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Le conformiste - 6/10

Par Aelezig

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Un film de Bernardo Bertolucci (1970 - Italie, France, Allemagne) avec Jean-Louis Trintignant, Dominique Sanda, Stefania Sandrelli, Gastone Moschin, Enzo Tarascio

Hommes de glace, film de glace.

L'histoire : Italie, années 30. Marcello Clerici s'engage dans le fascisme comme on entre en religion. Profondément désireux d'être un citoyen normal, qui ne fait pas de vague, à qui l'on ne peut faire aucun reproche, il veut servir son pays et donc ceux qui le dirigent, peu importe leurs idéaux. De la même façon, il épouse Giulia, qu'il n'aime pas réellement ; elle est un peu futile, superficielle, mais elle est jolie, fera une excellente épouse, une excellente mère, de quoi montrer l'image d'un couple et d'une famille parfaits. Le parti, impressionné par le zèle de leur nouvelle recrue, lui confie une mission : aller tuer à Paris son ancien professeur, fervent anti-fasciste réfugié en France.

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Mon avis : C'est un très beau film, visuellement, très arty. Les images sont composées et millimétrées comme autant de peintures modernes. Sur certaines scènes, l'onirisme fait carrément loi (l'asile par exemple). La froideur implacable du héros et du propos se retranscrit dans cet univers de béton, de marbre, des pièces toujours immenses, démesurées, des rues vides, où l'homme tout petit n'est plus qu'une petite fourmi. Mais comme les vraies : pion clé dans la fourmillère, elle accomplit son travail et elle pique ceux qui la dévient de son objectif.

Néanmoins, tant de cynisme, de glace, de confusion aussi sur les intentions, m'ont empêchée d'entrer vraiment dans le film. Heureusement Stefania apporte un peu de vie et de gaité dans ce monde sinistre.

Le scénario et la soi-disant dénonciation politique ne m'ont pas vraiment touchée. Lorsqu'on apprend que Clerici a eu des parents quelque peu extravagants et qu'il a été abusé sexuellement enfant, et que tout son comportement, son envie d'être "normal" vient de là... OK, mais quel cliché ! Tous les nazis, tous les fascistes, sont-ils tous des enfants traumatisés ? Il aurait été préférable de montrer un type sans histoire, psychotiquement froid, et à même d'expliquer que ces bourreaux étaient plus des psychopathes que des pauvres mômes maltraités, ce qui nous donne une fâcheuse envie de "pardonner" toute la suite de leur comportement.

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D'autant que le gars, qui a voulu se marier également pour être "comme tout le monde", se noyer dans la masse... tombe immédiatement amoureux de la femme de sa cible. Pour un type qu'on nous présente comme asocial, je le trouve moi bien "normal" justement... Idem pour l'épouse : présentée comme une sotte petite bécasse, on apprend qu'elle aussi a été victime d'abus sexuels quand elle était jeune, mais elle le raconte avec une telle désinvolture qu'on se demande si elle n'a pas trouvé ça épatant. Ce qui par là même dédramatise ce qu'a vécu son mari ! Plus Anna qui s'avère fort attirée par les femmes... homo (ou bi)sexualité qui nous renvoie à l'enfance de Marcello : tout ce qu'il exècre. Bref, on s'y perd !

Du coup, politiquement parlant, le message ne passe pas, il est noyé dans plein d'autres sentiments, se perd sur d'autres pistes, et si Bertolucci a voulu dire quelque chose, j'ai pas trop pigé. Le thème du type qui en devenant "mouton" se préserve de toute responsabilité était intéressant pourtant. Il aurait pu en faire quelque chose de bien plus fort, et d'assez inédit. Le "mouton" est un phénomène de société qui me passionne et qui n'est jamais (si vous avez des exemples, faîtes le moi savoir, je suis preneuse !) traité au cinéma.

Pour le reste, la dénonciation du fascisme reste très brumeuse et impalpable...

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Reste la beauté de la réalisation, le portrait d'un homme ambigu, la prestation parfaite de ce beau gosse de Trintignant et du charme de Stefania Sandrelli. Par contre, je n'ai jamais apprécié Dominique Sanda, muse de Bertolucci ; je trouve qu'elle joue mal.


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