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D'après une histoire vraie

Par Nicolas S.
D'après une histoire vraieDans son précédent livre, intitulé Rien ne s'oppose à la nuit, Delphine de Vigan racontait l'histoire de sa mère. La première partie du récit était très prenante : elle racontait l'enfance et les souvenirs de famille, les lieux, la fratrie. Dans la seconde partie, plus proche de nous, le récit devenait plus décousu, les paragraphes étaient plus courts et menaient à cette scène qui a fait couler beaucoup d'encre : la découverte par l'auteur du corps de sa mère, à son domicile. Souffrant de trouble bipolaire et vivant dans un isolement intérieur, elle avait fini par mettre fin à ses jours. Rien ne s'oppose à la nuit a connu un succès d'ampleur, non pas parce que tout était vrai ou attesté, ni exempt de fiction, mais parce qu'il apparaissait comme une mise à nu authentique, sincère, pudique.Dans son nouveau roman D'après une histoire vraie, Delphine de Vigan prend ce point de départ : quand la reconnaissance massive du public débouche sur un constat d'assèchement de l'écriture. Son personnage s'appelle Delphine de Vigan et nous sommes censés lire une "autofiction". L'histoire commence avec la rencontre de L., une femme qui va s'immiscer très habilement dans la vie quotidienne et dans l'intimité de la narratrice. L'ouvrage est divisé en trois parties : "Séduction", "Dépression" et "Trahison". L'écriture au départ peut paraître assez simple et le roman se lit vite, sans effort. L'auteur passe - à mon sens - un peu trop de temps à poser le contexte et les digressions, les parenthèses, les anecdotes sont courtes mais nombreuses. Avant la moitié du volume, pourtant, l'intrigue s'accélère et L. resserre son emprise mentale sur la narratrice. Delphine de Vigan entremêle avec habileté le thème de la substitution d'identité, celui de l'isolement dépressif, celui des souvenirs et de la construction de l'identité. On pense à des œuvres aussi diverses que Basic instinct de Paul Verhoeven, La Peau de chagrin de Balzac et surtout Misery de Stephen King (dont une citation est mise en exergue de la troisième partie).Dans ce nouveau roman, Delphine de Vigan interroge le dosage du "vrai" et de la fiction dans la littérature, les séries, la télé-réalité. Finalement, tout a déjà été écrit et selon le mot célèbre de Proust, « la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature ».Vrai et fiction : curieuse dichotomie. C'est pourtant un leitmotiv de cette rentrée littéraire 2015. Anne Wiazemsky a publié un nouveau livre de témoignage qu'elle a intitulé "roman". Laurent Binet commence sa biographie romancée de Roland Barthes par ces deux phrases : « La vie n'est pas un roman. C'est du moins ce que vous voudriez croire. » Agnès Desarthe sort un nouveau livre qui, selon son éditeur, "signe son retour à la fiction". Jérôme Garcin publie la biographie d'un personnage historique dont les livres d'histoire ont oublié le nom.Quoi qu'il en soit, on peut aussi ne pas être dupe des fausses questions et prendre tout simplement plaisir à lire. C'est pour cette raison que je vous recommande Rien ne s'oppose à la nuit, qui a paru au format poche en 2013, et D'après une histoire vraie qui vient de paraître en grand volume.478 pages, éd. JC Lattès - 20 euros

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