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Essais selection elle 2016: des témoignages poignants: Body Blues d'Elsa Boublil et Naître et survivre de Holden

Par Eirenamg

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Body Blues est le témoignage de l’auteur sur les conséquences des agressions dont elle a été victime enfant. D’abord à 6 ans puis à l’adolescence et aussi des agressions du quotidien. Une seule chose l’a sauvé son amour de la musique, du jazz et la rencontre avec son mari.

Elle raconte son rapport au corps, ses souvenirs, son mal être, ses angoisses. Elle explique sa difficulté à ne pas avoir honte, sa peur d’être rejetée, les conséquences de ses agressions sur son corps avec les maladies à répétition. Elle évoque son besoin de se défaire de ses maux par les mots, son amour de la musique, de la vie à travers le jazz. Elle veut se libérer du fait de n’avoir pas osé témoigner contre ces hommes.

Le style est vibrant, percutant, des phrases courtes, rythmés par des courts chapitres comme en musique. Cette collection de souvenirs, son cheminement intérieur et les conséquences intimes de cette violence sexuelle sont bouleversantes. L’auteur est pudique, elle décrit ses sensations, interrogations, son mal être. On a envie de la consoler et de lui dire que son message a été entendu, et on espère qu’elle s’est en partie libérée grâce à ces lignes. Son amour de la musique et la place qu’elle a dans sa vie est un contrepoint lumineux, d’espoir, de guide dans sa reconstruction. J’ai apprécié ses références musicales et cheminer avec elle à travers son histoire. De même l’illustration de la couverture avec un dessin d’Egon Schiele est bien représentative de la vision  de ce corps qui apparait comme un ennemi et le symbole de la douleur chez l’auteur.

Un témoignage poignant sur la violence faite aux femmes, un récit personnel qui touche et qui fait grandir, peu importe le temps, les mots et la musique peuvent permette d’avancer et de guérir comme le montre l’auteur. Alors découvrez ce témoignage et écoutez les confidences de l’auteur.

Naitre ou survivre est un témoignage vibrant sur l’enfer des camps et l’horreur nazie, à travers un épisode peu connu la vie de ces jeunes mères dans les camps de la mort, Prizka, Anka, Rachel  et de leurs enfants. Trois enfants Mark, Eva, Ana qui nous accueillent d’ailleurs au début du livre et qui ont 70 ans. Chaque partie raconte l’histoire de ces destins brisés par la guerre, la vie avant la guerre, les tentatives de survie dans les pays occupés ou les ghettos de Pologne. Puis le départ, le trajet, la séparation brutale des familles et leur arrivée aux camps où le docteur Mengele a posé à chacune la même question « êtes vous enceinte jeune dame ? » Elles ont toutes répondues non ce qui les a sauvées de la 1ere sélection à l’arrivée du camp.

La 1ere partie correspond à l’avant guerre et le début de l’occupation où elles ne prennent pas conscience du danger et ne s’enfuit pas, Les souvenirs heureux, la rencontre avec leur mari et la vie familiale sont omniprésents. La  deuxième partie de l’ouvrage est consacrée à la vie dans les camps d’abord soit dans les ghettos comme à Lodz ou Trezhin, à Auschwitz ensuite qui nous décrit de manière implacable la vie dans le milieu concentrationnaire. Puis elles sont transférées dans une usine d’armement à Freiberg en Allemagne, avec le travail forcé, une étape de plus dans la déshumanisation. La troisième partie correspond à leur enfer à Mauthausen et à la libération du camp. Enfin la dernière partie correspond à leur vie après la guerre.

Les photos des familles, des lieux, des wagons ou des ghettos, le travail de l’auteur sur les témoignages, pour reconstituer l’histoire de ces familles détruites par l’horreur sont un plaidoyer contre l’oubli de cette barbarie sans nom. Ce travail historique est précis avec les dates, chiffres et les conséquences pour ceux dont on a retrouvé la trace ou l’histoire. Cette description clinique, de ce mécanisme de mort fait froid dans le dos. La connaissance de ces familles, de leurs espoirs de s’en sortir, de leur lutte pour la survie est admirable. Comment survivre, vivre dans un enfer pareil ? Ce témoignage est à mettre dans toutes les mains pour ne pas oublier jusqu’où l’homme peut aller dans l’inhumanité et la monstruosité. La description, du sadisme, des privations,  du travail forcé, de la propagande des nazis qui utilisent les conseils juifs eux même pour tromper et multiplier les convois à l’Est sont bouleversants. Les habitants à proximité de Freiberg et de Mauthausen qui les regardent comme des fantômes et ne les aident pas.

Pourtant au sein de cette horreur il y a l’amour de ces couples, cette volonté de garder cette vie en espérant en 1944 que ça va allait mieux. Ce qui ne sera pas le cas pour ces 3 femmes qui font partie des derniers convois, parfois inconsciente comme Anka qui est persuadée de retrouver son mari et sa famille à Dresde.

Les privations, la perte de tout, la nudité qu’on impose pour nier jusqu’à leur identité fait venir la nausée, comment rester insensible à ces témoignages,  comment des personnes peuvent faire ça à d’autres sans états d’âme ? Comment ces jeunes femmes ont survécu enceinte, malnutries, maltraités ;  malade ? Elles voulaient survivre pour leurs enfants, pour retrouver leurs familles et leurs maris. Certaines se sont raccrochées à une phrase de leur mari comme Priska qui lui avait dit de tenir en ne regardant que les belles choses, à la phrase d’autant en emporte le vent «Demain est un autre jour en se forçant à tenir debout.

Il y a quelques lueurs d’espoir parfois comme lors d’une halte dans un village qui leur fait à manger et essaye de les sauver à Horni Briza, dans l’attitude de certains ouvriers à l’usine. Le retour dans le pays notamment pour Rachel et ses 3 sœurs avec Mark en Pologne est difficile, elles n’ont plus rien, on refuse de leur rendre leur bien et l’antisémitisme est toujours là. La douleur de l’incertitude, de ne pas avoir de tombe sur laquelle pleurer, des lieux méconnaissables à leur retour c’est le 2e choc pour les rescapés. Certaines ne veulent plus en parler comme Rachel ou en parle ouvertement comme Anka. Les rencontres entre ces 3 bébés miracles lors des commémorations à Mauthausen sont aussi fortes en émotions.

Heureusement ces enfants et leurs mères ont survécus, ils ont reconstitués une famille eux qui avaient tout perdu, leur identité, leur histoire et ce livre les fait sortir de l’oubli, contrecarre la volonté des nazis de les avoir éliminé définitivement car à travers ce live, leur souvenir existe et se perpétuera.

Ouvrage nécessaire et indispensable, qui met des mots sur ces horreurs, sur cet indicible qui même s’il est connu fait toujours mal à l’âme et à notre humanité. Ouvrez ce livre et découvrez cette lumière au fond de l’horreur, la bougie de l’espoir à travers ces destinées de femmes et d’enfants qui sont revenus de l’enfer et sont un bel hymne à la vie.

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