Voici donc la deuxième partie pour apprendre à réduire drastiquement le nombre de photos floues. Le premier opus était, souvenez-vous, consacré aux flous de bougé dus au mouvement du photographe.
Aujourd’hui, je continue sur ce thème, sauf que cette fois-ci je ne m’intéresse pas au photographe qui tremblote ! J’aborde le sujet du sujet. Vous l’aurez compris, pas celui qui statique ! Au contraire, celui qui bouge et qui potentiellement, est susceptible de créer du flou.
L’occasion pour pour moi de vous rappeler, qu’il existe deux types de flou de bougé (oui, je sais, je rabâche encore et encore !) :
- celui généré par le photographe parce, bien souvent, il utilise des longues focales,
- et celui généré par le sujet en mouvement, ce dont on va parler ici.
Je mets les pieds dans le plat tout de suite en vous expliquant pourquoi le sujet que vous photographiez est flou sur votre écran (et aussi sur papier évidemment). Deux raisons :
- la première, c’est parce que l’animal bouge trop, trop souvent et surtout trop vite !
- la deuxième, c’est parce que la vitesse d’obturation (qu’on devrait d’ailleurs plutôt appeler temps d’exposition, mais c’est un autre sujet) n’est pas assez rapide (ou pas assez court si on parle de temps d’exposition).
Une patte d’ours qui semble nette n’est-ce pas ? (photo prise au 1/320 à f/4)
Un crop de 100% sur la patte permet de voir que la netteté n’est pas présente. Vitesse trop basse !!
Vous pourriez presque arrêter de lire l’article maintenant ! Vous savez effectivement pourquoi c’est flou. Bon, ce serait tout de même dommage car, savoir la cause, c’est bien, mais connaitre la façon d’y remédier, c’est mieux !
Voici donc comment faire pour supprimer totalement le flou de bougé de l’animal sur la photo. Je dis bien totalement car si ça n’est pas le cas, si c’est juste un peu, l’animal sera un peu moins flou, ok, mais flou quand même ! Or, sauf effet artistique voulu et assumé, vous, ce que vous voulez ( et moi aussi) c’est d’avoir l’animal net, archi net !
Quels sont les animaux qui bougent ? Et pourquoi !
Le cas des oiseaux
Question bougeotte, sachez que toute la faune sauvage n’est pas soumise au même régime. Certains animaux sont très bons pour entretenir une réputation de remuer sans discontinuer. Et inversement, d’autres bêtes (dieu que c’est moche ce mot pour désigner les animaux !) sont réputés pour avoir la cool attitude.
Pas besoin d’avoir un doctorat en éthologie (étude du comportement des animaux … et hop, un nouveau mot à placer en soirée ) pour être informé de ceux qui bougent beaucoup, un peu ou pas du tout. Il suffit d’observer (ce qui est la base de la base de la photographie animalière), tranquillement, sans se prendre la tête, tout ce qui se passe autour de vous. Bien sur, ces temps d’observations seront bien plus efficaces si vous êtes bien cachés dans un affût photo facile à faire.
Voici pour ma part, ce que j’en retire de mes nombreuses heures d’observation.
La plupart des oiseaux bougent beaucoup, avec en tête les passereaux. Rouge-gorge, mésanges (toutes), rouge-queue, moineaux domestiques (et friquets … mais un peu moins fréquents les friquets ). De vraies piles électriques ! Il suffit de quelques minutes d’examen à la mangeoire pour s’en rendre compte. Mais pas seulement : j’ai souvenir d’un groupe de mésange à longue queue en plein campagne … quelle énergie ! J’encourage les fabricants d’appareil photo à créer un mode Scène spécialement dédié à ces mésanges ! Ou sinon vous pouvez aussi (et surtout !) aller lire ce que j’avais écris à ce sujet : comment photographier les mésanges à longue queue.
