Pâris, nous connaissons surtout son rôle de juge dans l’histoire de la pomme d’or, et dans l’enlèvement d’Hélène, causes de la guerre de Troie. Mais avant cela, il a une histoire. Lorsqu’il naît, son père Priam, roi de Sparte, a déjà des mots avec les Grecs, entre enlèvement de sa soeur et négociations sanglantes. Sa soeur Cassandre et sa mère Hécube ont des visions qui annoncent le destin du nouveau né: causer la chute de Troie. Priam envoie alors un de ses hommes tuer le nourrisson, mais celui-ci l’épargne et l’élève comme son fils, sous le nom d’Alexandre. C’est alors qu’Eris, la déesse de la discorde, lance sa fameuse pomme et qu’il est choisi, lui, pour départager Héra, Athéna et Aphrodite en terme de beauté. Malgré leur promesse de ne rien dire pour l’influencer, elles défilent l’une après l’autre devant lui, lui font miroiter des merveilles… Plus tard, il se rend à la cour pour récupérer un taureau, et surpasse en vigueur tous les fils du roi Priam. Les masques tombent et le chemin vers Hélène est tout tracé.
Dans l’histoire de la guerre de Troie, il y a souvent les héros et les méchants. Pâris fait partie de ceux qui auraient peut-être mieux fait de se casser une jambe un certain jour de leur vie. Mais si l’on regarde bien, lui qui a l’étiquette de responsable dans la guerre, finalement, a vu beaucoup des événements de sa vie décidés sans lui. C’est le parti pris de cette pièce de théâtre, qui commence avec sa naissance et finit avec sa mort. Et on rappelle que les Grecs et les Spartiates n’ont pas attendu son arrivée pour se regarder de travers et s’enlever leurs femmes comme moyen de pression. Que les trois déesses se sont livrées sur lui à un chantage implacable pour régler leur litige esthétique. Que reprendre sa place de prince perdu n’a jamais fait partie de ses projets. Que finalement, son seul véritable choix a été l’amour et surtout le bonheur.
Vous l’aurez compris, j’ai totalement adhéré à cette image de Pâris que l’on nous propose. Certes, il enlève Hélène: mais en réalité, c’est elle qui décide de le suivre, par amour. La scène où elle s’y décide est d’ailleurs, à mon sens, une des plus réussie de la pièce, une des plus émouvante aussi. J’ai surtout eu le sentiment qu’il n’était pas à sa place dans ces intrigues de rois: son humilité et sa fidélité lorsque ses propres frères souhaitent sa mise à mort, et notamment un Hector à l’ego bien malmené par un simple berger, sont poignantes. Il représente un idéal pastoral projeté dans un conflit qui le dépasse, qui lui est antérieur et donc il n’est que le jouet, un des rouages d’une infernale machine qui doit briser Troie la trop belle et trop luxueuse et en cela, il est profondément tragique.
Jouet des hommes, mais aussi jouet des Dieux. Entre chaque acte, qui sont autant de tableaux de sa vie, ils apparaissent, tirent sur leurs ficelles, assistent au spectacle, s’en veulent entre eux et en veulent eux aussi à cette Troie qui les nargue. Apollon et Hermès aiment se mêler aux hommes, les observer de plus près, notamment Apollon qui ne s’éloigne pas de sa chère petite Cassandre. Ils donnent à ces humains qui se débattent avec le destin une fragilité certaine.
La note de Mélu:
Une jolie découverte. Merci à Babelio et aux éditions “Il était un EBook” pour cette lecture.
Un mot sur l’auteur: Mathieu Arnaud est un dramaturge français qui a fréquenté le cours Florent avant de se tourner vers l’écriture.
Pâris, le choix des autres Mathieu Arnaud tous les livres sur Babelio.come
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