Un film de Michael Haneke (1997 - Autriche) avec Susanne Lothar, Ulrich Mühe, Arno Frisch, Frank Giering
Furieux et terrifiant.
L'histoire : Georges et Anna, accompagnés de leur petit garçon et de leur brave toutou, arrivent dans leur résidence d'été, près d'un lac. Alors que le père et le fils vont s'occuper du voilier, près du ponton, Anna reste seule à la maison et commence à ranger les affaires. Arrive un jeune homme, qui lui a été présenté tout à l'heure par un voisin qu'ils connaissent bien. Il demande des oeufs, de la part de la voisine qui n'en a plus. Anna s'exécute bien volontiers tandis que le garçon, maladroit, fait tomber son téléphone dans l'eau. Anna râle, il est désormais inutilisable. Le jeune homme part avec ses oeufs mais les explose dans l'entrée... Ah c'est ballot. Vous pouvez m'en donner d'autres ? Puis il est rejoint par un camarade...
Mon avis : Ah depuis le temps que je voulais le voir, celui-là. C'est la première version de Michael Haneke, celle qu'il a faite dans son pays. Il a ensuite réalisé une version US, tout aussi éprouvante, très calquée sur l'autre. Et pourtant, en aucun cas, on a l'impression de voir du déjà vu, parce que l'histoire est tellement épouvantable qu'elle vous glace le sang de toutes les façons, et vous remue les tripes car elle apporte le même lot de questions sur la violence sadique, sur la dérive de nos sociétés, sur la folie, sur le courage... Et on n'a aucune explication sur ces jeunes, ni qui ils sont, ni d'où ils viennent, ni pourquoi ils font ça... On devine qu'ils ne viennent pas de milieux pauvres (ils ont des discussions très cultivées entre eux et savent parfaitement se faire passer pour des jeunes hommes très courtois afin de pénétrer dans les maison) ; leur comportement n'est rien d'autre que ce que nous dit le titre : funny games. A l'heure où on déplore la violence des jeux vidéo qui banalisent la mort et le meurtre, et que les fournisseurs (et même les psys) s'acharnent à nous dire que non, ça n'a aucun rapport avec les comportements de certains jeunes... y a quand même de quoi s'interroger.
Ce Haneke est en plus un redoutable accusateur : alors qu'on si attend le moins, muet de stupeur devant l'écran, le méchant n° 1 se tourne vers nous, spectateur, nous prend à témoin genre : "Qu'est-ce qu'on va lui faire maintenant ? Vous en pensez quoi ? Ca vous plaît, hein ?" nous plongeant dans notre caca : nous sommes d'ignobles voyeurs !!! Et si nous en avions la possibilité, que ferions-nous pour aller aider ces gens ?
Bon, je ne me suis pas sentie visée (enfin... si un peu), bien que l'impact soit extrêmement fort. Ce n'est que de la fiction, flûte. N'empêche qu'avant d'aller au dodo, j'ai demandé à mon mari d'aller vérifier que toutes les portes étaient bien fermées !
Je l'ai déjà dit dans le premier billet, le film fait beaucoup penser à Orange mécanique : la violence absolument gratuite, juste pour le plaisir de terrifier et de faire mal, aussi bien physiquement que mentalement. Et l'accoutrement blanc... rarement associé à la folie meurtrière. Cependant, les gants blancs et les chemises blanches peuvent faire penser à des médecins... nazis.
A noter qu'il n'est pas gore. La tension et la violence sont difficilement supportables, mais on ne voit pas de plaies béantes, les attaques sont toujours hors champ. Juste le sang qui gicle sur les murs...
Interprétation parfaite. Les deux garçons, à qui l'on donnerait le bon dieu sans confession, sont confondants...
Film pour sado-maso. Assaisonné d'une musique hard metal difficilement soutenable...
Michael Haneke a été surpris par la polémique provoquée par son film. Il voulait dénoncer la violence de certains, le comportement des victimes entre lâcheté et courage, et de là... la manipulation et les mécanismes du fascisme, menace toujours présente planant sur nos sociétés. Il visait une certaine société, les USA en particulier, avec leurs jeux vidéos, leurs armes... Or les Américains n'aiment pas beaucoup les films qui ne sont pas tournés en anglais, avec des acteurs qu'ils ne connaissent pas. Ils n'ont quasiment pas vu le film. Qui est devenu culte pour une certaine génération européenne, fascinée par la violence, pour de mauvaises raisons. Haneke, déboussolé comme Frankenstein par son monstre, a songé à le détruire. Il n'empêche que dix ans après, il en a fait un remake... pour atteindre ce public américain à qui il voulait passer un message. Reçu 100 %. Ou pas.