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Venir à Reims... et prendre Racine !

Par Eric Bernardin

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Jusqu'il y a une quinzaine de jours, je n'avais jamais entendu parler de ce restaurant. Et puis le vigneron champenois Francis Boulard a posté sur Facebook quelques photos d'un repas à Racine. Cela m'a tout de suite donné envie de m'y rendre. La vie fait bien les choses : je devais aller à Reims la semaine suivante ;-)

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Kazuyuki Tanaka a d'abord suivi une formation de cuisinier au Japon avant de se rendre en France en 2006. Il rencontre en Bourgogne sa future épouse, Marine. Et ils ne se quittent plus. Ils travaillent ensemble dans différents restaurants étoilés : Gill à Rouen, Régis Marcon, et les Crayères à Reims. Depuis peu, ils ont décidé d'ouvrir leur propre restaurant en plein centre de Reims, à quelques mètres de la place du Forum.

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Le midi, il y a des menus à 29 et 39 €, mais le soir, on est au minimum à 60 € (ou 90 €), avec la possibilité d'avoir trois verres de vins pour 28 €. Je choisis cette option dont le coût me semble raisonnable (et j'ai bien eu raison !). A la lecture du menu, je suis surpris de voir le pigeon servi avant le cabillaud. Je comprendrai plus tard pourquoi... 

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Alors qu'il faut s'y prendre quinze jours à l'avance pour avoir une place le samedi, j'ai réussi à en obtenir une la veille. Par contre, j'avais une contrainte (qui n'en était pas du tout une pour moi) : venir à 19h30. En arrivant au restaurant, j'ai compris : le Rémois dîne tard. J'étais tout seul dans la salle. Lorsque j'aurais fini vers 21h, d'autres pourraient prendre ma place ;-)

Je n'aime pas trop aller au restaurant tout seul. Mais dans ce cas précis, j'avais l'impression d'avoir privatisé la salle et le personnel à mon seul usage. Ce n'était pas désagréable. Marine était très disponible, et le chef est venu à plusieurs reprises me servir lui-même les plats et me donner quelques explications.

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Voilà les mises en bouches : boeuf/anchois, sablé parmesan/lapin, radis/brandade, omble chevalier/riz.

Elles sont toutes délicieuses, aux goûts très précis, et surtout pas grasses du tout (alors que les deux dernières contiennent de la "friture").

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Une sphérification de gaspacho parfaitement réussie, avec sa touche d'agrume japonais.

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Une belle variation sur la pomme verte et la betterave qui me rappelle que je fois acheter ce coupe-lanières japonais qui permet d'obtenir ces fins  rubans de légumes. L'ensemble est très bien équilibré, avec un beau jeu de texture croquante/fondante et une acidité très japonaise qui donne du peps. 

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Un verre de Rosé de saignée de René Geoffroy m'est servi pour accompagner le pigeon. J'ai omis de signaler que tous les verres sont de chez Zalto. Leur finesse extrême permet d'oublier totalement le contenant pour ne se concentrer que sur le contenu.

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Et voilà le pigeon, butternut et vinaigrette tamarin. Déjà, visuellement, c'est superbe.

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La grande surprise, c'est que le pigeon est servi froid, sauf la cuisse qui est tiède. Cela apporte une mâche et un goût beaucoup plus intense que lorsqu'il est servi chaud. Le butternut, cucurbitacée au goût peu prononcé, n'est en fait que le support d'agrumes qui tonifient le plat. Il apporte du moelleux lorsqu'il est cuit, du croquant lorsqu'il est cru, et surtout une belle couleur qui illumine le plat. Il y a aussi des pistaches qui croquent agréablement en bouche, libérant des notes grillées. Et le tamarin de la sauce qui corse un peu l'ensemble. Et puis... l'accord avec le Champagne est juste sompteux : plat et vin non seulement se répondent mais se grandissent l'un l'autre. Un moment magique que je ne suis pas prêt d'oublier.

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Le visuel du cabillaud, pommes de terre et huile de curcuma n'a rien à envier au plat précédent.

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Il y a deux préparations à base de pommes de terre. Il y a le parallépipède doré que l'on voit mieux sur la première photo qui est une sorte de millefeuille croustillant qui mériterait de faire un plat à lui tout seul. Et il y a les cylindres surmontés d'oeufs avruga. Comme ces derniers, ils ont un goût subtil de hareng fumé, vous rappelant un plat beaucoup plus rustique que celui que vous avez sous les yeux. L'oignon que l'on y trouve aussi est ici sublimé : d'un côté croustillant, de l'autre croquant/acide dans une version pickl'isée. On en oublierait presque le cabillaud à la chair d'une irréelle tendreté. Et plein d'autres petits détails comme la bourrache, iodée à souhait.

Le Sancerre Clémence 2014 de Vincent Pinard était bon bu seul. Avec le plat, il est totalement transcendé et devient superbe.

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C'est à ce moment qu'arrivent M. et Mme Olif que je n'avais pas vus depuis un bail :-)

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Le cochon ibérique, céleri et salsifi, même s'il était parfaitement exécuté, m'a moins surpris/touché. Sûrement parce que j'ai cuisiné assez souvent le porc en basse température, et que le plat présentait moins de surprises que  les deux précédents. Mes deux amis l'ont pour leur part beaucoup apprécié.

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Le vin, un Bourgogne Gravel 2014 de Maréchal, était aussi un très bon choix : fin, frais, fruité, en accord avec la chair tendre du cochon. Quant au verre, il vous donne vraiment envie de vous offrir toute la gamme Zalto !

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Moi qui voulait de la surprise, j'en ai eu avec le dessert qui mariait glace au cèpe,  poire et chocolat. A chaque bouchée, on se demandait ce qui allait se passer... En fait, que des bonnes surprises, et surtout une confirmation : les champignons se prêtent admirablement bien aux desserts.

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En haut à gauche, chocolat à la sauce soja (pas si surprenant que ça, mais très bien).

En dessous, une tartelette à  la rhubarbe (très frais) 

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A droite, c'était une crème aérienne et caramélisée à la fève Tonka (ça me fait songer que j'en ai plein à la maison et que je n'en m'en sers jamais). A gauche, il y a de la pâte d'agrume au fond (Yuzu ?). Il était ensuite rajouté un  bouillon d'herbes du jardin : parfait pour terminer le repas.

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Je suis allé faire un tour en cuisine. A ce moment-là, il y avait pas mal de boulot. Donc le chef n'avait plus le temps de discuter... Trois personnes dans un espace aussi confiné travaillant sur les mêmes assiettes en ajoutant chacun un ingrédient à son tour. Tu pourrais passer des heures à les observer !...

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Des assiettes de pigeon en cours de préparation

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Le chef Kazuyuki Tanaka.

Un très beau repas en tout cas que celui-ci, du niveau d'un restaurant (multi?) étoilé, ce qu'il n'est pas pour l'instant. Je n'ai pas de doute qu'il fera parler pas mal de lui dans les années qui viennent. Le couple ayant pu voir dans leurs expériences passées que l'on pouvait vivre et réussir en Province, on peut espérer qu'il ne sera pas tenté par la capitale, déjà (très) riche en cuisiniers japonais. 

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Racine -  8, rue Colbert 51100 Reims

Tél : 03 26 35 16 95   Mail : [email protected]

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