Magazine Culture

Elina Duni en chante le Sunside

Publié le 24 mai 2015 par Assurbanipal

Elina Duni

Paris, Le Sunside

Vendredi 22 mai 2015. 21h.

Elina Duni: chant

Colin Vallon: piano

Concert de promotion de l'album " Dallendyshe ". En présence de Son Excellence Monsieur l'ambassadeur d'Albanie en France.

Colin commence à travailler dans les cordes du piano, avec un son de psalterion. Cela colle très bien avec le style de chant d'Elina Duni qui vient du chant traditionnel albanais. Malheureusement, il y a un micro au dessus du piano et un autre pour la chanteuse alors que ni l'un ni l'autre ne sont utiles pour cette musique acoustique dans une petite salle. Pire encore, cela métallise les sons. Malgré ces détails techniques, Elina Duni nous transmet ses émotions même pour un non albanophone comme moi.

Sans la pulsation de la contrebasse et de la batterie, les chansons sont plus austères que sur l'album " Dallendyshe ". Colin Vallon triture son piano. Nous partons en voyage au pays des aigles, l'Albanie. D'ailleurs, Elina Duni vit dans un autre pays de montagne, mais sans accès à la Mer, la Suisse. Dans cette salle étroite, avec un simple 1/4 de queue pour piano, ils élargissent notre espace vital.

Elina Duni explique ses chansons pour les non albanophones. D'abord une chanson du Kosovo puis une chanson d'Albanie.

Dans son jeu de scène, elle ne cherche pas à jouer la star qui vampe le public. Elle l'envoûte par sa voix et sa présence.

Colin reprend ses bruitages dans le corps du piano. Le chant est proche du scat mais en version balkanique. Colin se remet au clavier. Pulsation et émotion. C'est proche de la transe mais sans que cela devienne répétitif. Quelques mots en albanais pour ceux qui le comprennent. C'est une chanson du Sud de l'Albanie qui raconte l'histoire d'une jeune fille qui doit aller loin pour se marier et chante son exil à sa mère (en littérature, cela donne " Qui a ramené Doruntine ?" de l'Albanais Ismaël Kadaré).

Une chanson du Nord de l'Albanie. Une femme revient à la maison après que son mari l'ait quitté pour partir vivre à l'étranger. Les voisins lui disent qu'il reviendra mais il ne reviendra pas. Une chanson triste sur l'exil.

Une chanson sur une ville très ancienne du Nord de l'Albanie, Skoder. Cela parle d'un amoureux qui n'ose pas déclarer sa flamme à sa bien aimée. Colin Vallon joue des percussions sur son piano. C'est joyeux, rythmé. Il y a une influence du chant oriental dans celui d'Elina Duni. 400 ans d'occupation ottomane ont laissé des traces. Fin surprise.

Chanson kosovare des années 60. Une femme demande à la lune de l'aider à trouver son amant, perdu dans la nuit. Situation délicate vous l'avouerez lectrices sensuelles, lecteurs sensibles. Une ambiance nocturne s'est installée. Le pianiste joue main gauche sur le clavier, main droite dans les cordes du piano. C'est lunaire. Pas plus que l'Italie, le Kosovo et l'Albanie ne peuvent se résumer à leurs mafias. Elina Duni en est une preuve vivante. Sa façon de danser et de chanter est tout à fait orientale. A la fois sensuelle et inaccessible comme la bayadère dans l'imaginaire occidental (voyez les tableaux des Orientalistes).

PAUSE

Le pianiste commence en jouant du piano, pour changer. Une sorte de Blues assez classique.

" Les bergères " (titre traduit en français) vient du précédent album d'Elina Duni " Matane Malit "( " Au delà des montagnes " en version française). C'est une chanson féministe qui se moque des hommes et de leur ordre patriarcal.``

" Dallendyshe ", chanson titre du nouvel album. L'hirondelle en français. Chanson des Albanais de Calabre et de Sicile arrivés là pour échapper à l'invasion ottomane au XV° siècle. C'est une chanson de l'exil qui dit à l'hirondelle qu'au printemps prochain, à son retour, ils ne seront plus là pour l'accueillir. Cette communauté existe toujours avec son albanais aussi différent de celui d'Albanie que le français du Québec de celui de France, son culte orthodoxe et sa musique. Mélodie triste et lente ce qui est logique vu le sujet. Ces Albanais venaient d'une région de Grèce appelée Morée au Moyen Age, aujourd'hui le Péloponnèse. Je reconnais d'ailleurs les mots " Morée " et " Italie " dans le chant d'Elina Duni. Je progresse en albanais.

Elle entame seule une chanson joyeuse, légère. Le piano la rejoint dans une belle mélodie sinueuse. En fait, c'est la chanson triste d'un homme qui quitte sa femme pour partir en exil.

" La brise du printemps " qui rend les jeunes hommes fous quand ils attendent les jeunes filles sous les mimosas en fleurs. Une chanson des années 1960 mal vue dans l'Albanie communiste d'alors car trop Jazz et trop sensuelle. La brise se fait tempétueuse. Le feu de la passion embrase les coeurs juvéniles.

Pour finir, deux chansons de Tirana qui traitent de la beauté et des femmes. " J'ai eu trois consolations en ce monde : la prière, les parfums et les femmes " (Je vous laisse trouver l'auteur de cette citation, lectrices subtiles, lecteurs érudits).

Très belle chanson qui m'emporte très loin immédiatement. Le piano joue classiquement. Ce n'est pas une capitale qui me vient à l'esprit mais les vers d' Arthur Rimbaud: " Elle est retrouvée. Quoi? L'Eternité. C'est la mer allée avec le soleil ". Le piano tempête alors que la voix décolle. Fin surprise.

Une chanson joyeuse comme une jeune fille en fleur pour finir. Même M. l'ambassadeur sort de sa réserve diplomatique pour hocher la tête en mesure. Bel envoi final.

RAPPEL

Le public l'a demandé et mérité.

" C'est une chanson joyeuse-triste. Très albanais " dit Elina Duni. C'est très russe aussi. Pensez à " La joie souffrance " de Zoé Oldbenbourg ou au son de Stan Getz. C'est la chanson d'un amour qui n'est pas malheureux mais qui sonne triste. Effectivement, ça sonne triste. Colin Vallon joue des percussions dans les cordes du piano. Je pense qu'il y a un bidule électronique caché dans le piano pour produire ce son continu en arrière plan. Le pianiste se remet au piano alors que la voix s'envole. Ca sent bon la Mer Méditerranée sous la brise d'été.

La photographie d'Elina Duni est l'oeuvre du Resplendissant Juan Carlos HERNANDEZ. Toute utilisation de cette oeuvre sans l'autorisation de son auteur constitue une violation du Code de la propriété intellectuelle passible de sanctions civiles et pénales.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Assurbanipal 3096 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines