[Critique] RUTH & ALEX
Titre original : 5 Flights Up
Note:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Richard Loncraine
Distribution : Diane Keaton, Morgan Freeman, Carrie Preston, Cynthia Nixon, Sterling Jerins, Claire Van Der Boom, Josh Pais, Korey Jackson…
Genre : Comédie/Drame/Adaptation
Date de sortie : 14 octobre 2015 (DTV)
Le Pitch :
Ruth et Alex, couple de retraités new-yorkais, ont décidé de quitter le bel appartement qu’ils occupent depuis 40 ans. Une décision qui reste néanmoins en travers de la gorge d’Alex, lui qui est très attaché à ce lieu dans lequel demeure tous ses souvenirs. Alors que débutent les visites et que Ruth parvient à persuader son mari de se mettre en quête d’un nouveau foyer qui conviendrait mieux à leur âge, les souvenirs affluent…
La Critique :
Adaptation du roman Heroic Measures, de Jill Ciment, Ruth & Alex est signé Richard Loncraine. Un réalisateur discret, dont le meilleur film reste sans conteste le très sympathique La Plus Belle Victoire, avec Kirsten Dunst. La force de sa nouvelle livraison ? Son casting bien sûr, dominé par les charismatiques Diane Keaton et Morgan Freeman, qui embrassent de concert une histoire toute simple, empreinte d’une belle mélancolie.
Donc oui, à première vue, rien de bien excitant ici. Certes, les acteurs sont excellents, mais au fond, le risque de se retrouver face à quelque chose de vu et revu pouvait très bien rebuter et encourager à faire l’impasse. Surtout étant donné que le long-métrage déboule directement en vidéo, sans passer par la case cinéma.
Cela dit, il serait vraiment dommage de passer à côté, car Ruth & Alex dégage quelque chose qui lui est propre. Un parfum qui fait la différence et qui encourage une vraie tendresse envers ce charmant couple au centre d’une histoire dans laquelle il est facile de se reconnaître, quel que soit notre âge.
À la lecture du pitch, qui évoque la façon dont la vente de leur appartement, pousse Ruth et Alex à se souvenir de leur vie passée entre les murs de cet havre de paix new-yorkais, on se dit que Morgan Freeman et Diane Keaton ne seront finalement que très peu de temps à l’écran, laissant la place à des acteurs plus jeunes, chargés d’interpréter leurs personnages dans le passé, lors de fréquents flash-backs. La bonne nouvelle, c’est qu’en réalité, ce n’est absolument pas le cas. Le dosage entre passé/présent est parfaitement pertinent et laisse la part belle au présent et donc aux stars de l’affiche. Quoi qu’on puisse penser des précédents films de Richard Loncraine, ce dernier n’est pas aussi anecdotique qu’il peut en avoir l’air et ne doit en aucun cas être considéré comme une œuvre mineure, pour laquelle deux mastodontes d’Hollywood ont signé afin d’arrondir leurs fins de mois. L’industrie du cinéma étant ce qu’elle, il est facile d’appréhender le long-métrage de cette façon, mais ce serait faire l’impasse sur un conte moderne, qui se refuse à tout cynisme et tourne également le dos à un opportunisme pourtant galopant pour suivre sa propre route, quitte, à la fin du voyage, à apparaître un peu anecdotique. À tort d’ailleurs, tant Richard Loncraine et ses deux acteurs s’efforcent d’illustrer des sentiments aussi simples que fédérateurs. Derrière la caméra, le metteur en scène n’en rajoute pas des louches et n’appuie pas inutilement lors des passages les plus émouvants. Il laisse parler le talent de ses acteurs. Des comédiens bien entendu parfaits, qui arrivent à traduire à l’écran l’alchimie touchante qui caractérise leur couple. Diane Keaton, classieuse et pétillante, et Morgan Freeman, impérial dans une composition parfois cocasse, parfois plus émouvante, portent une œuvre à fleur de peau, qui attache de l’importance à ces petits moments en apparence anodins, qui offrent pourtant tout son sel à la vie.
Il serait tentant de conseiller Ruth & Alex aux spectateurs les plus âgés, pour la simple et bonne raison qu’il s’avère plutôt « tranquille » dans sa progression, mais aussi compte tenu de l’absence de comédiens jeunes au casting. Mais non, là encore, ce serait dommage. Tout le monde peut s’y retrouver. Tout le monde peut vibrer, devant un récit mine de rien prenant, dont l’une des principales qualités est de capturer une essence, tout en racontant beaucoup. À condition de savoir apprécier son discours et sa singularité discrète.
Ruth & Alex débute finalement là où beaucoup d’autres films s’arrêtent et prouve que même quand l’amour est bien installé et qu’à priori, tout se déroule et s’est déroulé comme prévu, demeurent des questions. Des questions qui méritaient bien un film comme celui-là.
@ Gilles Rolland
Crédits photos : Factoris Films