Alors pourquoi ces petites choses bougent autant ? Parce qu’elles sont sur le qui-vive en permanence. Rendez-vous compte qu’à tout moment, un chat ou un épervier, pour les prédateurs les plus fréquents, peuvent leur sauter sur la tête ? A leur place, je ferais pareil ! Je ne cesserai pas une seule seconde de tourner la tête à droite, à gauche, de décoller, de revenir, …
Voilà donc pourquoi ces animaux, proches de nous par ailleurs, sont si difficiles à saisir sur la pellicule le capteur.
Heureusement, il existe d’autres espèces plus calmes. Chez les oiseaux, il y a les rapaces comme les buses ou les chouettes qui sont capables de rester sur un piquet des heures durant. Elles aussi surveillent, et évidemment pas pour le même but. En contre-partie, difficile de les approcher à moins de 100 mètres dans nos campagnes.
En gros, c’est soit les oiseaux sont proches (en distance je veux dire) mais ils bougent trop, soit ils ne bougent pas mais ils sont trop loin !!
Le cas des mammifères
Chez les mammifères, la donne est sensiblement la même. Il y a un tas d’animaux qui s’agitent en continue et un autre tas qui gigotent largement moins ( ce qui ne signifie pas qu’ils ne bougent jamais hein !)
Du coté des remuants, on a les rongeurs, les grignoteurs. Les écureuils sont pas mal de ce coté là, tout comme les campagnols. Les lapins de garenne, pour bien les connaitre, bien qu’ils soient sensés surveiller en permanence les alentours, peuvent rester immobiles de très longues minutes. Et ça, c’est top ! Enfin, pour la netteté car pour le rendu du comportement naturel animalier, c’est bof !
Les moins remuants sont les mammifères de plus grande taille : les renards, les blaireaux, les chevreuils, biches et cerf. Entendons-nous bien. Je ne dis pas qu’ils sont capables, à l’instar des buses, de faire le piquet des heures durant. Loin de là. Il se trouve juste qu’ils sont moins atteints de « frénésie spasmophilique » que leurs petits congénères ! Car en dehors de courses de fuite, ils ont des attitudes plutôt lentes.
Un portrait de Lynx effectué au 1/125 à f/4. Un mammifère au repos, c’est pratique ! (photo prise au parc animalier de Ste Croix)
Tiens, au passage, vous remarquez que ceux qui remuent sans discontinuer, ou presque, ce sont les proies, et ceux qui restent plutôt calmes, sont les prédateurs ? Moi qui n’aime pas bien être stressé, je me ferai plutôt réincarner en prédateur !
Comment lutter la bougeotte des animaux ?
En leur demandant gentiment voyons !
En écrivant cette grosse bêtise, je pense quand même à ce rêve de gosse qu’on a tous eu : être capable de parler aux animaux. Entre celui-ci et pouvoir voler, mon coeur balance ! Et vous ?
La vitesse d’obturation
Bref ! Il va sans dire qu’il nous est impossible d’influencer le comportement d’un animal (dans le cas d’un photographe à l’abri dans son affût photo). Alors comment faire ?
En modifiant ce qui est modifiable : l’appareil photo !
La cause principale du flou de bougé est une vitesse d’obturation insuffisante relativement à la vitesse de l’animal.
La solution est donc toute trouvée pour remédier à ce problème : augmenter la-dite vitesse d’obturation !
Dans le cas des passereaux, il ne faut pas descendre en-dessous du 1/250. Car c’est le flou quasi assuré. Pour aller plus loin vous pouvez voir l’épisode #2 de mon émission Une Question – Une Réponse, comment photographier les oiseaux en vol à la mangeoire
Pour atteindre la vitesse désirée, la technique n’a pas changé :
- ouvrir le diaphragme le plus possible
- puis si ça ne suffit pas, augmenter cran par cran la sensibilité, jusqu’à obtenir la vitesse de 1/250.
