« Tous les jours sont des nuits »
STAMM Peter
(Bourgois)
Drame shakespearien ? Il suffit pour s’en convaincre d’admettre ce préalable et à se référer au titre qui, à lui seul, donne sens au roman. Ce qui rend plausible l’interrogation. Tant il est vrai que les deux versants de l’histoire accréditent l’idée qu’en effet le drame se noue mais ne se conclut pas ou mal. L’histoire ? Celle d’une femme sans visage, Gillian, une gueule fracassée lors d’un accident de voiture, accident au cours duquel son mari a trouvé la mort. Gillian raconte sa longue et douloureuse reconstruction tout en évoquant ses souvenirs. Dont celui de sa rencontre avec Hubert, un peintre qu’elle avait interviewé pour le compte de l’émission culturelle (télévision) dont elle avait la charge. Puis elle laisse la parole à Hubert qui, quelques années plus tard, est invité à exposer dans une bourgade touristique des œuvres qu’il n’a pas encore créées. Là où il retrouve Gillian qui anime les activités culturelles proposées par une sorte de Club Med, activités réservées aux familles qui le fréquente. Là où ils noueront une liaison préfigurée lors de leur rencontre initiale, lorsque Gillian s’était proposée pour poser devant l’artiste, alors spécialisé dans la représentation du corps féminin.
Peter Stamm offre un récit habilement construit et non dénué d’intérêt. Le triptyque (les narrations successives de Gillian et d’Hubert, la conclusion revenant à Gillian) permet de comprendre les psychologies de chacun des protagonistes. Peut-être lui manque-t-il un peu de souffle, un zest de démesure pour que ce roman-là atteigne au tragique, à la dimension shakespearienne que laissait supposer le titre ? Le Lecteur reste en effet perplexe.