J’ai déjà eu l’occasion de publier sur ce blog le poème Ondine d’Aloysius Bertrand, tiré du fameux recueil de poèmes en prose Gaspard de la Nuit, et qui avait inspiré à Maurice Ravel une belle pièce pour piano.
J’ai donc décidé de publier aujourd’hui le poème Scarbo, tiré du même recueil, et qui a inspiré à Ravel en 1908 un morceau pour piano moins « aquatique » qu’Ondine et beaucoup plus heurté et nerveux, comme vous pourrez le constater en comparant les deux pièces.
Scarbo est, dans le recueil de Bertrand, un gnome maléfique qui réapparaît dans plusieurs autres poèmes.
Scarbo
Oh! Que de fois je l’ai entendu et vu, Scarbo, lorsqu’à minuit la lune brille dans le ciel comme un écus d’argent sur une bannière d’azur semée d’abeilles d’or !
Que de fois j’ai entendu bourdonner son rire dans l’ombre de mon alcôve, et grincer son ongle sur la soie des courtines de mon lit ?
Que de fois j’ai l’ai vu descendre du plancher, pirouetter sur un pied et rouler par la chambre comme le fuseau tombé de la quenouille d’une sorcière.
Le croyais-je alors évanoui? Le nain grandissait entre la lune et moi, comme le clocher d’une cathédrale gothique, un grelot d’or en branle à son bonnet pointu !
Mais bientôt son corps bleuissait, diaphane comme la cire d’une bougie, son visage blêmissait comme la cire d’un lumignon, – et soudain il s’éteignait.
Aloysius Bertrand
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Et voici maintenant le morceau de Maurice Ravel inspiré par ce poème :