
On m’ordonne de penser par moi-même. Je m’oblige à évacuer toute source d’opinion dans mon esprit. Je veux saisir ma liberté, briser les chaînes qui me soumettent, abattre les murs qui me claustrent.Manque d’énergie. Totale platitude de mon pays mental. Voyage épris de lenteur. Un jour, je ne serai plus que de l’air comprimé dans un flacon. Vous me vaporiserez, et je me dissiperai. Aussi vain et inutile que le néant, je ne rirai plus, ne pleurerai plus, n’aimerai ni ne haïrai plus. Je serai la négation de tout ce que je peux imaginer. Un jour… Mon point de vue. Magnifiquement vital et central à mes yeux. Sombrera au fond de l'océan. Depuis mon enfance, je vois à travers mes yeux, j’entends à travers mes oreilles, je suis au centre de mon domaine, sur la colline, je domine les alentours d’un regard majestueux, tous les sujets m’honorent. Je voudrais me convaincre de mon infaillibilité, de ma haute valeur morale, de ma force chevaleresque.Un masque de plus en plus lourd à porter. Vous qui si souvent m’avez aimé. J’emploie, vous l’aurez remarqué, le passé composé. Tout espoir est-il perdu ? Je m’égare dans un dédale sans fin, je me résigne à ne plus trouver la sortie. Devrais-je simplement me laisser choir sur un banc, et accepter l’engourdissement graduel de mon être ?Tel est le douloureux fardeau des hommes… et dire qu’on s’échine à nous pousser à la révolte ! Je suis né poussière, et je redeviendrai poussière. Personne en ce monde ne sera plus fort que la mort.