Olivier Norek partage avec moi pas mal de points communs (ou l’inverse, je ne sais pas ce qui est le moins prétentieux). Si si… Jugez-en par vous même :
– Il est né en 1975 et fêtera donc ses 40 balais cette année. Comme moi.
– Il n’est pas très grand. Attention ! Je n’ai pas dit petit, non, non, il est moyen. Comme moi.
– Il travaille pour une grande maison du service public, la Police Nationale, tout comme moi qui traîne mes guêtres depuis vingt ans à l’Education Nationale.
– Il adore la série Engrenages. Comme moi.
– Il a été finaliste du prix polar Lens en 2014 et a perdu. Comme moi cette année. En effet, comme moi, il écrit des romans policiers, pas mal troussés, vifs, directs et ancrés dans notre époque.
Évidemment, deux ou trois trucs nous différencient :
– Olivier Norek attaque l’apéro dès que midi se profile (même de loin) tandis que j’attends sagement que la grande aiguille vienne s’aligner verticalement avec la petite. Ses racines polonaises m’a-t-il expliqué.
– Les mômes qu’il se coltine à longueur de journée (un peu moins maintenant qu’il est en dispo) ont souvent plus à se reprocher qu’un exercice de sciences physiques pas fait. Et je vois bien le tableau après cinq années d’enseignement à Villiers-le-Bel où les problèmes « extérieurs » des gamins franchissaient souvent les portes du collège pour s’inviter à l’intérieur !
– Ses cheveux sont bien blancs, les soucis sans doute, quand les miens arborent toujours ce magnifique éclat Terre d’Ombre qui me donne 10 ans de moins et que beaucoup m’envient.
– Non seulement il aime la série Engrenages mais il est en charge de l’écriture de la sixième saison. C’est vous dire si cet homme est important et cela explique l’étrange mais amusante dédicace qu’il a gribouillée écrite sur mon exemplaire !
Bon… Ceci étant dit, et son roman ?
Code 93 est un bon polar. Moderne. Sans fioriture ou pas trop. C’est un roman du XXIème siècle, celui dans lequel on vit, assurément. Le siècle du Grand Paris
Avec le Capitaine Coste, chef de section à la SDPJ 93, on plonge dans les méandres d’une enquête qui nous (lui) réserve quelques surprises : un géant black au prénom idoine qui, tel Jésus, ressuscite sur la table du médecin légiste, un grand brûlé qui sert de cabine téléphonique ou encore un cadavre vampirisé jusqu’à la moelle. La construction narrative est originale car l’auteur entremêle les chapitres concernant le meurtrier, le Capitaine, l’équipe d’investigation et le journaliste fouille-merde. Non pas que ce procédé soit extraordinaire en soit, c’est même un classique, mais Olivier a mélangé son puzzle d’une façon peu commune, c’est agréable.
Ce n’est pas un thriller, on sait rapidement qui est le coupable mais on suit la lecture avec plaisir pour comprendre le pourquoi du comment. Tout ça sur fond de cités séquanodyonisiennes dans lesquelles le Lieutenant Jérémy Lefort serait comme un piranha dans l’eau (mes lecteurs comprendront).
Perso, j’ai bien aimé :
– le style et les petites pointes d’humour (« Il avait ensuite établi une liste de ses points de chute comme de ses points de shoot ») ;
– les petites citations des personnages à l’entame des parties (il n’est pas impossible que je pique l’idée… Quoique, piquer une idée à un flic n’en est peut-être pas une bonne pour le coup) ;
– les références nombreuses au métier de policier qui apportent un côté documentaire intéressant ;
– les petites références littéraires à demi-cachées. Sartre, Dante et un de mes auteurs préférés, Tolstoï : « Vous me jugerez certainement cynique mais certaines familles ne semblent écrire leur histoire que dans le malheur. » dit Margaux Soultier page 218. À rapprocher de l’incipit d’Anna Karenine de l’écrivain russe. Mais peut-être me trompé-je ? Olivier, si tu lis ce billet, laisse un comm’ !
Un ensemble convaincant donc qui a propulsé Olivier Norek au rang de nouvelle coqueluche de Gérard Collard pour l’année 2015. Ce n’est pas volé et je ne suis pas jaloux. Au contraire, cela me laisse espérer que, le jour où Gégé tombera sur l’un de mes romans, j’ai des chances de lui plaire !