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Victoria (2015), un voyage au bout de la nuit époustouflant

Par Bullesdeculture @bullesdeculture

Victoria (2015), un voyage au bout de la nuit époustouflantUn plan-séquence de 2h14, c'est l'argument principal de Victoria, dernier film de Sebastian Schipper, réalisateur allemand, auteur du fameux Cours, Lola, Cours (1998). D'ailleurs, Victoria vient de rafler les plus prestigieux Lolas - les équivalents allemands des Césars - après avoir été le film le plus primé de la dernière Berlinale.

Synopsis : 5h42. Berlin. Sortie de boîte de nuit, Victoria (Laia Costa), espagnole fraîchement débarquée, rencontre Sonne (Frederick Lau) et son groupe de potes. Emportée par la fête et l'alcool, elle décide de les suivre dans leur virée nocturne. Elle réalise soudain que la soirée est en train de sérieusement déraper...

Dès les premières images, le spectateur est plongé en immersion dans la nuit berlinoise, scènes épileptiques à l'appui, où dans une boîte, Victoria danse sur de la musique électro, en buvant des shots au bar.

En sortant, elle rencontre Sonne et trois de ses amis : Boxer (Franz Rogowski), Fuss (Max Mauff) et Blinder (Burak Yigit, également à l'affiche de Mustang en ce moment). Plutôt sympas et très imbibés, ils promettent à Victoria de lui faire découvrir la véritable vie berlinoise. L'alcool aidant, elle suit les jeunes hommes dans les rues de la ville.

Raconter la suite des pérégrinations serait spoiler, d'autant plus que l'intérêt du film tient clairement plus dans la prouesse technique de l'unique plan-séquence que dans son scénario.

Comme au théâtre, les acteurs ont d'abord répété pendant deux mois, avant de se lancer dans les représentations/prises. C'est la troisième qu'a choisie Sebastian Schipper - alors que, selon les dires des acteurs lors de l'avant-première, la deuxième était la meilleure ! - Aura-t-on la chance de voir cette version dans les bonus du DVD ?

Cette absence totale de coupe pendant près de 2h20 oblige les acteurs à offrir un jeu intense, naturel, qui ne laisse pas le temps de réfléchir. Ce qui donne lieu à quelques improvisations : par exemple, il n'était pas prévu que Sonne reçoive de la bière à la figure lors de leur seconde visite au club... Loin d'être gênantes pour le spectateur, ces " erreurs autorisées " sont plutôt plaisantes et prêtent à sourire. Comme souvent, la liberté qui découle de la contrainte a quelque chose de magique.

Le seul petit point faible du film réside dans son scénario, mais il est bien difficile d'en dire plus, si ce n'est que ces deux heures ont bouleversé la vie de Victoria.

Les acteurs sont très bons, les deux principaux comme les seconds rôles. L'aventure du tournage les a, semble-t-il, beaucoup marqués : lors de l'avant-première, en présence de l'équipe, la complicité entre les acteurs était encore palpable.

Au-delà des acteurs, il faut également souligner la prouesse des techniciens, et notamment des preneurs de sons, qui ont fait un travail remarquable pour faire entendre les respirations, les essoufflements et autres souffles des protagonistes. Ce qui ajoute au réalisme et à l'intensité des scènes.

Ce n'est qu'au moment du générique que le spectateur se rend compte qu'il a été tenu en apnée, immergé dans cette histoire qui ne comporte aucune ponctuation. George Perec l'avait aussi fait en littérature dans L'Art et la manière d'aborder son chef de service...

Le procédé n'est donc pas forcément novateur. Des films récents comme Birdman (2014) sont également un plan-séquence, même si dans ce cas, tout a été travaillé en post-production, afin qu'aucune coupe ne soit visible.

Mais la prouesse de Victoria est qu'il s'agit bel et bien d'un vrai plan-séquence tourné. Et ne serait-ce que parce qu'il interroge la notion de montage chez le spectateur, le film fera date dans l'histoire du cinéma.

En savoir plus :
- http://www.jour2fete.com/index.php/films/223-victoria (site officiel du distributeur)
- date de sortie France : 01/07/2015

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