Je reprends donc mon récit là où je l’avais laissé… : Lors d’un voyage surprise en ferry entre les îles qui se trouvent sur le trajet Bergen-Stavanger.
Nous remontons dans le car après cette grande bouffée d’air pur et frais et nous reprenons la route en compagnie de nos Norvégiens, des habitués du paysage. Bref, nous faisons figure de touristes de base, émerveillés par un « rien » et idiots euphorisants jusqu’à la moelle. Alors que nous traversons un tunnel, le camion qui transporte de gros blocs blancs devant nous en perd un… de gros bloc blanc. Le car freine brusquement et sur une distance assez courte… Toutes les voitures derrière nous freinent brusquement et les conducteurs sur la voie d’en face s’arrêtent aussi sec. A la lumière des néons jaunâtres du tunnel, qui, j’en suis sûre, a été creusé sous des tonnes de roches montagneuses, presque tous les conducteurs descendent bien conscients du potentiel dangereux de la situation si elle n’est pas réglée dans les plus brefs délais. Heureusement, le bloc blanc s’avère être un bloc… de polystyrène… géant (et quand je dis géant, c’est géant) que trois messieurs auront tôt fait de ranger sur le bas côté du tunnel afin que la circulation reprenne sans encombre. Après tant d’émotions sur le bateau, une petite frayeur s’ajoute à mon taux d’adrénaline. Je suis bien vivante.
Nous reprenons (encore une fois la route) et peu de temps après, le conducteur refait une annonce incompréhensible au micro. Nous n’attendons pas longtemps avant de comprendre grâce au contexte que nous nous embarquons pour une deuxième croisière surprise. Bien qu’encore loin d’adopter l’attitude blasée des autochtones, force m’est de constater que l’enthousiasme, quoiqu’encore débordant, n’est pas exactement le même. Il (n’)arrive (qu’)à 98% de la cheville de ma première réaction. Tout est relatif. Mais je remarque malheureusement qu’une petite portion d’émotion pure et dure manque à l’appel. Combien de voyages les Norvégiens ont-ils fait pour tomber à un taux d’émerveillement aussi bas ? La capacité à double tranchant de l’homme à s’adapter, à s’habituer, aux situations (et en l’occurrence, même aux situations les plus géniales) a encore frappé.
Ce qui me frappe également, c’est le vent. Encore une fois, je me soumets totalement aux éléments pour vivre pleinement ce petit périple (d’ailleurs, dans un coin de ma tête, je pense déjà au petit stock de mouchoirs qu’il va me falloir constituer pour parer les conséquences probables de mon exposition prolongée à un climat propice aux maladies ORL). Et encore une fois, je suis frappée. Agrippée à la barre du devant du ferry, luttant pour que mes yeux ne soient pas asséchés définitivement d’un seul coup de vent (un seul), je pense… Jack et Rose ont dû tourner leur mythique scène… à l’arrêt. Parce que c’est juste pas possible. Le vent, la vitesse du bateau et la conséquente résistance à l’air me poussent déjà tellement vers l’arrière, qu’à deux en se tenant à peine, c’est pas possible. Mais passons…
Après toutes ces émotions, nous arrivons enfin à Stavanger. Stavanger, le triangle des Bermudes de ma comparse de voyage. Laissez-moi vous planter le décor. Nous arrivons dans une ville inconnue après 20h et en retard pour le check-in à l’auberge. Et là impossible de trouver ladite auberge. Nous avons beau recouper les plans de nos guides et ceux de la ville, rien ne colle. Dire que je ne suis pas douée en orientation est un euphémisme maintes fois répété et toujours vérifié. Mais quand Sarah, censée avaler un GPS tous les matins au petit-déjeuner, n’y arrive pas non plus… Il faut se rendre à l’évidence, nous sommes perdues. Et il faudra trois Norvégiens et une petite heure pour nous indiquer la bonne route.
Une auberge assez petite d’extérieur d’ailleurs. En réalité, à l’intérieur, il s’agit d’une espèce de grande maison noble dont toutes les cloisons auraient été démolies puis reconstruites à la manière d’un vrai labyrinthe pour y caser le plus de chambrées possibles. Impossible de cartographier l’architecture interne du bâtiment avec précision dans ma tête… C’est dans ce labyrinthe que nous rencontrerons une Finlandaise de passage pour parfaire sa formation médicale, un chinois de plus de 70 ans qui voyage avec sa femme et qui nous explique qu’il crapahute beaucoup car cela ne fait pas longtemps que la Chine les autorise à parcourir le monde alors il veut en profiter à fond avant de mourir, et une australienne qui nous a demandé pourquoi les filles de notre génération n’étaient toujours pas mariée ni mère à la trentaine (oui, un peu comme dans Bridget Jones, sauf que, nous, on répond pas qu’on a des écailles sous nos fringues, on répond qu’on a nos études, notre boulot, nos voyages, nos rêves bien à nous, bref une liberté que les femmes nous précédant n’avaient pas forcément et que les suivantes, espérons-le, connaîtront encore plus largement).
Je me rends compte que je déblatère mais que je n’ai même pas encore attaqué le vif du sujet : Stavanger. Stavanger est une ville pétrolière (« Total »ment pétrolière si je peux me permettre) située au sud-ouest de la Norvège et d’où on peut atteindre facilement le Lysefjord, objet de notre visite. Allons à contre-courant de la chronologie et faisons un petit détour par la ville en photo :
Je n’ai pas besoin d’en dire autant que précédemment car vous l’aurez compris : le vieux Stavanger, c’est char-mant ! Le reste de la ville, le moderne, ne dépaysera pas les Européens.Il y a aussi de nombreuses références au fameux Prix Nobel décerné, comme chacun sait, à Oslo.
Le but de notre voyage à Stavanger était principalement de naviguer dans un Fjord. Évidemment. Là encore, je laisserai les photos parler d’elle-même. (Oui parce que je sais me taire aussi. Quand la beauté est trop criante, il ne faut pas briser le silence). (Sauf pour dire que l’entrée du Fjord ne fait que 30 m de large…) Et que c’est un peu comme pénétrer dans la Terre du milieu parfois… Et que tu te demandes sérieusement ce que font les gens dans la vie et comment ils se débrouillent quand ils doivent se faire soigner pour une raison ou pour une autre lorsqu’ils habitent là (ici et ailleurs en Norvège car j’ai bien dû me poser la question une demi-douzaine de fois dans le train pour Bergen au milieu des montagnes ou dans les campagnes qui bordent en ligne la côte sud du pays). Donc si on résume : QUOI ? T’habites ICI ? Mais tu fais quoi dans la vie ?? Et comment tu fais si tu te casses une jambe ou si t’es enceinte sérieux ?? Je laisserai le mot de la fin à cette photo. Car si vous regardez tout au fond, là-bas dans la brume, ce qui nous est à peine dévoilé, qu’on devine mais qu’on ne « sait » pas, vous pouvez voir que quelque chose, on ne sait quoi, quelque chose de bien plus grand que nous, d’immensément plus grand que nous, s’y cache.A suivre : une attaque de mouette pas rieuse du tout, le parc Vigeland en long en large et en travers et Oslo !