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J'ai tant rêvé de toi que tu perds ta réalité.Est-il encore temps d'atteindre ce corps vivantet de baiser sur cette bouche la naissance de la voix qui m'est chère?J'ai tant rêvé de toi que mes bras habituésen étreignant ton ombre à se croiser sur ma poitrinene se plieraient pas au contour de ton corps, peut-être.Et que, devant l'apparence réellede ce qui me hante et me gouvernedepuis des jours et des années,je deviendrais une ombre sans doute.O balances sentimentales.J'ai tant rêvé de toi qu'il n'est plus temps sans doute que je m'éveille.Je dors debout, le corps exposéà toutes les apparences de la vie et de l'amour et toi, la seule qui compte aujourd' hui pour moi, je pourrais moins toucher ton front et tes lèvresque les premières lèvres et le premier front venu.J'ai tant rêvé de toi, tant marché, parlé, couché avec ton fantôme qu'il ne me reste plus peut-être,et pourtant,qu'à être fantôme parmi les fantômeset plus ombre cent foisque l'ombre qui se promèneet se promènera allègrement sur le cadran solaire de ta vie. Quelques traces de craie dans le ciel,Anthologie poétique francophone du XXe siècle