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"Sur une fresque du Yanglegong, temple du sud du Shanxi, on voit deux personnages connus du panthéon taoïste : à droite Zhongli Quan, un immortel, à gauche Lu Dongbin, qui deviendra immortel à son tour. Ce dernier est venu voir son maître dans la montagne pour lui demander de l'initier aux secrets de l'alchimie interne. Il se tient droit, dans une attitude de respect, les mains joints dans sa robe de lettré blanche à bords noirs. Il semble étranger au monde qui l'entoure, aux forces sourdes des eaux, de la roche et du bois. Il est un crops étranger et paraît étranger à son crops, dont on ne voit que le visage pâle. Le maître se fond au contraire dans la nature. Son laisser-aller, le désordre de sa tunique, de sa chevelure et de sa barbe abondante, l'accorde entre le vert de l'habit et celui des aiguilles de pin et des mousses, la parenté de son teint basané et de l'humus le montrent assez. Ses pieds, ses mains, son ventre rond sont bien visibles et tout respire en lui l'aise et la puissance. Lu Dingbin semble pris dans un rêve tandis que dans les yeux du maître perce une terrible présence d'esprit. Rien n'exprime de manière plus saisissante le regard que l'initié taoïste jette sur l'homme commun, prisonnier de la règle sociale et d'un rapport aliéné à lui-même".Jean-François Billeter, Essai sur l'art chinois de l'écriture et ses fondements, pp. 333-334