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Le cinéma marocain ose à peine dire « je t’aime » et hésite à dire « ken bghik »

Par Cinemasfi

Les Journées Cinématographiques de Safi ont clôturé leur 3ème édition. Elles avaient pour thème cette année " Cinéma et Imaginaire ". Le Pr. Rachid Naim , instigateur des Journées, avait invité le réalisateur Faouzi Bensaidi à faire une pause sur l'univers de son film What a Wonderful World . Une oeuvre majeure dans l'histoire du cinéma en général, et marocain en particulier, pourtant passée mystérieusement relativement inapperçue.

Plein de modestie malgré son immense talent, il avait représenté le Maroc à Cannes en 2003 avec Faouzi Bensaidi est tout simplement venu à la rencontre et à l'écoute du jeune public safiot. Pour rappel, Mille Mois avant de sortir en 2006 son second long métrage What a Wonderful World . Deux films que les étudiants ont eu la chance de voir durant ces deux derniers jours.

Le cinéma marocain ose à peine dire « je t’aime » et hésite à dire « ken bghik »

L'intervention du réalisateur était introduite par le Pr. Rachid Naim qui fit de What a Wonderful World une lecture " postmoderne ". En effet, le film de Faouzi Bensaidi est truffé de références au cinéma lui-même et aux films qui ont marqué le metteur en scène marocain. Il est aussi une réponse à son époque. Le Pr. Naim remarque ainsi que " La plus belle réponse au 11 septembre, c'est celle de Faouzi Bensaidi quand son personnage principal, Kamal, le tueur à gages, fait voler un avion en papier devant les Tours Jumelles de Casablanca et les évite ". Malgré sa richesse visuelle et artistique, le film a eu très peu de prix dans les festivals nationaux et étrangers. " Le film n'est pas reconnu dans les festivals internationaux car les Occidentaux s'attendent à des films folkloriques et non pas modernes et urbains ", analyse le Pr. Naim. Là aussi, c'est l'imaginaire qui est mis en cause. Celui des sélectionneurs des festivals internationaux, déroutés par un film qui rompt tous les clichés et qui devient inclassable.

Le cinéma marocain ose à peine dire « je t’aime » et hésite à dire « ken bghik »

Le réalisateur commente d'aiilleurs : " La question de l'identité se pose très violemment aujourd'hui au monde arabo-musulman. Nous, les cinéastes du Sud, on nous demande toujours de montrer notre " carte d'identité ". Aujourd'hui, si un réalisateur américain fait un film à l'étranger, personne ne lui pose de questions. Mais à moi on me demandera toujours " est-ce marocain ? " Moi j'ai résolu cette question car je porte ma marocanité dans mes gênes. Mon film est décomplexé. C'est un film sur la mondialisatioan au Maroc et en même temps un film qui revisite l'histoire du cinéma. " Et avec son second long-métrage, Faouzi Bensaidi a radicalement posé son style. Un style patchwork, bourré de références cinématographiques mais aussi de souvenirs tout droit tirés de son enfance. Il constate d'ailleurs, " Etre réalisateur, c'est très facile. C'est celui qui ne sait rien faire. Il suffit d'avoir une bonne équipe et on a un produit. Mais ce produit porte-t-il un imaginaire ? Le bon cinéma se joue là ! Il y a beaucoup de réalisateurs dans le monde mais peu d'artistes. "

Le cinéma marocain ose à peine dire « je t’aime » et hésite à dire « ken bghik »

Mais alors . Il était absent également de la Croisette alors que tout le monde s'attendait à une sélection Cannoise en 2006. Le film, présenté dans une version provisoire, a indubitablement dérouté les sélectionneurs de Cannes qui s'attendaient à un autre " y a-t-il un imaginaire cinématographique marocain ? " demande un étudiant. S'il y a un imaginaire marocain, il est puisé dans le vécu des réalisateurs et dans le cinéma international plus que dans le cinéma marocain lui-même explique le Pr. Rachid Naim: Festival National Mille Mois. Aucun doute cependant, si Bensaidi avait été Coréen, il aurait été en compétition avec de bonnes chances de gagner... Décidémment, les frontières sont imaginaires!
" il n'y a pas de père fondateur du cinéma marocain. On parle souvent de Bennani mais il n'a pas créé de tradition après lui. Le cinéma marocain ne fait pas d'autoréférence, contrairement au cinéma égyptien. " Et Faouzi Bensaidi de confirmer, " au Maroc, nous avons la chance de ne pas avoir de père à tuer. Cela nous donne une grande liberté créative. " La question se pose désormais de savoir si la génération actuelle ne va pas porter ce poids de la fondation. Car le défi est justement de créer ces références marocaines. Le cinéma marocain, à l'instar de Kamal, le protagoniste de WWW, commence seulement à oser dire " je t'aime ", et hésite encore à dire " ken bghik ". Pour Bensaidi, pose timidement un constat, " Je trouve que notre paysage cinématographique est très sage. J'attends que des gars de 22 ou 24 ans viennent nous donner des coups de pieds et nous faire chavirer. Au Maroc, il y a une dynamique. J'espère qu'elle n'est pas menacée car de vraie question ne se posent pas et on est en train de se formater. "
Une chose est sûre en tout cas, si le cinéma marocain suit la voie ouverte par des réalisateurs comme Faouzi Bensaidi, il risque de faire éclater les cadres. Reste à savoir si ce cinéma sera reconnu au Maroc et hors frontières. Faut il rappeler que WWW n'a reçu aucun prix au dernier


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