Mise en garde : modifier un paramètre dans un sens, en change un autre automatiquement. Vous commencez à connaitre maintenant la musique non ? Alors ayez en tête que plus vous ouvrez le diaphragme (c’est à dire un nombre f/ petit) moins la profondeur de champ (zone de netteté) est grande.
Alors oui, vous réduirez grandement le flou de bougé avec une grande ouverture (donc une grande vitesse) … mais tout en prenant le risque d’avoir la tête ou l’oeil de l’animal en dehors de la zone de netteté. Pas facile !
Alors que faire ? Et bien c’est simple. Ouvrez le diaph’ à fond car de toute manière c’est la vitesse qui vous importe.
Et pour la mise au point, si vous suivez ces quelques conseils, tout ira bien :
- mettez-vous en MAP auto
- visez la tête avec le collimateur central
- mode MAP continue
- pensez enfin à prendre en rafale pour augmenter vos chances de réussite.
Un ours qui secoue la tête à la sortie de l’eau, ça va vite ! Il fallait bien 1/2500 s à f/4 pour figer ce mouvement
Un grop de 100 % prouve que contrairement à la patte vue plus haut, la netteté ici est parfaite. Merci le 1/2500 !!!
Précision sur la sensibilité
Tout à l’heure je vous disais la chose suivante : pour atteindre la vitesse souhaitée, la montée en ISO peut vous y aider. C’est notamment le cas lorsque :
- les conditions de lumières commencent à faiblir. Début et fin de journées évidemment, mais aussi en forêt.
- quand l’ouverture maximale de votre objectif est limitée. C’est le cas avec les objectifs type 70-300 mm qui ferment à f/5.6. Dans bien des cas ce peut être trop juste.
Augmenter la sensibilité est alors obligatoire ! Et c’est tellement facile avec le numérique ! Un coup de molette et hop la sensibilité passe de 100 à 200 ISO, de 200 à 400, …
Règle : à chaque doublement de la valeur ISO, la vitesse d’obturation double aussi.
Exemple : un 1/125 à ISO 200 devient un 1/250 à ISO 400. Pratique non ?
Mais il y a un prix à payer. Tout à l’heure c’était la profondeur de champ perdue avec la fermeture du diaphragme et bien là c’est la création de bruit numérique avec la hausse de la sensibilité.
Le bruit numérique étant une espèce de grain pas très joli qui se voit particulièrement dans les zones sombres de l’image. Il est dû à l’amplification du signal numérique. Mais celle-ci augmente les bonnes informations comme les mauvaises.
Je vous rassure, jusqu’à 800 ISO voire 1600, le bruit n’est pas gênant du tout ! Il devient en revanche plus présent à partir de 3200 ISO (tout en restant acceptable). Par contre, sur la plupart des boitiers grands publics actuels, la barrière des 6400 ISO demeure problématique. Le bruit devient trop présent et un post-traitement est nécessaire.
N’hésitez pas à aller faire un tour sur cet article que j’avais écrit : comment photographier à haut ISO où j’explique en détail pourquoi et comment exposer à droite.
Un cerf au pas de course est bien figé avec un vitesse de 1/1000 à f/4.
Crop de 100 % sur la patte. Oui, c’est bien net.
Pour finir, voici quelques ordres de grandeur pour vous aider à estimer la bonne vitesse d’obturation selon l’activité de l’animal.
- Animaux statiques pour du portrait (lapin de garenne qui fait le guet, buse posée sur un piquet, …) : 1/50 à 1/320, sur trépied évidemment.
- Animaux en déplacement lent (marche et passereaux postés à la mangeoire) : 1/400 à 1/800
- Animaux en déplacement rapide (course ou jeux entre congénères) : 1/1000 à 1/1250
- Oiseaux en vol : 1/1600 à plus
Avant de publier l’article, j’ai lancé une petite question toute bête sur la page Facebook du blog :
Pour vous, quel est l’animal qui bouge le plus de tous les temps dans l’univers ?
Voici vos réponses !