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Night Musik – Transit

Publié le 19 mai 2015 par Hartzine

La première écoute de Transit ouvre une parenthèse sur une époque ingénue des 90’s au décor de piaule d’ado où quelques boucles et un kick en reverb sur FruityLoops en shareware édition 97 suffisaient à remplir des nuits entières d’extase musicale pubère. Mais ce premier album de Night Musik n’est pas un revival pour adulescents nostalgiques, c’est une ellipse. Vingt années de musique logicielle sont concentrées en six pistes balançant majoritairement entre techno, ambient et indus dans une approche aussi minimaliste qu’on peut l’être sans devenir chiant. Profitant de ses tournées avec feu Dirty Beaches dont il était le guitariste, Shub Roy a composé ses morceaux sur la route, en Transit, digérant l’influence des lieux visités pour en isoler une traduction ethnographique très personnelle aux legs stylistiques pluriels dont l’entretoise, parfois surprenante, solidifie un concept qui courait le risque d’être bancal. Ou banal.

Sorti récemment sur le label franco-japonais MIND Records (Femminielli, Jesse Osborn-Lanthier) déjà présenté dans ces colonnes, l’album est une parabole de l’insomnie, une musique déambulatoire où les mœurs nocturnes sont diluées dans une synthèse de références croisées. Le taylorisme introductif de Theme, qui dépouille les premières secondes du morceau de toute chaleur formelle, cède progressivement la place à une séquence d’ambient au tempo feutré tandis que Hard To Tell sécrète un flashback d’acid aux couleurs chaudes et tourbillonnantes. On dialogue avec Transit comme avec un ami versatile, entre confiance et prudence, dans un tête-à-tête sans conventions préétablies. En témoignent le long blanc de 30 secondes qui lance les 7’42 d’Eternal et son prologue psychédélique, tué avant développement mais sans violence par un beat techno à l’accélération progressive, aux couches multiples, hypnotisantes et jamais agressives.

Dans la sémiologie de Shub Roy, la cadence est importante: elle marque le pas d’une excursion allégorique dans des paysages sonores aux densités différentes, imprégnées des ambiances rencontrées. Le mysticisme industriel de Once A God dissimule sa légère influence kraut futuriste sous une épaisse rythmique modulée et des incantations inaudibles. Cette fois, le dieu ne sort pas de la machine, il en est la métaphore. Sans prétendre à une vraie approche novatrice de la musique électronique mais évitant toute resucée appliquée des influences actuelles, Transit est une digression ludique, un épiphénomène audacieux qui prend le risque, faible mais indiscutable, de se réapproprier des codes surexploités dans une approche aussi picturale que musicale. Sans tomber dans le piège du figuratif, Shub Roy écrit, avec Night Musik, la BO d’une série dystopique dont Transit est la première saison et où chaque épisode prend place dans un décor différent, et forcément nocturne.

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