« Le BIM est l’opportunité d’affirmer notre pertinence »

Bouygues Construction est fortement engagée dans la transition numérique de ses activités. Le partenariat qui vient d’être signé avec le Technopôle Domolandes prévoit notamment le développement d’outils de réalité virtuelle et une expérimentation plus large du BIM (Building Information Modeling). Trino Beltran, directeur open innovation et construction durable, nous en dit plus sur cet outil qui révolutionne le secteur du BTP.

Trino Beltran © Yves Chanoit

Où en est aujourd’hui Bouygues Construction dans le déploiement du BIM ?

Nos réflexions sur le BIM ont commencé très tôt, dès 2007, et nous l’avons déployé sur nos chantiers à partir de 2009, avec un premier projet entièrement réalisé en maquette numérique : l’hôpital Jim Pattison à Surrey, au Canada. Nous l’avons développé en parallèle de nos concurrents anglo-saxons très en pointe sur le sujet, et en avance par rapport aux acteurs français de la construction. Aujourd’hui, le BIM de niveau 2 – ou maquette numérique collaborative – est en cours de généralisation dans tous nos métiers. Nous anticipons les évolutions du marché : s’il n’y a pas encore de réglementation en France, dès 2016, tous les bâtiments publics devront être livrés en BIM au Royaume-Uni, une directive européenne est en cours de préparation pour 2017 et Singapour a déjà franchi le pas. Notre objectif est de développer le bon outil en fonction de la demande, des moyens et des partenariats mis en place. Le BIM n’est pas un risque mais une opportunité. Il offre la possibilité d’affirmer la pertinence des constructeurs français et de leur écosystème de partenaires.

Concrètement, quels sont les avantages du BIM dans le travail des équipes au quotidien ?

J’y vois deux attraits principaux : une meilleure efficacité du travail sur le chantier et une relation de confiance accrue entre les différents partenaires impliqués sur un projet. Le BIM est un moyen unique et simple de partager toutes les informations d’un ouvrage. Nous avons construit une salle de coordination dans laquelle nous menons des réunions qui rassemblent architectes, bureaux d’études, équipes travaux et clients pour des séances de co-engineering.  Chacun suit en direct les avancées sur la maquette, les ajustements se font en temps réel et le niveau de confiance s’en trouve renforcé, le même support étant partagé entre tous. Ces sessions de deux à trois jours nous font gagner jusqu’à un mois de design classique ! Pour le client, le bénéfice est non négligeable : la simulation du bâtiment offre un niveau de visualisation du résultat final impossible à obtenir avec un plan classique. A partir du BIM, nous développons également des outils rendant accessibles toutes les informations aux compagnons sur les chantiers et qui leur permettent de mieux anticiper les différentes phases des travaux.

Quelle est la prochaine frontière à franchir ?

L’objectif à terme est d’aboutir à « l’open BIM », un moyen d’échanger quel que soit le logiciel utilisé. Cela nécessite la définition d’un langage commun entre les différents outils disponibles sur le marché, capable de traduire toutes les informations produites par chaque partenaire et de les agréger. Nous soutenons activement sa création et nous avons d’ailleurs participé à l’élaboration de la norme AFNOR définissant un code unique pour tous les objets de la construction qui peuvent être intégrés dans la maquette numérique. Nous devons aussi envisager le pendant de cette démarche et trouver le moyen d’extraire les informations nécessaires aux fournisseurs et partenaires qui ne peuvent pas s’équiper de logiciel ou qui n’en ont pas l’utilité. Il faudra se mettre au niveau de chacun dans « l’open BIM ».

Propos recueillis par Jessica Swiderski