Aurore, sobrement désignée " elle " au fil du récit, que le lecteur fait la connaissance d'un petit groupe de militaires, au retour d'Afghanistan après six mois de mission. Les souvenirs pleuvent, se mêlent au présent, bâtissent un récit élégant.

Elle-Aurore et elle-Marine sont parfois presque indistincts. Elle parle d'elle. Elle évoque le passé d'elle. Qui est qui ? Les deux amies se fondent l'une dans l'autre, fusionnent, tel un être hybride, un être représentatif d'un ensemble indistinct : les femmes soldates. Comme si l'auteure ne voulait pas mettre de visage sur une idée, mais seulement faire réfléchir le lecteur sur un sujet lui tenant à cœur.

L'émotion est palpable du début à la fin. Delphine Coulin a su créer une ambiance propice aux révélations, aux secrets dévoilés. Les souvenirs d'Aurore se font écho, s'accumulent, retranscrivent un bout de vie. C'est beau est terrible à la fois. Doucement, tout doucement, la tension monte, page après page. Menant le lecteur, inexorablement, à une apothéose grandiose et poignante. Une fin puissante, aussi puissante qu'une bombe. Terrible. Et pourtant, la vie continue. Il faut revenir au quotidien, à la Bretagne tranquille. Mais Aurore, Marine, Fanny, Max et tous les autres, ne seront plus jamais les mêmes. Marqué(e)s à vie, mentalement, physiquement parfois.

Achevons ce court avis par une prise de conscience de la narratrice. Une lueur de compréhension qui fait mal, mais qui fait réfléchir :


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Secriture 741 partages Voir son profil
Voir son blog

Dossiers Paperblog

Magazines